Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Le défilé Victoria's Secret à Paris, symbole de l'attractivité française

Ce fut un secret rapidement éventé : le défilé de la plus grande marque de lingerie au monde, Victoria's Secret, aura lieu le 30 novembre au Grand Palais à Paris, et sera retransmis le 5 décembre sur CBS pour plus de 8 millions de spectateurs. Mais pourquoi avoir décidé de mettre Paris sens dessus dessous, alors que la menace des attentats y plane toujours, et que la marque n'a pas encore de point de vente en France ?
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Dans un univers de la lingerie qui symbolise une nouvelle ruée vers l'or, on peut être sûrs que Marianne cache encore elle aussi bien des secrets sous ses jupes tricolores.

Ce fut un secret rapidement éventé : le défilé de la plus grande marque de lingerie au monde, Victoria's Secret, aura lieu le 30 novembre au Grand Palais à Paris, et sera retransmis le 5 décembre sur CBS pour plus de 8 millions de spectateurs. Après New York et Londres, c'est la capitale française qui a été choisie pour abriter cette superproduction annuelle, avec ses anges et ses chérubins (voir Victoria's Secret, les anges se déchaînent).

Mais pourquoi avoir décidé de mettre Paris sens dessus dessous, alors que la menace des attentats y plane toujours, et que la marque n'a pas encore de point de vente en France ?

Le choix de Victoria's Secret est tout sauf innocent. Dans un marché mondial de la lingerie en rapide évolution, il s'agit de partir à la conquête du dernier bastion qui résiste encore et toujours à l'envahisseur : avec ses ateliers spécialisés, ses marques à l'ADN bleu-blanc-rouge (Aubade, Simone Pérèle, Princesse Tam-Tam), et un rayonnement mondial de sa culture lingerie (Lise Charmel et Chantelle réalisent 50% de leurs ventes à l'export), la France fait figure de dernier Eden de la dentelle. Pour preuve, face à des ventes de prêt-à-porter en net recul en 2015, celles de la lingerie en France ont augmenté de 1,8% pour un total de 2,8 milliards d'euros.

Paris a encore des raisons de voir la vie en rose. D'abord grâce au dynamisme des pionniers de la lingerie qui ont su se renouveler. Passés pour la plupart sous la coupe de groupes étrangers au début des années 2010 (le suisse Calida pour Aubade, les Coréens de Namyeung Vivien Corporation pour Barbara), les piliers du secteur ont pourtant continué à mettre en valeur leur patrimoine français, avec un savoir-faire en corsetterie et en bonneterie notamment, qui s'exporte avec succès de la Russie à l'Amérique Latine en passant par les États-Unis. À côté de ces marques traditionnelles apparaissent de nouvelles venues poussées par le boom des achats de lingerie en ligne et ses perspectives d'augmentation de 20% d'ici à 2019. Des entreprises bâties sur le modèle des start-ups et qui privilégient le "made in France" : Le Slip français et sa success-story digitale, ou encore Elise Anderegg et ses nuisettes haut de gamme portables de jour comme de nuit, sont parvenues à séduire durablement une clientèle française et internationale.

Fortes de cette cure antirides, les marques françaises de lingerie ont aussi mis à profit l'attrait suscité chez leurs clientes (le budget lingerie moyen des Françaises est de 100 euros par an, et plus si affinités "made in France") pour se diversifier sans en avoir l'air : des pyjamas aux pulls en cachemire confortable en passant par les sweat-shirts de sport, elles proposent maintenant de nouvelles gammes qui se veulent aussi qualitatives que le produit d'origine et qui composent une tenue complète symbolisant l'«allure française », une idée qui se vend aussi bien chez elles qu'à l'étranger. Ainsi Le Slip français, marque originellement masculine, étend à présent son offre à la femme et aux maillots de bain... De quoi rhabiller son monde, hiver comme été.

La lingerie tricolore semble donc parée pour affronter les assauts de la concurrence internationale, même si peu de marques ont les moyens d'accéder au saint des seins qu'est le défilé. Dans le sillage de Victoria's Secret, Etam a lancé le sien en 2008, et a fêté le 27 septembre dernier les 100 ans de la marque à grand bruit sur les réseaux sociaux avec un show placé sous le signe de la "French liberté". La marque italienne Intimissimi s'y est mise aussi en 2014, et a convié cette année un parterre de célébrités à admirer un défilé-spectacle sur glace à Vérone, mis en musique par Andrea Bocelli. Deux enseignes et deux énormes budgets pour un même objectif : recentrer le propos sur le pays d'origine de la marque et non sur le "made in China" de la plupart de ses produits, tout en créant un rendez-vous annuel pour la presse et les réseaux sociaux qui puisse booster les ventes de fin d'année.

Face à cette surenchère croissante de performances déshabillées, on peut se demander si le format du défilé n'appartient pas déjà au passé. Si le spectateur, lassé du ballet incessant de paillettes devant son écran, n'aspire pas à un peu de repos oculaire avec des concepts à la fois réalistes et innovants. C'est la stratégie de Girls in Paris, une jeune marque qui a misé sur ses clientes pour faire le buzz sur Instagram, avec un succès immédiat et plus de 50 000 abonnés à la clé. Ou celle d'Ysé, qui a su toucher les femmes connectées par des créations poétiques disponibles à portée de clic. Deux initiatives françaises et futées, qui remettent la qualité au premier plan et prouvent que les dessous peuvent sortir du boudoir en toute intimité, sans obligation de défiler.

En tout cas, dans un univers de la lingerie qui symbolise une nouvelle ruée vers l'or, on peut être sûrs que Marianne cache encore elle aussi bien des secrets sous ses jupes tricolores.

VOIR AUSSI:

VOIR AUSSI:

Les traitements beauté des stars parfois étranges

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.