À quelques mois de l'arrivée des militaires canadiens en Lettonie, les Forces armées n'anticipent pas d'affrontements physiques. C'est plutôt une possible campagne de désinformation russe et qui serait notamment diffusée sur les réseaux sociaux, qui inquiète les Forces.
Un texte de Raphaël Bouvier-Auclair
Peu après l'arrivée en Lituanie de soldats allemands le mois dernier, des rumeurs ont commencé à circuler.
Des militaires auraient violé une jeune lituanienne. L'information, envoyée entre autres au président du Parlement lituanien, s'est avérée non fondée et les autorités ont ouvert une enquête sur ses origines.
C'est ce genre de situation que les Forces canadiennes se préparent à affronter.
Comme l'Allemagne, le Canada s'apprête à déployer des militaires dans les pays baltes, voisins de la Russie, d'ici quelques mois. En juin, 450 militaires canadiens doivent arriver près de Riga en Lettonie, où ils dirigeront un bataillon de l'OTAN qui aura pour but de « renforcer la défense » des États baltes et de « dissuader » la Russie.
«On a des informations selon lesquelles il pourrait y avoir des efforts pour discréditer notre présence et également diviser les alliés.»
— Lieutenant-colonel Richard Perreault
Stratégie en place
Pendant le déploiement, quatre militaires basés en Lettonie auront pour mission de contrer les « fausses nouvelles » et les rumeurs. Ils collaboreront avec des collègues au pays et des représentants de l'OTAN. Le nombre de militaires spécialisés sur le terrain pourrait augmenter par moment.
Pour répondre à ce genre de menace, les Forces ont développé un plan de communication stratégique. Quelques exemples de scénarios, comme des rumeurs entourant des inconduites sexuelles ou des accidents de la route ont été évoqués, mais vu la multitude de possibilités, les Forces se gardent une certaine latitude.
Il faudra donc vérifier les allégations, et si elles s'avèrent non fondées les démentir rapidement en coordonnant une réponse avec les alliés. Le tout dans un environnement où l’information se transmet rapidement, notamment par le biais des réseaux sociaux.
Pas un phénomène nouveau
Tant les Forces canadiennes que l’OTAN affirment que ce n’est pas la première fois qu’ils ont du travail à accomplir sur le front de l’information. Mais à l’OTAN, on convient que c’est désormais « plus intense ».
Selon le titulaire de la chaire d’études ukrainiennes à l’Université d’Ottawa, Dominique Arel, les rumeurs et les fausses informations sont des armes qui ont beaucoup été utilisées et développées pendant la guerre entre l’Ukraine et les rebelles prorusses.
Dominique Arel estime qu’une campagne de désinformation pourrait se montrer efficace contre la présence canadienne en Lettonie, pays où près du tiers de la population est d’origine russe ou parle russe.
«Il y a un terreau un peu plus fertile pour ce type de technique cherchant à miner la crédibilité.»
— Dominique Arel, titulaire de la chaire d'études ukrainiennes à l'Université d'Ottawa
Possible public cible? Les Lettons, mais aussi les Canadiens
De passage au Canada la semaine dernière, le ministre letton des Affaires étrangères, Edgars Rinkevics, a affirmé qu'il était confiant que la population de son pays saurait faire la part des choses. Mais il ajoute que ce genre d'opération « ne doit pas être exclu ».
«Cela pourrait aller dans l’autre sens. Une campagne d’information pourrait avoir un impact sur l’opinion publique et sur le gouvernement au Canada.»
— Edgars Rinkevics, ministre des Affaires étrangères de la Lettonie
La Russie dénonce la mission
L’Ambassade de Russie au Canada estime que la décision des pays de l’OTAN de rassembler des troupes non loin de la frontière russe « n’aide en rien le renforcement de la sécurité en Europe ».
Le porte-parole de l’Ambassade Kirill Kalinin évoque un gaspillage d’argent et de ressources et ajoute qu’il faudrait plutôt joindre les efforts pour combattre le terrorisme international.
Voir aussi: