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Montréal : pénurie en vue dans le transport adapté de la STM

On craint une fuite de chauffeurs vers la compagnie Uber parce que la STM ne les paie pas suffisamment.
Mohamed Abd El Ghany / Reuters

Alors que la Société de transport de Montréal (STM) s'apprête à annoncer un nombre record de déplacements en transport adapté, un transporteur sonne l'alarme. Yung Cuong craint une fuite de chauffeurs vers la compagnie Uber parce que la STM ne les paie pas suffisamment.

Environ 87% du transport adapté offert par la STM est effectué par des entreprises privées, souvent des compagnies de taxi. Selon M. Cuong, celles-ci peinent à trouver des chauffeurs pour répondre aux besoins de la société de transport parce que celle-ci ne paie pas l'entièreté du temps travaillé.

«La STM a fait analyse. Il y a une perte de 20% du nombre de chauffeurs disponibles», lance M. Cuong.

Il n'a pas été possible de confirmer ce chiffre auprès du transporteur public. Une porte-parole indique toutefois que Montréal compte 1500 chauffeurs en transport adapté, ce qui répondrait à la demande prévue en 2018.

Transporter dans ses bras, gratuitement

L'entreprise de M. Cuong, Taxi Para-Adapté, est l'une des rares qui se concentre uniquement sur le transport adapté. Selon l'entrepreneur, il a perdu entre 15 et 20 chauffeurs, qui se sont tournés vers le réseau de la santé ou vers la compagnie Uber.

Le problème, c'est la prise en charge des clients à la porte. Depuis quelques années, les chauffeurs doivent les prendre en charge du portique jusqu'à leur voiture, et ensuite jusqu'à la porte d'entrée de leur destination. Cette prise en charge n'est pas payée selon M. Cuong: le contrat avec la STM stipulerait que le la société paie uniquement le montant inscrit sur le taximètre et que celui-ci ne peut être démarré qu'une fois le client bouclé. Une somme additionnelle de 1,75$ serait prévue si le taxi est une camionnette adaptée.

«Ça veut dire que je sors de la voiture chaque fois, que je transporte parfois le client dans mes bras, que je l'installe dans la voiture et que je boucle la ceinture. Pendant ce temps, le taximètre ne roule pas. C'est 5 à 6 minutes de travail non rémunéré chaque fois, et encore la même chose quand on dépose le client», illustre M. Cuong.

Plusieurs chauffeurs préfèrent donc travailler pour le réseau de la santé, qui débourserait 20$ par déplacement pour ce genre de prise en charge. Pire, plusieurs délaissent entièrement le transport adapté pour travailler pour Uber et éviter les tracas administratifs. Ils déplorent notamment les inspections imposées par la STM alors que le Bureau du taxi a déjà des ses inspecteurs.

«Comme chauffeur, si j'ai le bureau de taxi sur mon dos, j'ai la compagnie de taxi sur mon dos et en plus j'ai la STM sur mon dos... Et bien hasta la vista baby! Je m'en vais chez Uber», lance-t-il.

Contactée par le HuffPost Québec, la STM répond que les contrats conclus avec les transporteurs sont privés et qu'elle ne fera donc aucun commentaire.

«Esclavage des temps modernes»

Par ailleurs, la STM négocie présentement avec les représentants de l'industrie pour octroyer un nouveau contrat pour le transport adapté. Ce contrat est évalué entre 45 M$ et 50 M$.

Ce montant servira à couvrir environ 87% des déplacements en transport adapté. Les chauffeurs de minibus employés directement par la STM fournissent les 13% restants.

Or, le budget 2018 déposé par le transporteur montréalais prévoit presque 33,5 M$ en frais d'exploitation pour le transport adapté. C'est donc une facture de 64,4$ par transport en moyenne, contre 14,4$ pour les déplacements faits par le privé dans le plus cher des scénarios.

M. Cuong, qui souligne que les chauffeurs de taxi sont souvent des immigrants, estime que la STM pratique de «l'esclavage des temps modernes».

L'entrepreneur estime que la STM pourrait financer une hausse de la rémunération des chauffeurs privés en effectuant moins de déplacements en minibus. Elle sauverait ainsi de l'argent, même si elle accorde le manque à gagner de 12 M$ réclamé par M. Cuong.

Selon la STM, le 33,5 M$ comprend les frais de gestion des centres d'appels, de facturation des taxis et de planification du transport adapté, entre autres choses. Une réduction du nombre de transport en minibus n'entraînerait donc pas nécessairement une grande réduction des sommes totales déboursées. Également, certains clients nécessitent l'espace disponible dans un minibus.

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