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Je te vois, mauvais parent

Oui, je suis là et je te vois, toi, le mauvais parent, assis au bord de la piscine publique, sur les lignes de côté du terrain de soccer ou au parc, les yeux rivés sur ton téléphone intelligent.
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Oui, je suis là et je te vois, toi, le mauvais parent, assis au bord de la piscine publique, sur les lignes de côté du terrain de soccer ou au parc, les yeux rivés sur ton téléphone intelligent. Pendant que ton gamin crie ton nom pour la vingt-deuxième fois afin de te montrer sa dernière pirouette fantastique, tu peines à quitter le monde virtuel de ton appareil pour lever les yeux et lui accorder deux précieuses secondes de ton attention.

Je te vois, mauvais parent, à la caisse de l'épicerie, vidant ton panier sur le tapis roulant sous les supplications de ton enfant qui veut juste tellement le paquet de bonbons fluo dans une bouteille de biberon. Je n'ai pas entendu les menaces que tu lui as chuchotées à l'oreille, mais à voir sa réaction quand tu as relâché son bras, ce ne devait pas être des mots tendres...

Je te vois aussi au resto, ton enfant assis devant ce qui pourrait être sa huitième assiette de croquettes d'animaux et frites de la semaine, pendant que tu manges en paix. Tu as acheté la paix, lui confiant ton précieux téléphone, devant lequel il est hypnotisé par une application débile ou des vidéos d'accidents. Tu ne lui as pas adressé la parole depuis le début du repas...

Je t'ai vu, mauvais parent, engueuler ton fils au hockey l'autre matin, parce qu'il ne patinait supposément pas assez vite. J'ai vu ton regard accusateur devant son manque d'effort et j'ai eu pitié de lui, entouré de ses coéquipiers sur la glace, et pourtant si seul avec sa tristesse.

J'ai été surpris par l'intensité de ta réaction, mauvais parent, quand au centre commercial tu t'es emporté devant un petit dégât de jus. Tes mots étaient mesquins, lourds de sens et injustifiés et tu as surpris mon regard accusateur sur toi. Un regard d'incompréhension, de jugement. Tu es parti, tirant gamin par le bras vers la sortie, laissant le jus par terre.

Je te vois, mauvais parent et je te juge...

Malheureusement.

Mais voici ce que je n'ai pas vu...

Je ne t'ai pas vu dessiner toute la matinée avec ta fille, lui faire des crêpes en forme de cœur et être vraiment «sur la coche» avec elle avant de l'amener au parc, ou au soccer pour qu'elle puisse jouer avec ses amis pendant que tu règles quelques courriels sur ton téléphone.

Je n'y étais pas, ce soir-là, quand ton enfant n'a pas voulu ne serait-ce que goûter au souper que tu avais préparé. Je n'ai pas entendu la discussion que vous avez eue, en route vers l'épicerie, sur les conséquences de ne pas avoir mangé. Je ne t'ai pas entendu, lui expliquer à l'oreille que c'est à cause de ça qu'il n'aurait pas les bonbons biberons fluo, autrement, tu en aurais même mangés avec lui!

Je ne sais pas que, depuis quelques semaines, ton couple bat de l'aile, qu'un froid s'est installé entre vous deux et qu'afin de changer d'air un peu et d'avoir un repas agréable, tu as acheté la paix en laissant fiston manger ce qu'il voulait et pitonner sur ton téléphone avec ses doigts collants.

Je ne suis pas au courant de ton budget serré, des efforts que tu mets au travail afin de permettre à ton enfant de jouer au hockey et des discussions que vous avez eues à ce sujet. Je ne t'ai pas vu pratiquer le soir avec lui à la patinoire du parc, lui faire des passes pendant des heures et l'encourager dans ses efforts. Je n'ai rien vu de tout ça...

Je ne sais pas non plus qu'il manque d'énergie ce matin, car malgré tes consignes, il est resté debout très tard hier soir à jouer à des jeux vidéo et que c'est ça qui t'a mis hors de toi. Je t'ai encore moins vu lui présenter tes excuses à la fin du match et rentrer à la maison jouer à ces mêmes jeux vidéo ensemble.

Je ne sais rien de ton matin d'enfer, celui où tu es parti avec les enfants au centre d'achats avant d'avoir pris ton café parce que la maison t'étouffait. Ton couple au bord du gouffre, la communication entre vous presque morte.

Sans parler du stress au bureau qui a causé ce trop-plein, que tu viens de déverser sur le petit comme le dégât de jus devant toi.

Je n'ai rien vu de tout cela et je t'ai jugé, comme tous ceux qui y étaient et t'ont vu eux aussi...

Là est le problème. Je ne te connais pas et tout ce que j'ai vu de toi est cette photo dans le temps, ce cliché de moment merdique. Les croquettes d'animaux, ta colère au hockey, ton téléphone intelligent, etc. Et je t'ai instantanément collé cette étiquette, toi, le mauvais parent.

Alors, sache ceci, moi aussi je suis un mauvais parent. Selon le moment où tu me verras dans la journée, je pourrai facilement passer pour le parent parfait ou le pire parent du monde, et à cet instant, tu me rouleras des yeux toi aussi... Parce que c'est ça, porter un jugement.

Donc je te propose un marché : pourquoi on ne se donnerait pas tous un break de parents, collectivement? Après tout, les mauvais parents, les parents parfaits, et tous ceux entre les deux sont sommes tous dans le même bateau. Faisons tous de notre mieux, en fonction de notre expérience, nos capacités et nos humeurs.

Ce n'est pas toujours facile, être un bon parent, faire la bonne chose, dire la bonne phrase. Ce dont on a le moins besoin dans cette grande aventure, c'est de se faire juger, regarder, critiquer.

Donnez-nous une chance, donnez-vous une chance et sachez ceci : on fait de notre mieux et on s'en sort. De jour en jour, ça va mieux et ça continue.

On est là, on s'aime et on essaie de ne pas vous juger, faites-en autant. Ça fait tellement du bien !

Ce texte est inspiré de John Kinnear un Cool Dad, ask your dad blog 2015 «Dear Crappy Parent».

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