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Cachez cette retraite que je ne saurais voir

J'ai cependant remarqué, depuis quelques années, un très curieux phénomène avec ce problème sur les régimes de retraite et bien que je sois biaisé, je ne suis pas aveugle non plus. Je vois des détracteurs connus des syndicats qui n'ont pas l'air de se rendre compte qu'ils encensent parfois indirectement les syndicats dans une ligne pour mordre la main privée qui les nourrit dans la phrase suivante.
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Pour être honnête avec les gens qui vont lire ce billet, je suis hyper biaisé avec l'histoire des régimes de retraite de la fonction publique. Mon opinion était faite avant même que j'aie pris conscience du problème et qu'il devienne un enjeu public. Je ne suis pas si borné que ça, mais disons simplement que j'ai une très forte sympathie naturelle envers les syndicats et la fonction publique en général. Même si les déceptions n'en finissent plus avec la commission Charbonneau, depuis les deux dernières années, ayant sérieusement ombragé la réputation de ces deux entités pour très longtemps.

J'ai cependant remarqué, depuis quelques années, un très curieux phénomène avec ce problème sur les régimes de retraite et bien que je sois biaisé, je ne suis pas aveugle non plus. Je vois des détracteurs connus des syndicats qui n'ont pas l'air de se rendre compte qu'ils encensent parfois indirectement les syndicats dans une ligne pour mordre la main privée qui les nourrit dans la phrase suivante. Un peu comme si j'essayais de vous déconseiller de manger du McDonald's parce que le Big Mac est trop délicieux et que je suis fou de rage de manger des radis qui ne poussent pas assez vite pour ma faim!

Le dernier que j'ai pris en flagrant délit de tendresse syndicale est Jérôme Landry dans la version papier du Journal de Montréal, édition du lundi 16 juin 2014. Le texte s'intitule Quand les chefs syndicaux blasphèment où il annonce un peu prématurément, dans la première partie, la défaite imminente du côté syndicale à cause du niveau de langage utilisé dernièrement. Il est vrai que monsieur Landry s'y connait en blasphèmes puisque Radio X est en première place pour l'utilisation de jurons et son émission radiophonique est en deuxième place, derrière sa consœur de Montréal, pour avoir réussi à dire le plus grand nombre de fois le mot « sacrament » en onde, à l'heure du petit déjeuner. Ensuite, il se fait le porte-parole des contribuables et termine son texte avec ceci :

« Et nous, les contribuables, vous croyez qu'on n'a pas le goût de sacrer quand on voit les conditions de travail de vos membres, messieurs les chefs syndicaux? Nous aussi on trouve ça « dégeulasse » de devoir renflouer le déficit de vos caisses de retraite en plus d'avoir à essayer de ramasser un peu d'argent pour nos vieux jours à nous. On a aussi l'impression de se « faire fourrer » pour reprendre votre niveau de langage. Payer en double pour les autres, c'est ça se faire fourrer pour vrai. À ce que je sache, le projet de loi du ministre Moreau vous garantit encore une belle caisse de retraite, ce qui n'est pas le cas de bien des travailleurs du secteur privé. Et ce n'est surtout pas en faisant la grève ou en organisant des « coups d'éclat » cette semaine que la population se mettra soudainement à sympathiser avec votre cause. Regardez bien vos calendriers messieurs les chefs syndicaux. On est plus en 1974. Le party est bel et bien fini. »

Tenons pour acquis qu'il a raison, que les villes ont été trop généreuses avec les régimes de retraite. N'est-ce pas un aveu de l'efficacité des syndicats à négocier des conditions de travail tellement bonnes qu'il faudrait parfois les revoir à la baisse pour les équilibrer? Là où ça devient carrément burlesque, c'est qu'il écrit, dans le journal d'un multimillionnaire déguisé en député de Saint-Jérôme, que les pauvres gens qui travaillent dans le privé n'ont pas cette chance de pouvoir compter sur un bon fonds de pension en majorité.

Dois-je aussi rappeler qu'à Radio X, le fondateur Patrice Demers et l'actuel propriétaire Reynald Brière sont devenus multimillionnaires grâce aux médias et à des gens comme Jérôme Landry? Puisqu'il doit s'inclure dans le « nous » des contribuables travaillant au privé et qui peinent à ramasser un peu d'argent de côté pour leurs vieux jours, monsieur Landry avoue donc ne pas récolter sa juste part, malgré qu'il ait deux emplois pour un multimillionnaire et un millionnaire qui sont comme par hasards, des détracteurs syndicaux. Il écrit dans le quotidien le plus vendu au Québec et son émission matinale à la radio est même en première place à Québec. Quelqu'un se fait effectivement fourrer, on est d'accord là-dessus. La question de savoir comment me parait plutôt subjective par contre.

Monsieur Landry devrait peut-être chercher d'autres facteurs que les déficits des caisses de retraite des fonctionnaires municipaux pour expliquer que ses vieux jours sont financièrement en moins bonne condition que les travailleurs syndiqués. On n'est plus en 1820 et la théorie du ruissellement des riches vers tous les autres est déficiente depuis longtemps, mais le mythe est encore en bonne santé. Être productif dans le secteur privé n'est plus suffisant pour s'assurer un salaire, des conditions de travail et une retraite décente. J'allais écrire que c'est le problème qu'on n'ose pas voir derrière l'autre des déficits, que c'est le privé qui n'est pas assez généreux, mais non, on l'écrit fièrement dans le Journal comme un fait accompli. Tout le monde le sait et l'accepte trop facilement. On fait quoi avec ce problème? Je suis prêt à écouter tous les côtés, mais je me méfie de ceux qui veulent en niveler d'autres par le bas pour justifier les failles de leurs propres idéologies politiques et croyances économiques.

En terminant, même si des conditions de travail trop généreuses avaient été négociées et qu'on doit maintenant payer en double ou faire des restructurations, nous avons tous notre part de responsabilité dans cette histoire. Quand des petits politiciens municipaux se font élire et réélire sans réelle opposition, avec des taux de participation frôlant les 40%, ne vous étonnez jamais de trouver des petits cadeaux cachés sous le tapis quelques années ou décennies plus tard. L'indifférence possède également son prix à payer, parfois en double.

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