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Sécurité aérienne: gardons la tête froide

Cette succession de catastrophes aériennes de plus en plus rapprochées peut donner l'impression qu'une malédiction se serait abattue sur le transport aérien civil dans le cadre de désordres mondiaux dont plus personne n'aurait le contrôle. Qu'en est-il exactement?
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La disparition du vol d'Air Algérie AH 5017, qui reliait Ouagadougou à Alger, marque d'autant plus les esprits qu'elle survient après les deux catastrophes récentes qui ont frappé la compagnie Malaysian Airlines dans le Pacifique sud puis dans l'est de l'Ukraine, et l'accident mercredi à Taïwan d'un accident d'ATR de la compagnie TransAsia ayant fait 42 morts dont deux étudiantes françaises. Cette succession d'événements de plus en plus rapprochés peut ainsi donner l'impression qu'une malédiction se serait abattue sur le transport aérien civil dans le cadre de désordres mondiaux dont plus personne n'aurait le contrôle ou d'un relâchement des disciplines nécessaires à la sécurité des vols.

Qu'en est-il exactement?

Le transport aérien civil est et reste une activité très sûre

Rappelons d'abord que l'année 2013 a été la plus sûre de l'histoire du transport aérien mondial, puisque le nombre de décès par accident d'avions de transport aérien civil n'a été que de 265, soit 200 de moins qu'en 2012 (470 victimes). La moyenne des victimes s'élevait à 720 pendant les dix années précédentes.

265 morts, dira-t-on, c'est 265 de trop, ce qui est vrai dans l'idéal. Mais il faut avoir en tête que près de 3 milliards de personnes volent maintenant chaque année. C'est donc moins d'un passager sur 10 millions qui décède lors d'une catastrophe aérienne.

Par rapport à ces chiffres, dont s'enorgueillissent à juste titre les autorités compétentes (Organisation de l'Aviation civile internationale, Agence européenne de sécurité aérienne, et, en France, la Direction de la sécurité de l'aviation civile), l'année 2014 marque à l'évidence un recul. Mais ce recul tient vraisemblablement de ce que l'on appelle la loi des séries, c'est-à-dire, au fond, du hasard de la concomitance d'événements malheureux, et non d'une tendance de fond qui serait en train de s'inverser.

Les accidents récents sont très différents les uns des autres

Les catastrophes dont a été victime Malaysian Airlines sont toutes les deux très atypiques et n'entrent pas dans le cadre d'analyse habituel des catastrophes aériennes. Ce sont, au sens propre, des événements extraordinaires dont il n'existe pas de modèle répétitif. Celui du Pacifique Sud reste le plus mystérieux. Le second fait l'objet d'hypothèses sur un très plausible tir de missile sol-air, mais la mise en évidence objective du déroulement des faits est rendue difficile par la situation politique de l'Est de l'Ukraine.

L'accident d'hier à Taïwan entre a priori, en revanche, dans le schéma connu des atterrissages manqués par mauvaises conditions météorologiques. Les experts en charge de l'analyse devraient dans ce cas, pour simplifier l'exposé, avoir à déterminer si l'équipage a commis une imprudence ou si une défaillance de l'avion s'est produite.

La disparition de l'avion d'Air Algérie a pour le moment une cause inconnue et l'on peut, en l'absence d'information, imaginer aussi bien un accident qu'un acte terroriste. Nous n'avons pour notre part, au moment où nous écrivons ces lignes, aucune information permettant d'avancer une hypothèse plutôt qu'une autre.

Il est vrai qu'il existe des compagnies moins sûres que les autres, mais elles sont identifiées et leur accès aux aéroports européens est encadré

L'aviation civile distingue la sécurité et la sûreté: la sécurité est la prévention des accidents aéronautiques dus à des défaillances matérielles ou humaines involontaires, tandis que la sûreté est la prévention des actes de malveillance volontaires, dont le terrorisme.

On sait, à ce titre, que les contrôles de sûreté dans les aéroports et en vol ont été considérablement renforcés après les attentats du 11-Septembre 2001.

La séquence actuelle amènera peut-être les autorités gouvernementales à revoir ou compléter l'articulation entre les deux notions. Nous ne doutons pas que cela sera fait avec professionnalisme si c'est nécessaire.

Nous ne pouvons traiter à chaud de ce vaste sujet et nous contenterons d'apporter une dernière précision relative à la seule sécurité:

Le grand public sait plus ou moins clairement qu'il existe une liste noire européenne de compagnies aériennes réputées dangereuses. Cette liste existe. Elle est officielle, publique et tenue à jour par la Commission européenne. Elle comporte deux catégories: des compagnies dont l'accès à l'Union européenne est interdit, et des compagnies dont l'accès à l'Union européenne est subordonné à certaines conditions. Dans l'ensemble, ces compagnies émanent d'États dont les autorités de contrôle sont elles-mêmes défaillantes (notamment, mais non exclusivement dans certains États africains) malgré les efforts de qualification technique pour lesquels la communauté internationale s'efforce de les assister par un programme mondial spécifique dans le cadre de l'Organisation de l'Aviation civile européenne. En tout état de cause, toutes les compagnies européennes respectent la réglementation édictée et supervisée par l'Agence européenne de Sécurité aérienne.

François Collet est expert en économie du transport aérien et des aéroports. Il est directeur du cabinet www.collet-consulting.com

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