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Agression sexuelle: plus de dénonciations, un organisme peine à y arriver

Agression sexuelle: plus de dénonciations, un organisme peine à y arriver
Laurence Houde-Roy

Alors que les appels à la dénonciation de cas d’agressions sexuelles et les signalements des victimes se succèdent depuis un an, l’organisme La Traversée, qui offre des services gratuits de psychothérapie aux victimes, peine à combler les besoins grandissants.

Établi en Montérégie, l’organisme à but non lucratif, qui aide femmes, enfants et adolescents victimes d’agression sexuelle, lance aujourd’hui un appel au gouvernement, mais aussi aux entreprises privées, pour les aider dans leur recherche de fonds.

«Est-ce le phénomène de médiatisation de ces [cas d’agressions sexuelles] qui fait que les victimes sont plus tentées d’aller chercher de l’aide?, a avancé le directeur général de La Traversée, Pierre Ménard, jeudi en conférence. Quoi qu’il en soit, il est clair qu’il y a une croissance du nombre d’appels de victimes à notre bureau au cours de la dernière année. Et nous ne sommes clairement pas en mesure de répondre à la demande et les délais d’attente ne font qu’augmenter.»

Aujourd’hui, plus de 50 dossiers de femmes sont en attente dans les bureaux de l’organisme, et 30 dossiers d’enfants et adolescents. La liste d’attente est de 8 mois pour les femmes – et tends même à augmenter à 10 mois – et de 6 mois pour les enfants. Une situation que le directeur qualifie d’«insoutenable».

«Si on encourage la dénonciation, il faut être là pour les victimes, a insisté la porte-parole de l’organisme, l’animatrice Marie-Claude Barette. En dénonçant, on a une étape de franchie, mais on n’est pas guérie.»

Pour offrir un délai d’attente plus «raisonnable», le directeur souhaite réduire de moitié le temps d’attente pour les femmes, soit à 4 mois, et réduire à un mois le temps d’attente pour les enfants.

Mais pour atteindre ces objectifs, l’organisme doit obtenir au moins 500 000$ supplémentaires, afin d’embaucher de nouveaux thérapeutes (ils en ont actuellement 6). Et ça, c’est sans compter l’augmentation du nombre d’appels de victimes.

Marie-Karina Dimitri, une jeune femme qui a elle-même été victime d’agression sexuelle durant son enfance et qui a eu recours aux services de La Traversée, a témoigné jeudi matin en conférence de presse de l’importance de réduire les délais d’attente pour les victimes. Elle qui n’a pas pu obtenir le soutien et la confiance de ses parents après avoir dénoncé son agresseur, elle a tenté plusieurs fois de mettre fin à ses jours.

«Quand j’ai appelé à La Traversée, on m’a indiqué qu’il y avait un délai de 5 à 6 mois, s’est-elle souvenue. J’ai attendu. Mais à un moment, je n’étais plus capable. J’ai rappelé et ils m’ont prise tout de suite. C’est la première fois de ma vie qu’on m’a crue. Ils m’ont redonné le contrôle de ma vie.»

Bien que La Traversée reçoit déjà une subvention du ministère de la Santé, via le programme d’aide aux organismes communautaires, celle-ci représente 60% de leur budget annuel de 900 000$, dont la majorité des fonds est destinée à la masse salariale. Le reste provient du privé.

En octobre, le ministère de la Santé a annoncé sa stratégie gouvernementale pour prévenir et contrer les violences sexuelles. «Mais nous sommes toujours en attente pour connaître les retombées financières de cette stratégie, a spécifié Pierre Ménard. À première vue, l’argent semble être destiné à des actions pour le passage des victimes dans le système judiciaire, de l’information pour les victimes et la formation des intervenants. Mais nous ne savons pas combien on obtiendrait pour nos services de psychothérapie», s’est inquiété M.Ménard.

En chiffres :

  • En 2015-2016, les psychothérapeutes de La Traversée ont rencontré plus d’une centaine de femmes et une trentaine d’enfants et adolescents.
  • Plusieurs enfants sont en attente depuis plus de 6 mois, ce qui pourrait compromettre leur développement.
  • En 2014, 950 dossiers d’agressions sexuelles ont été traités par la police en Montérégie. La région la plus touchée après Montréal.
  • Seulement 5 % des agressions est signalé à la police.

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