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«Velours» de Katherine Levac: à la hauteur des attentes

L'humoriste s’avère largement à la hauteur des espoirs qu’on entretenait envers elle dans Velours.
Paméla Lajeunesse

Des 100 représentations de Velours prévues au calendrier de Katherine Levac partout en province en 2018, 50% affichent déjà complet. Plus d'une cinquantaine de supplémentaires sont déjà annoncées, et d'autres doivent l'être prochainement. Le spectacle a reçu, en décembre, une certification «Or» de l'ADISQ soulignant la vente de 50 000 billets, et ce, avant même le début officiel de la tournée.

Au total, à ce jour, plus de 75 000 billets de Velours ont trouvé preneurs. Et on rappelle que toute cette étincelante énumération concerne un premier one woman show en carrière, carrière toute jeune d'à peine cinq ans, Levac ayant gradué de l'École nationale de l'humour en 2013.

Si toutes ces belles distinctions, et les attentes qui viennent avec, la titillent ou la stressent le moindrement, Katherine Levac n'en a rien montré lors de la première montréalaise de Velours, au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, mercredi.

Dans une salle souvent ingrate pour les humoristes parce que trop spacieuse et impersonnelle, la Franco-Ontarienne a géré comme une pro, comme si elle avait fait ça toute sa vie. Débit parfait, aucune hésitation, aucun trou de mémoire souvent typique de cette étape majeure qu'est la rentrée devant les médias: on savait depuis longtemps à la regarder aller sur diverses tribunes qu'une étoile était née, mais mercredi, l'artiste a confirmé les qualités qu'on lui prêtait.

Si on avait ne serait-ce qu'un minime doute sur son charisme et son talent naturel pour les planches, l'expression orale ou la dégaine comique, elle nous a fait taire pour de bon. Katherine Levac s'avère largement à la hauteur des espoirs qu'on entretenait envers elle dans Velours.

Première montréalaise de Velours de Katherine Levac

Tout et rien

Velours, c'est ce à quoi Katherine Levac nous a habitués dans toutes ses apparitions de stand-up depuis qu'on la connaît: un ton pince-sans-rire avec juste ce qu'il faut d'ironie pour qu'on la juge à la fois irrévérencieuse et adorable, et ô combien hilarante, et des observations qui nous touchent tous et toutes un peu, et encore davantage si on revendique sa tranche d'âge. Pensez Vitamines Pierrafeu, Romano Fafard, Filles de Caleb, sirop aux bananes, Baby Spice, Canal D, et autres perles du genre, et vous aurez un juste aperçu.

Les textes de Velours – signés Katherine Levac, Thomas Levac et David Beaucage, soutenus par monsieur Cœur a ses raisons et Like-Moi en personne, Marc Brunet, dans une sobre mise en scène de Sonia Cordeau - contiennent une abondance de contenu, une matière solide. On ne perd pas de temps, on ne s'étire pas inutilement. Le rythme est efficace, les transitions entre les thèmes sont fluides. Et, cesdits thèmes, ils ne sont pas carrés, coulés dans le béton, prédéfinis: ils sont un peu tout et rien à la fois.

Vous espérez, en allant voir Katherine Levac, renouer sur scène avec des personnages de SNL Québec ou de Like-Moi? Soyez avisés, ce n'est pas dans cette branche que la rassembleuse jeune femme s'aventure dans son premier solo. Elle fait allusion à la Paidge Beaulieu qui l'a rendue célèbre dans SNL, en racontant d'où est provenue l'inspiration pour créer ce rigolo alter ego, mais c'est tout. Elle pousse la chansonnette à un certain moment, pour rendre un hommage savoureux «aux madames de 64 ans», d'une voix approximative, mais c'est très correct: même que le parterre adore.

Le propos est conventionnel, mais unique. Elle utilise des fibres déjà exploitées ailleurs, mais le fait à sa façon. On ne verse pas, ici, dans l'anecdote pure et dure, mais plutôt dans des mini-échantillons de sa vie qui, tournés dans ses mots, captivent et dérident instantanément.

On en avait entendu des bribes ici et là en d'autres lieux – à Juste pour rire, par exemple -, mais rien pour crier à la bête récupération.

Paméla Lajeunesse

On ne s'esclaffe pas toujours à s'en décrocher les mâchoires dans Velours, mais on ne peut que saluer l'intelligence du discours et sa pertinence dans le présent contexte social – son segment sur la génération Y, «qui se crée des obstacles» - se démarque, d'ailleurs. Velours, c'est léger, mais ce n'est absolument pas insignifiant.

En partant, sa portion sur les jeux télévisés est puissante. La Guerre des clans? « On vient d'apprendre que c'est pas renouvelé... C'est absolument accablant». Des Squelettes dans le placard? «Je ne veux pas chier sur le soleil de personne, mais quand on va aux Squelettes dans le placard, on ne comprend pas le jeu.»

Elle décrie le fait d'avoir une «vie plate» (autrement dit, de n'avoir jamais connu d'épreuve majeure), critique les premières communions («Arrêtez de dire que c'est une fête, il n'y a pas de pinata, personne boit de Crush à l'orange...»), parle de son amour de l'école («de l'assiduité») et revient non seulement sur sa propre scolarité dans une école de rang, mais aussi sur son expérience de crash d'un cours de médecine à l'université, un excellent moment de la prestation.

Elle peut décocher une flèche à cet item insignifiant qu'est le cure-pipe, tout en remarquant que toutes les dames bossant dans des Caisses Populaires s'appellent Lyne, se moquer du besoin pressant d'un kombucha comme de son obsession pour les bains. «Se tenir debout? Arke, je suis pas une pauvre!», balance-t-elle quant à son aversion de la douche. Elle décrète qu'Aladin est un itinérant, adresse un clin d'œil à son ancienne stature de «toutoune» (alerte au non politiquement correct, ici), affirme son besoin de connaître et d'aimer avant de passer au lit avec quelqu'un et remet en question le trop grand nombre de choix qui s'offre à ses semblables presque trentenaires: partir au Japon ou faire son propre pain? Son constat à cet égard est drastique.

Bref, comme on détaillait plus haut, le terrain de jeu de Katherine Levac est varié, mais il se tient habilement et ne déçoit pas.

David Beaucage en apéro

L'ancien ami de cœur de Katherine Levac, David Beaucage, assure la première partie de Velours. Lui aussi apôtre du stand-up, il vogue dans toutes sortes d'eaux de son ton calme, passant de Titanic à l'expression «se fier aux apparences». Le pauvre garçon ne l'a pas eue facile, mercredi, alors qu'une fille assise dans l'assistance ne cessait de gueuler son nom, mais il s'en est bien sorti.

Katherine Levac sera de nouveau de passage à Montréal avec Velours le 26 avril et les 20 et 21 octobre, à l'Olympia. Pour connaître toutes les dates de sa tournée, on visite son site officiel.

Tapis rouge: première montréalaise de Katherine Levac

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