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Seul PKP peut sauver la culture québécoise

Avant de devenir premier ministre d'une province sans testicules (culturellement parlant), PKP a le pouvoir de changer la donne, de fertiliser notre terreau culturel. Après, il sera trop tard. Une fois ses actions de Québecor vendues, même au pouvoir, cette fenêtre d'opportunité se refermera à tout jamais devant lui.
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Seul Pierre Karl Péladeau a le pouvoir de sauver notre culture québécoise. Ça peut paraître prétentieux, voire même présomptueux comme déclaration. Certes, mais c'est pourtant le cas. Avec la révolution actuelle des modèles de consommation provoquée par l'Internet, le droit d'auteur devient difficilement applicable. Et à l'heure où seuls les fournisseurs d'accès Internet (les FAI) font de mirobolants profits grâce à la culture qui circule dans leurs fils, via leurs antennes, la possibilité de forcer ces derniers à contribuer à la production culturelle tient de l'ordre de la réglementation canadienne des télécommunications (CRTC).

Les deux testicules de notre culture... entre les mains de Harper

Le droit d'auteur et la télécommunication donc, tous deux de juridiction fédérale, sont les «testicules de notre culture québécoise». C'est par eux qu'on peut permettre à notre culture de se reproduire, de se perpétuer. Or, sans la possibilité d'exercer son droit d'auteur pour monnayer son oeuvre, sans la possibilité de pouvoir prélever une part des revenus des télécoms qui transportent notre culture, cette dernière est condamnée au bénévolat, voire à sa disparition, à mesure des coupures sur ses subventions.

Alors pourquoi seul Pierre Karl Péladeau est celui qui pourrait changer la donne? Parce qu'il détient la majorité des actions de Québecor, société mère du fournisseur d'accès Internet Videotron.

Désormais au rang d'intouchables

L'ADISQ, la SOCAN et plusieurs autres acteurs de l'industrie de la musique ont bien essayé dans les dernières années de convaincre les instances fédérales et judiciaires de leur donner force de loi pour obtenir leur juste part sur les revenus des FAI. Mais en vain. L'histoire nous a appris que le gouvernement Harper a plutôt choisi de placer les FAI au rang des Intouchables, protégés par la nouvelle loi sur le droit d'auteur (Loi C-11, art 31.1, adoptée en juin 2012).

Or, dans un contexte où il est maintenant impossible de «forcer» les FAI à partager leur butin avec les créateurs de 0 et de 1 qui circulent dans leurs tuyaux, les mesures incitatives s'avèrent fatalement les seules issues.

La solution serait donc selon moi «marketing», plus que légale.

Création d'un fonds d'investissement en culture numérique

À mon avis, le premier FAI canadien qui parviendrait à créer - volontairement - un fonds d'investissement en culture numérique et qui y contribuerait, à raison d'un léger pourcentage de ses profits, aurait un net avantage marketing sur ses compétiteurs. Ce FAI verrait tous les artistes l'applaudir, anglos comme francos, sans exception. Les consommateurs soucieux de contribuer à l'écriture et la réécriture de leur culture auraient maintenant une alternative. Au fait, n'avez-vous jamais entendu un amateur de musique dire «j'achète encore des disques pour encourager l'artiste» ? Et si le fait de devenir un abonné de Vidéotron permettait au consommateur de poser tacitement un geste pour contribuer à la culture qu'il consomme?

En comparaison au budget publicitaire actuel de Videotron, une telle stratégie enclencherait un puissant bouche-à-oreille à travers le Canada, voire dans le monde entier. Cette vague de communication sociale surpasserait largement l'effet des campagnes publicitaires traditionnelles du télécom. Xavier Niel, fondateur Free.fr, avait bien compris ce concept en se positionnant comme le «Robin des bois des télécoms»; lorsqu'une décision d'affaires défend ce qui est juste et bon pour le consommateur et va dans le sens de la poursuite du bien commun, elle n'a d'autre conséquence que de faire du chemin. Aujourd'hui, Free.fr est le télécom en France dont la croissance fulgurante est la plus attrayante pour les investisseurs.

Or, si PKP enclenchait le pas dans une telle direction, il ferait gagner sans équivoque des parts de marché à Québecor. À prix équivalent, l'idée d'être avec Bell, Telus ou Rogers deviendrait obsolète pour le consommateur conscient, parce qu'elle serait culturellement et socialement inutile. Le monde change et PKP peut devenir un chef de fil mondial en terme de modèle d'affaire durable entre les télécoms et les créateurs de contenus.

PKP, potentiel homme historique

Bien sûr, pour en arriver à contrôler notre droit d'auteur et nos télécommunications, la souveraineté serait la clé. Par contre, et vous le savez, les sondages démontrent que les jeunes ne s'intéressent plus à cette option. Or, à l'époque où le gouvernement Harper détient le pouvoir de vie ou de mort sur notre culture, seul PKP peut mettre en place un système de ristourne en faveur de l'industrie culturelle qui le fait si bien vivre.

Avant de devenir premier ministre d'une province sans testicules (culturellement parlant), PKP a le pouvoir de changer la donne, de fertiliser notre terreau culturel. Après, il sera trop tard. Une fois ses actions de Québecor vendues, même au pouvoir, cette fenêtre d'opportunité se refermera à tout jamais devant lui.

Je lance donc le défi à Pierre Karl Péladeau de sortir la tête haute de son règne chez Québecor; de poser un geste pour l'avancement du bien commun et la sauvegarde de notre culture. S'il emboîte le pas, les autres FAI du Québec, du Canada et, à terme, de la planète n'auront guère le choix de suivre la tendance. Et notre culture créatrice de 0 et de 1 qui nécessite «toujours plus de vitesse de téléchargement» aurait son juste retour d'ascenseur. Et, comme René Lévesque, Pierre Karl Péladeau passerait à l'histoire pour une bonne raison... celle d'avoir commis un geste visionnaire !

Sinon quoi?

Alain Brunet, journaliste, publiait en 2003 un livre intitulé «Le Disque ne tourne pas rond». Dans son ouvrage que je paraphrase ici, l'auteur ultra visionnaire lançait la prédiction que les maisons de disques appartiendraient tôt ou tard aux télécoms, puisqu'ils sont les seuls à réellement faire des sous dans la chaîne de consommation des contenus numériques d'aujourd'hui.

À mon avis, ce scénario - plus que jamais réaliste aujourd'hui - ne serait pas souhaitable. Cela créerait une telle concentration de l'offre que ça nuirait invariablement à la diversité culturelle, au grand détriment de notre culture québécoise, bien minoritaire à l'échelle de l'Amérique du Nord.

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