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Indonésie: l'unité dans la diversité?

Si l'Indonésie n'arrive pas à mettre un terme aux discriminations, ainsi qu'aux actes de violence commis envers les minorités religieuses, il se pourrait qu'elle devienne la prochaine Yougoslavie. Du moins, certains l'affirment. Malgré l'apparence de radicalisme derrière un tel propos (que je suis loin d'endosser), l'unité indonésienne semble devenir un mythe politique tant au niveau ethnique que religieux.
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Si l'Indonésie n'arrive pas à mettre un terme aux discriminations, ainsi qu'aux actes de violence commis envers les minorités religieuses, il se pourrait qu'elle devienne la prochaine Yougoslavie. Du moins, c'est ce que certains affirment. Malgré l'apparence de radicalisme derrière un tel propos (que je suis loin d'endosser), l'unité indonésienne semble devenir un mythe politique, autant au niveau ethnique que religieux.

Le 28 février dernier, l'organisation de surveillance des droits humains Human Rights Watch (HRW) a publié un rapport dénonçant l'abus des droits humains envers les minorités religieuses en Indonésie. Selon Brad Adams, directeur de HRW Asie, il est primordial que le président Yudhoyono prenne la responsabilité de renforcer la mise en application des lois nationales, en plus d'insister à ce que toute attaque violente engendre des poursuites judiciaires. En bref, c'est aux politiciens de rappeler à la population l'importance de combattre l'intolérance religieuse.

Bien que les politiciens aient leur part de responsabilité dans ce dossier, j'ai peine à croire qu'ils soient la solution clé afin d'enrayer toute discrimination religieuse et ethnique. D'abord, la loi appelée communément blasphemy law, constitue en soi un problème majeur. A priori, cette loi reconnaît six religions officielles, ayant donc pour but d'empêcher quelconque religion de prendre le dessus sur une autre. Plutôt bien, n'est-ce pas? Par contre, cette loi permet également aux majorités religieuses régionales d'avoir une influence considérable sur les minorités religieuses. Autrement dit, des communautés chrétiennes à Java peuvent subir des discriminations similaires aux communautés musulmanes de Sulawesi. Drôle de solution pour favoriser la tolérance et l'égalité, non?

Et pourtant, la devise indonésienne demeure: l'unité dans la diversité. Effectivement, à Jakarta on retrouve une mosquée et une cathédrale qui se voisinent paisiblement. Un des seuls endroits au monde, paraît-il. Par ailleurs, le temple de Borobudur sur l'île de Java est officiellement reconnu comme étant un temple bouddhiste, malgré ses nombreux reliefs hindouistes. Certes, il est possible d'être témoins d'un heureux mélange des religions; malheureusement, ce n'est pas toujours le cas.

L'Institut Setara, qui a comme mandat d'évaluer la liberté de religion en Indonésie, offre un portrait différent, celui d'un pays de plus en plus perturbé par des incidents de violence religieuse: en 2012, 264 incidents d'intolérance ont été répertoriés, comparativement à 244 en 2011, et 135 en 2007. Une hausse assez importante pour ce pays émergent de l'Asie du Sud-est ayant une société civile établie, une économie grandissante et une communauté médiatique indépendante.

Si vous souhaitez lire quelques témoignages, je vous invite à jetez un coup d'oeil au rapport de HRW.

Ceci dit, une question s'impose sans relâche: quoi faire? Quand vient le temps de combattre la discrimination et l'abus de droits humains, plusieurs questions émergent quant au rôle de l'État. Dans un pays où la corruption sévit de façon endémique, comme c'est le cas en Indonésie, peut-on réellement se fier aux dirigeants? Considérant la main mise de Java sur la politique nationale - aucun autre groupe ethnique a accédé à la présidence -, ainsi que les tensions et inégalités ethniques, est-ce possible d'avoir un gouvernement qui puisse diriger le pays dans l'unité, sans avoir les mains liées?

Pendant que le rapport de HRW déplore l'inaction du président indonésien face aux discriminations à l'égard des minorités religieuses, la 22e rencontre du Conseil des Droits Humains des Nations Unies a ouvert ses portes à Genève. C'est d'ailleurs lors de cette rencontre que le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, en a profité pour rappeler la devise des ONG luttant pour le respect des droits humains : «Far too often, people who need their rights most know their rights least.»

Somme toute, l'Indonésie devra faire face à cet enjeu, qui s'amplifie année après année. Certains pensent que si elle n'arrive pas à prendre les mesures nécessaires afin de contrôler et de préserver sa diversité, elle risque de se démanteler en tant que nation, engendrant un conflit similaire à l'ancienne Yougoslavie. Bien que ces propos ne soient guère fondés, une certitude demeure: le gouvernement indonésien devra tôt ou tard faire face à l'inefficacité des infrastructures judiciaires. Et il devra agir dans les plus brefs délais.

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