Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Avez-vous déjà pensé que vous étiez lesbienne?

Maintenant que je fais un blogue à propos du fait d'avoir été élevée par deux mamans, un ami m'a récemment demandé: "Comme c'est le mode de vie que tu as toujours connu, tu t'es déjà demandé si tu étais lesbienne?". Evidemment, je dois répondre à cette question en racontant une anecdote.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Attention: ce billet contient du langage sexuellement explicite.

Maintenant que je fais un blogue à propos du fait d'avoir été élevée par deux mamans, un ami m'a récemment demandé: "Comme c'est le mode de vie que tu as toujours connu, tu t'es déjà demandé si tu étais lesbienne?".

Evidemment, je dois répondre à cette question en racontant une anecdote.

Au début du printemps de mon année de licence, j'étais toujours vierge et très occupée à le rester. J'avais beau chercher, je ne voyais comment je pouvais séduire et coucher avec un homme tout en répétant pour des spectacles et en faisant semblant d'étudier mes cours. Ma virginité persistante était avant tout le résultat d'un problème d'emploi du temps.

Tous mes amis masculins étaient homosexuels et venaient du Sud, se débattaient eux-mêmes avec leur propres crises sexuelles: ils n'étaient donc pas disponibles. Le seul mec par qui j'étais vraiment attirée, et qui était clairement hétérosexuel, m'avait confié qu'il partait dans le Mississipi faire la surprise à sa petite amie de la demander en mariage. Bref, c'était la loose totale.

Alors que j'étais en train de répéter une superbe pièce contemporaine sur la violence domestique dans une banlieue de Rhode Island (accessoirement, la seule fois où l'on m'a vraiment fait confiance pour un rôle), je suis devenue amie avec la merveilleuse Lucie. C'était l'une des seules jeunes lesbiennes que j'ai connues.

Parce que j'avais grandi en traînant avec mes mamans lesbiennes et leurs amies lesbiennes, j'ai atteint la majorité en pensant que toutes les lesbiennes avaient dans les cinquante ans, qu'elles voyageaient beaucoup à Cuba, qu'elles chantaient du folk évoquant des mouvements travaillistes et qu'elles portaient toutes des chaussures visiblement très confortables.

Rencontrer Lucy m'a permis de répondre à la question:

"Les vieilles lesbiennes ont-elles été jeunes un jour?".

Lucy ne portait pas de maquillage, à part un fabuleux trait de rouge à lèvres, parfois rouge, parfois couleur moka. Elle portait des bottes de cuir à petits talons et des vêtements aux belles matières, alors que tout le monde se présentait au cours de théâtre en bas de pyjama. Elle avait un peu de ventre, mais cela passait parce qu'elle s'en foutait royalement.

Et elle était drôle -je veux dire, vraiment drôle- et terriblement douée, à part qu'elle était incapable d'apprendre son texte ni d'arriver à l'heure où que ce soit. Elle était inconstante, ingérable, expérimentée, bref, géniale.

Un jour, lors d'une pause pendant une répétition, on était sorties s'asseoir et je lui ai dit des trucs que je retranscrirais comme suit:

"- Tu es la seule lesbienne de moins de 50 ans que je connaisse.

- Vraiment? a-t-elle demandé.

- Ouais. Je suis hétéro. Enfin, je me sens hétéro, mais je suis toujours vierge. Si je te disais d'entrée de jeu que j'étais hétéro, tu coucherais avec moi, juste comme ça?".

A ce moment-là, elle s'est tournée vers moi, faisant franchir une nouvelle étape à notre amitié que je ne peux expliquer qu'ainsi:

"Imaginez Vénus et Séréna Williams quittant une réunion familiale, comme par exemple, la fête d'anniversaire de leur oncle, pour aller se battre l'une contre l'autre à l'US Open quelques minutes plus tard. Imaginez le moment où elles se retrouvent sur le cours et qu'elles s'observent de chaque côté du filet, quand elles ne sont désormais plus de la même famille mais définitivement deux adversaires.

C'est la façon dont Lucy m'a regardée. Et voici ce qu'elle a répondu à ma proposition pathétiquement foireuse: "Tu veux coucher avec une femme? Tu veux sentir une chatte dans ta bouche? C'est chaud, ça sent, c'est collant et c'est crade, et ça dégouline entre tes lèvres, et tu adores ça, parce que c'est ça que ça veut dire faire l'amour à une femme, ok?".

"Ok", j'ai répondu tout en secouant la tête pour montrer que non, je ne voulais pas ces trucs-là.

En mai, le spectacle sur la violence conjugale et les examens enfin derrière moi, je m'étais trouvé un petit ami. Ce qui est drôle, c'est que cette relation avait commencé avec la même question. Je lui avais dit que j'avais 20 ans et que j'en avais assez d'être vierge, et je lui avais demandé s'il serait d'accord pour au moins coucher avec moi. Il a ergoté pendant trois minutes tendues, puis a accepté ma proposition. Nous sommes plus ou moins restés ensemble pendant un an et demi.

Quant à Lucy, je n'éprouve que de la joie à son égard et envers son honnêteté. J'ai parlé franchement et elle m'a répondu de la même manière.

Non, je ne pense pas que je sois lesbienne et je ne l'ai jamais été. Bi-curieuse? Sûrement. J'aimerais aussi aller sur la lune, mais je ne suis pas astronaute et je suis heureuse là où je suis.

VOIR AUSSI

La première marche des lesbiennes à Montréal

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.