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Comment détourner l'attention en quatre syllabes? Ou la face cachée des crédits d'impôt...

Les quatre syllabes « crédit d'impôt » ont le pouvoir de détourner l'attention, à un tel point qu'elles pourraient permettre à un éléphant de se faufiler au milieu du salon sans créer d'émoi. Certains groupes l'ont compris et l'ont habilement exploité. Les leaders étudiants ont ainsi défoncé une porte qui avait été entrouverte par le gouvernement.
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Alors que la session parlementaire se termine pour laisser place à une saison estivale typiquement propice aux longues réflexions, je propose un retour sur un sujet qui a fait couler beaucoup d'encre dans les dernières semaines. Mais si le débat public a permis de le traiter en surface, certains détails sont malheureusement restés dans l'ombre...

La majorité des êtres humains ont la même réaction devant la théorie de la relativité et les formalités liées à l'impôt : ils laissent les professionnels s'y attaquer.

Les quatre syllabes « crédit d'impôt » ont donc le pouvoir de détourner l'attention, à un tel point qu'elles pourraient permettre à un éléphant de se faufiler au milieu du salon sans créer d'émoi.

Certains groupes l'ont compris et l'ont habilement exploité. Leur nouvelle proposition pour financer le gel des droits de scolarité? Réduire substantiellement le crédit d'impôt pour droits de scolarité et frais d'examens. Après tout, quel meilleur moyen de s'assurer que personne n'ait envie de fouiller les détails d'une suggestion que de l'orchestrer autour de manœuvres fiscales obscures?

Adoptant la philosophie du « tout ou rien », les leaders étudiants ont défoncé une porte qui avait été entrouverte par le gouvernement. Ils l'ont fait en s'efforçant de souligner la générosité de leur démarche : renoncer à un avantage fiscal en échange d'une politique de droits de scolarité artificiellement bas et fixes.

Certes, leur proposition correspond à se priver, en tout ou en partie, d'une aide financière gouvernementale qu'ils toucheront au moment de payer leurs impôts ou de faire leur entrée sur le marché du travail. « Cette aide arrive au mauvais moment. C'est lors de la rentrée scolaire que les étudiants ont besoin d'être épaulés pour acquitter leurs frais de scolarité », diront certains. Solution : troquer le crédit d'impôt pour une annulation de la hausse des droits de scolarité. Une mesure à coût nul, qui permet à l'argent d'arriver chez les étudiants au bon moment. C'est tellement simple qu'on se demande pourquoi personne n'y a pensé plus tôt!

Mais voilà, tout n'est pas si simple. Voyons-y de plus près.

Le crédit d'impôt pour frais de scolarité ou d'examen permet à chaque Québécois de soustraire de ses revenus imposables toute dépense associée à l'inscription à une formation postsecondaire reconnue, tous les frais d'examen visant à obtenir une certification ou un droit de pratique professionnelle ainsi que toute dépense permettant d'adhérer ou de maintenir son adhésion à un ordre ou à un regroupement professionnel. Il permet donc d'aider une population beaucoup plus vaste que les seuls étudiants universitaires.

Ceux qui décident de suivre une formation reconnue par l'École nationale des pompiers du Québec ou offerte par l'École nationale de police du Québec, pour lesquelles la facture atteint entre 7500$ et 18 000$ en bénéficient. Les élèves de l'École de danse du Québec, qui défraient 2500$ pour chacune des années de leur formation (sans compter les droits d'inscription) en bénéficient. Les étudiants de l'École nationale de l'humour, dont les études entraînent des frais de 10 000$ à 14 000$, ceux inscrits à une formation en sonorisation et en conception sonore à laquelle sont associés des coûts de près de 13 000$, les futurs avocats inscrits à l'école du Barreau dont la facture tournera autour de 4000$, pour ne nommer que ceux-là, reçoivent également une aide financière du gouvernement grâce au crédit d'impôt.

« L'effort » des associations étudiantes qui sont prêtes à sacrifier le crédit d'impôt pour frais de scolarité et d'examen pour geler les droits de scolarité universitaires devrait donc également être supporté par ces étudiants qui ont opté pour une formation professionnelle ou technique. On leur demanderait ironiquement d'y consentir afin de permettre aux frais de scolarité de leurs homologues universitaires de ne pas augmenter, mais sans qu'eux ne reçoivent rien en retour. Un rapport coût-bénéfice peu alléchant, même pour un altruiste... Beaucoup moins alléchant, d'ailleurs, que l'offre faite par le gouvernement de diminuer le crédit d'impôt de 20% à 16,5% afin de financer des mesures d'aide financière aux études (AFE). Contrairement au gel des droits de scolarité, l'AFE bénéficie à toutes les catégories d'étudiants de niveau postsecondaire.

Ce débat sur les droits de scolarité universitaires, qui a occupé tant d'espace dans notre quotidien ce printemps, met en lumière une tendance lourde : les discussions portant sur l'accessibilité aux études demeurent centrées autour du sempiternel débat « gel-dégel » qui ne cible que les universitaires. Symptôme d'une triste dévalorisation sociale des formations qui n'impliquent aucun passage par l'université? À l'opposé, les avenues de réflexion que représentent la bonification de l'Aide financière aux études, le remboursement proportionnel au revenu des prêts accordés à tous les étudiants postsecondaires, la publicisation des mesures d'aide déjà disponibles (parmi lesquelles le fameux crédit d'impôt pour frais de scolarité et d'examen et le Régime enregistré d'épargne-études) permettent d'inclure tous les étudiants : ceux du secteur professionnel, ceux du secteur technique, et ceux qui font le choix de l'université.

À l'heure où le Québec fait face à l'important défi de la persévérance scolaire, la valorisation de tous les types de cheminement est pourtant on ne peut plus nécessaire.

La suite dans un prochain billet...

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