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Neknomination: pour ou contre, et dans quelle mesure?

Quoi qu'il en soit, laest un phénomène préoccupant qui doit être pris au sérieux. Tout le monde doit faire de la prévention pour que les dérapages soient évités. Car on n'arrête pas un phénomène viral de la sorte...
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Le phénomène de Neknomination, variante du binge drinking et énième jeu à boire 2.0, se répand de manière virale sur les réseaux sociaux. Qu'est-ce que c'est au juste? Lorsque l'on est «neknominé», il s'agit de se filmer en buvant cul-sec de l'alcool (une bière généralement) puis de partager ensuite ladite vidéo sur les Internets pour finalement «neknominer» trois amis qui auront 24h pour faire de même.

Pourquoi être contre?

- Parce que les gens ne se limitent pas à une seule bière, malheureusement.

- Parce que l'un va avoir trafiqué sa bouteille de vodka (traduire: remplacer par de l'eau) pour épater la galerie, alors que l'autre va réellement boire une grande quantité de vodka à ses risques et péril.

- Parce que le besoin d'être populaire est parfois si fort qu'il fait oublier que la consommation abusive d'alcool est dangereuse. Que l'alcool peut entraîner des comas éthyliques, voire la mort.

- Parce que la Neknomination a déjà fait 5 morts à travers le monde. Dernièrement, Bradley Eames, âgé de 20 ans, a avalé deux pintes de gin mélangées avec des sachets de thé en moins de deux minutes. Il est décédé quatre jours après.

- Parce qu'en cas de mort d'un ami, vous pouvez être soumis à des poursuites judiciaires jusqu'à l'homicide involontaire. En effet, n'est-ce pas vous qui l'avez fortement incité à faire sa «neknomination»?

- Parce que les gens s'obligent parfois à le faire entre eux: «Si tu choques, tu dois nous payer une caisse de 24!». Quand on est taggé dans un video «neknomination» et qu'on a 24h pour «honorer» sa «neknomination», on peut ressentir, surtout chez les plus jeunes ou vulnérables, une pernicieuse pression sociale. Le pédiatre Georges Picherot affirme que «tout le problème est l'attirance de jeunes en difficultés par l'auto-destruction». On ne veut pas décevoir, on veut montrer, que tsé, on est capable. Puis, de par la possibilité de devenir une vedette instantanée des médias sociaux, de par la force du nombre, on est renforcé dans ce comportement débile.

- Parce que toutes les situations les plus idiotes dans lesquelles on peut se mettre en scène en buvant - toutes! - ont déjà été réalisées. Les historiens du futur ont tout le matériel qu'il leur faut pour montrer l'étendue de notre grandeur, on vous assure...

- Parce qu'il y a d'autres moyens d'impressionner ses amis: remporter un concours de slam, être savoureux lors d'un match d'impro, avoir A+ dans un examen difficile, marquer un 3 points au basket.

On peut comprendre que lors de sa «neknomination», certains se sentent «exister». On se met en scène pour se faire connaître, se faire reconnaître, pour exister dans l'immensité de la Toile, ne serait-ce qu'un instant. Puis, faire partie d'un groupe, d'une vague, d'un phénomène, c'est grisant. Mais tout ceci n'est ni grandiose, ni durable. Entre le «printemps érable» et le phénomène Neknomination, il y a un monde.

- Parce que la tendance large de Jackass, c'est so 2000.

- Parce que la Neknomination serait née en Australie: veut-on réellement remplacer nos images mentales de joyeux kangourous et des films Mad Max par ces conneries de «neknominations»?

- Parce qu'en voulant faire comme les autres, on oublie que l'alcool rapidement absorbé n'a pas la même incidence selon le poids, le sexe et la quantité d'alcool en question. Rajoutons qu'un état de santé physique et psychologique précaire, conjugué au fait de boire à jeun participe, au risque.

- Parce que cela donne un bien piètre modèle de jeune adulte à tous les enfants et adolescents qui «regardent» par la fenêtre de leurs ordinateurs.

- Parce que les jeunes réalisent leur «neknomination» souvent seul. En cas de pépin, personne n'est là pour intervenir et apporter de l'aide. Il n'y a qu'un téléphone intelligent passif qui filmait la scène jusque-là.

- Parce que bien qu'il soit normal de transgresser des limites - voir des interdits - à un certain âge, on est pas obligé de se mettre en danger pour si peu.

Pourquoi être pour? Dans la mesure où...

- On n'arrête pas un phénomène viral de la sorte. Cependant, on peut le contrecarrer par des mouvements internes et externes plus positifs. L'interdire ne changera rien. Pire, l'interdit créera une désirabilité encore plus forte chez certains.

- On peut détourner sa «neknomination» pour le mieux. La mouvance Smart nomination, soit Nomination intelligente, en est un exemple. Il s'agit de se filmer entrain de faire quelque chose de positif plutôt que de se laisser aller à la simple beuverie.

Ainsi, un jeune homme français a acheté des hamburgers et des bouteilles d'eau pour des sans-abris. Il s'était inspiré d'un Sud-Africain qui, au lieu de boire de l'alcool, a offert de la nourriture à des gens dans le besoin. Une jeune femme du Costa-Rica a, quant à elle, couper la poire en deux. Elle a d'abord ramassé des déchets sur une plage, puis s'est offert une bière en récompense.

- C'est un excellent moment pour les parents de parler de consommation avec leur(s) jeune(s). Entamer le dialogue et ainsi aborder de délicates questions entourant les pairs, la consommation responsable, la pression sociale, etc.

- Cela permet à certains de laisser aller leur créativité dans la conception d'une situation particulièrement cocasse ou ingénieuse. De faire valoir des talents de réalisateur-monteur par exemple. De détourner partiellement le mouvement par le biais d'une conscientisation originale et d'un humour faisant mouche.

- Il y a moyen de faire sa «neknomination» sans se mettre en danger. Ainsi, «si vous voulez impressionner (...) de la bonne façon, mettez l'emphase sur le contexte, la manière dont vous allez boire, le contenant, l'endroit, etc. Mettez l'emphase sur la qualité et non la quantité. », écrivait Mathieu Bonnin - lui-même phénomène web- en réaction aux deux premières victimes découlant de la vague «neknomination».

- Le psychothérapeute Michel Lejoyeux rappelait dernièrement: «Nous, adultes, ne sommes pas légitimes pour critiquer Neknomination si nous le faisons une cigarette ou un verre d'alcool à la main. Nous avons tous des postures proaddictives sous couvert de mode. (...) Nous ne serons crédibles pour combattre l'ivresse des jeunes que si les autres ivresses ne sont pas l'objet d'une complaisance hypocrite et que nous cessons d'ériger la consommation d'alcool comme une obligation collective. »

- On a encore un libre arbitre. L'être humain est un animal raisonnable n'est pas?

Ainsi, on est bien en mesure de ne pas crouler sous la pression de l'amour-propre (l'amour de soi qu'on va chercher dans le regard des autres) et de dire «non». Être contre la Neknomination à tout prix, n'est-ce pas nier notre pouvoir d'agir? N'est-ce pas aussi se voiler la face à l'égard d'une réalité qui déborde largement l'Internet?

- On ne peut pas mourir en buvant un seul verre d'alcool (la grande majorité s'en tienne à boire une consommation cul-sec).

- En terme de phénomène viral sur l'Internet, on vu bien pire jusqu'à maintenant.

Alors, pour ou contre? Quoi qu'il en soit, la Neknomination est un phénomène préoccupant qui doit être pris au sérieux. Tout le monde doit faire de la prévention pour que les dérapages soient évités. La société, le milieu familial et scolaire, les différents intervenants gravitant autour des jeunes, entre les pairs, tout le monde doit intervenir.

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