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Ce n'est pas l'élite, c'est la rue qui demande le départ de Dilma Rousseff

Dimanche, 13 mars 2016. Une date qui restera dans l'histoire, le jour de la plus grande manifestation qu'a connue le Brésil.
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Dimanche, 13 mars 2016. Une date qui restera dans l'histoire, le jour de la plus grande manifestation qu'a connue le Brésil.

Ce sont environ 3,5 millions de personnes, selon les forces de l'ordre, qui sont descendues dans les rues de plus de 200 villes où ont eu lieu des manifestations contre le gouvernement (selon les organisateurs, plus de 6,4 millions de personnes ont participé au mouvement). Dans la capitale de l'État de Sao Paulo, 1,4 million ont protesté contre la corruption, plus de monde que pour la légendaire manifestation des élections directes, selon l'institut Datafolha.

Les échos de la rue sont les suivants: les Brésiliens en ont assez de la corruption et applaudissent l'opération Lava Jato qui a dévoilé le scandale des sommes détournées de l'agence nationale du pétrole (Petrobras) qui ont enrichi politiques et partis. Le juge Sérgio Moro, responsable de la condamnation des puissants chefs d'entreprises et prestataires du gouvernement, a été salué par la foule. Le Morobloco (jeu de mots sur le nom du juge et sur le Monobloco, un grand groupe de carnaval) fait vibrer même les plus sceptiques, qui croient maintenant à la fin de l'impunité des tout-puissants du gouvernement.

Il n'y a pas que Dilma. Son parti, le PT (Parti des Travailleurs), et sa plus grande étoile, Luiz Inacio Lula da Silva, sont les principales cibles des critiques et des démonstrations de mépris vis-à-vis d'un gouvernement qui perd sa légitimité. La réponse de Lula à sa garde à vue, demandant aux militants de son parti de le défendre, n'a fait qu'enflammer encore plus les mécontents.

Le ras-le-bol général vis-à-vis de la classe politique n'épargne personne. Même pas les représentants les plus emblématiques de l'opposition, qui sont rejetés. Aécio Neves et Geraldo Alckmin, par exemple, du parti PSDB (centre modéré) ont été hués à Sao Paulo. Eduardo Cunha, le président de la Chambre des Députés qui avait menti sur ses comptes en Suisse, où il encaissait ses pots de vin, a été également pris à partie.

Cette mobilisation n'est pas seulement celle de l'élite, celle des «coxinhas» (terme péjoratif pour désigner les membres de la classe moyenne supérieure) ou celle des riches qui détestent les pauvres (éternelle rhétorique du discours, déjà bien rodé, de Lula et du très à gauche PT). Ce mouvement vient de la rue, et y participent les travailleurs affectés par l'inflation et les intérêts élevés, ainsi que les chômeurs, victimes de la plus grande récession qu'ait connue le Brésil en 25 ans. Il y a aussi les petits entrepreneurs, qui vivent un climat plus que défavorable et peu propice pour investir et se développer.

Aucun signe ne laisse entrevoir une amélioration de la situation à court terme vu la politique économique peu cohérente de Dilma et son incapacité politique pour faire passer des mesures d'ajustement budgétaire au Congrès.

Telle est la réalité de ceux qui sont descendus dans la rue ce dimanche: ce sont des gens issus de toutes les classes sociales et des tous âges. L'effet politique de cette manifestation géante est l'affaiblissement de plus en plus frappant du gouvernement Dilma. Trahie de tous côtés, même par son plus important allié, le PMDB, la présidente peut voir dans ce 13 mars une cerise sur le gâteau.

À l'époque des manifestations de juin 2013, le gouvernement avait annoncé une série de mesures dont la responsabilité budgétaire, une réforme de la politique, l'embauche de plus de médecins et des améliorations dans les transports publics et dans l'éducation. Le publicitaire de la présidente, Joao Santana, l'avait aidée à composer ce paquet de mesures. Il avait le soutien de l'ancien président Lula. Depuis, Santana a été incarcéré dans les perquisitions de l'opération Lava Jato.

Désormais, la présidente est plus isolée que jamais, sans avoir réalisé une bonne partie de ces mesures, et en étant même accusée de ne pas avoir respecté la loi de responsabilité fiscale. Elle ne peut plus rien offrir à la rue, et voit son cauchemar se matérialiser.

Il ne reste qu'à envisager une dernière stratégie de survie, avec le peu de soutien populaire qu'elle possède encore. Ou enfin, se résigner.

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