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Le 24 juillet dernier, Xavier Ménard, un jeune entrepreneur diffusait une vidéo sur YouTube pour dénoncer le rejet par le Registraire des entreprises du Québec du nom de son entreprise,, jugé trop anglophone. À bien y penser, cette décision relève davantage d'une interprétation trop étroite de la Charte que d'une non-conformité à la Loi 101.
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Le 24 juillet dernier, Xavier Ménard, un jeune entrepreneur de 17 ans spécialisé en design infographique, diffusait une vidéo sur YouTube pour dénoncer le rejet du nom de son entreprise, Wellarc, par le Registraire des entreprises du Québec. Les fonctionnaires du REQ ont justifié leur décision sous prétexte que le nom de Wellarc a une consonance trop anglophone, en vertu des dispositions de la Charte de la langue française sur la langue du commerce et des affaires. Pourtant, à bien y penser, cette décision relève davantage d'une interprétation trop étroite de la Charte par des fonctionnaires gouvernementaux que d'une non-conformité à la Loi 101.

Ce que la Charte dit

Sur le site du REQ, on peut lire que le nom d'une entreprise doit être en français, en vertu des dispositions de la Charte de la langue française. En effet, les articles 63 et 64 de la Charte stipulent que «le nom d'une entreprise doit être en langue française», et que «un nom de langue française est nécessaire à l'obtention de la personnalité juridique». Cependant, l'article 67 stipule également que peuvent figurer dans le nom d'une entreprise, comme spécifiques, «les patronymes et les toponymes, les expressions formées de la combinaison artificielle de lettres, de syllabes ou de chiffres ou les expressions tirées d'autres langues». Par conséquent, selon les dispositions de la Charte, le nom d'une entreprise peut contenir des mots tirés d'une autre langue, dont l'anglais. Alors, où trace-t-on la limite entre le français et les autres langues dans le nom d'une entreprise, dans ce cas-là?

Wellarc, un nom trop anglophone?

Dire que le nom de Wellarc a une consonance trop anglophone relève selon moi d'une interprétation arbitraire et discriminatoire. Il s'agit avant tout d'un mot fabriqué à partir des mots «well» et «arc». Pour sa part, «arc» est un mot aussi bien anglophone que francophone. C'est plutôt «well» qui sonne anglophone, me direz-vous. Eh bien, pas forcément! En effet, il existe dans la langue française le mot «Wellingtonia», synonyme de «Séquoia». «Well» peut alors être interprété comme une abriévation de «Wellingtonia».

Autre scénario. «Well» peut également renvoyer à un nom de famille, auquel cas le nom de Wellarc demeure également conforme à la Loi 101, en tant que mot composé d'un patronyme et du mot français «arc». Mais voilà le noeud du problème: ce n'est pas clair! Qu'est-ce qu'un nom en langue française, après tout? Selon Marie-Pierre Blier, responsable des relations avec les médias au REQ, le nom de Design Graphique Wellare aurait été conforme à la Charte. Ah bon? Et pourquoi ce nom et pas celui de Wellarc ou encore Design Graphique Wellarc? Sommes-nous rendus au point où nous devons rallonger les noms d'entreprise pour souligner qu'ils sont bel et bien francophones? Qui plus est, le REQ n'a jamais émis plus de détails quant aux raisons pour lesquelles il considère le nom de Wellarc trop anglophone.

La confusion dans la clarté favorise l'arbitraire

Le noeud du problème tient au fait que les dispositions sur la langue du commerce et des affaires de la Charte de la langue française sont loin d'être claires. Jusqu'à quel point peut-on tolérer la présence de patronymes, de toponymes, d'expressions tirées d'une autre langue, de combinaisons artificielles de lettres et de syllabes? À partir de quand considère-t-on qu'un nom d'entreprise n'est pas en langue française? Tant et aussi longtemps que nous ne mettrons pas un peu plus de clarté dans cette confusion, les bureaucrates continueront de profiter d'un pouvoir arbitraire en matière de validation de nom d'entreprises.

Chaque année, le REQ rejette 9% des demandes de nom d'entreprises pour des raisons de non-conformité à la Charte de la langue française. Selon Me Danielle Gingras, spécialiste en droit commercial, on assiste depuis quelques années à un resserrement de plus en plus important des règles entourant la validation de nom d'entreprises. Il est grand temps que le REQ et le gouvernement du Québec fournissent des explications à ce resserrement. Et l'idéal serait qu'ils comprennent que ce resserrement administratif et cette confusion dans la prétendue clarté des dispositions de la Loi 101 favorisent avant tout des décisions arbitraires des fonctionnaires et n'encouragent nullement l'entrepreneuriat, la création d'emplois et le bien commun.

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