Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Sauver l'Union européenne

Choisir entre les langues européennes, en dehors de l'anglais, celle qui représente le mieux, la civilisation européenne, n'est pas chose facile.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

L'Union européenne avait été conçue, en 1930, par Aristide Briand et par le général de Gaulle, après la Deuxième Guerre mondiale, en tant qu'union politique entre États qui étaient liés par une civilisation judéo-chrétienne commune. Dans «Les chênes qu'on abat» (Gallimard, 1971), André Malraux rapporta les paroles suivantes du Général: «L'Europe, vous le savez comme moi, sera un accord entre les États, ou rien. Donc, rien. Nous sommes les derniers Européens de l'Europe, qui fut la Chrétienté».

Les technocrates de Bruxelles sacrifièrent donc, au profit de l'économie, ce qui faisait le ciment de l'Europe: sa civilisation. Et sa civilisation était fondée, depuis la Grèce et Rome, sur la religion chrétienne et la langue grecque.

Voulant voir trop grand, les technocrates de Bruxelles imposèrent à Valéry Giscard d'Estaing de rédiger le texte d'une Constitution européenne, en 2002-2003, de nature exclusivement économique, couvrant tous les pays d'Europe, y compris la Turquie, dans lequel les éléments de son unité civilisationnelle étaient absents: pas un mot pour la chrétienté et la langue de civilisation. Cette Constitution fut rejetée par les référendums français et néerlandais, en 2005.

Soixante ans après le traité de Rome, constitutif de l'Union européenne, le 24 mars 2017, les 27 pays de l'Europe, sans le Royaume-Uni, se réunit au Vatican, sous la houlette du pape François, aux cris indignés du président de la Turquie, Erdoğan, qui traita l'Union européenne, à laquelle il était exclu, de croisade chrétienne contre l'Islam. Au même moment, et malgré la présence à la cérémonie vaticane du premier ministre Alexis Tsipras, la Grèce, mère de la civilisation européenne, croulait dans un chaos économique sans précédent. Mais il semblait être trop tard. Le mal était fait. Sans gouvernail civilisationnel, le navire européen s'échouait sur des bancs de sable.

Le 28 juin 2016, le «Monde des Blogs», publia un appel, intitulé «Europe: le grec comme langue officielle de l' Union européenne», de trois intellectuels français, Pierre Berringer éditeur, Yves Canier professeur de lettres classiques et Catherine Teuler, professeure d'anglais. Ces trois collègues reprenaient ma proposition de faire du grec la langue commune de l'Europe, proposition que j'avais exposée sans relâche, dans mes écrits, mes conférences et mon enseignement, depuis des dizaines d'années, proposition fondée sur la problématique suivante:

Les institutions européennes ne peuvent pas continuer à fonctionner avec la foule de dizaines de langues officielles, le résultat étant que l'anglais, en tant que lingua franca mondiale de commerce, s'impose en fait, de plus en plus, comme la langue véhiculaire commune de l'Union européenne.

Choisir entre les langues européennes, en dehors de l'anglais, celle qui représente le mieux, la civilisation européenne, n'est pas chose facile.

Choisir entre les langues européennes, en dehors de l'anglais, celle qui représente le mieux, la civilisation européenne, n'est pas chose facile. Commençons par les langues des principaux pays européens: le français, l'allemand, l'italien, l'espagnol. Aucun de ces grands pays n'accepterait de sacrifier sa langue au profit des autres.

Passons, aux langues des petits pays européens, comme le néerlandais, le danois, le portugais et bien d'autres. Aucun des pays de l'Union n'accepterait que l'une de ces langues puisse représenter à elle seule l'ensemble de la civilisation européenne.

Il reste donc les deux langues classiques qui ont formé, pendant des millénaires, le sort de l'Europe: le latin et le grec. La première, a été parlée par l'ensemble de l'Europe occidentale pendant des siècles, comme langue vivante et encore, de nos jours, elle demeure la langue du Vatican. Néanmoins, depuis le XVIIIe siècle le latin est devenu progressivement une langue morte et il est fort difficile de la rendre à nouveau vivante pour l'ensemble de l'Europe.

Et le grec? Pendant deux millénaires le grec fut la langue de l'ensemble de l'Europe, pas seulement de l'Empire byzantin, mais aussi, depuis le XVIe siècle de l'Europe occidentale et encore, au XXe siècle, les étudiants des universités d'Oxford et de Cambridge, communiquaient entre eux en grec. D'autre part, contrairement au latin, le grec demeure aujourd'hui une langue vivante.

Peut-on prétendre qu'adopter le grec comme langue commune d'Europe avantagerait indûment un de ses états en particulier, la Grèce? Non, puisqu'il s'agit d'un petit pays qui ne pourrait pas profiter de l'avantage de la langue pour dominer l'Europe.

Néanmoins, si on adoptait le grec, comme langue commune d'Europe, quel grec choisirait-on? Le grec ancien, le grec de la Bible - le Nouveau Testament étant écrit directement en grec, et même l'Ancien Testament fut traduit, deux siècles avant Jésus-Christ, par les savants juifs, les septante, de l'hébreu en grec? Ou bien le grec moderne? Le plus sage serait, à notre avis, de choisir le grec des Évangiles, toujours vivant, très proche du grec moderne, d'autant plus que ce grec est lié à la civilisation judéo-chrétienne commune de l'Europe.

Pour que l'adoption du grec, comme langue vivante commune d'Europe, soit pratiquement possible, il faudrait rendre le grec obligatoire, de l'école primaire à l'Université, à côté de la langue maternelle de chaque pays de l'Union européenne.

Même aujourd'hui, il n'est jamais trop tard. La réunion commune au Vatican, en présence du pape, le 24 mars 2017 et le fait qui s'impose désormais à l'Europe d'exclure pratiquement la Turquie musulmane, en proie à l'intégrisme islamique, rend plus facile l'adoption du judéo-christianisme comme fondement civilisationnel de l'Union européenne. D'autre part, le retrait du Royaume-Uni diminue la part d'influence de l'anglais, rendant l'adoption du grec plus facile. Mais pour ce faire, il faudrait une volonté commune de sortir des arcanes de l'économisme pour le politique et le culturel.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.