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Les causes de discorde conjugale en 2015

Les causes de discorde conjugale les plus fréquentes en 2015
anzeletti via Getty Images

Notre société de loisir, où le plaisir, la consommation rapide, l’autogratification et le « je, me, moi » priment sur tout, génère des statistiques très évocatrices quant aux relations de couples en 2015.

Les générations X et Y veulent vivre de façon entière, passionnée, effrénée, essayer le plus de choses possibles, et ont tendance à ne tolérer aucune frustration ni complication. La persistance est loin d’être valorisée, prisée. Voyons voir de plus près.

Mariages et taux de natalité à la baisse, taux de divorce de l’ordre des 50% entre la troisième et conquière année de vie conjugale - comparé à un minime 5% au début du 20e siècle - 30% des couples encore ensemble qui le sont non par bonheur mais par résignation; disons-le d’emblée, être heureux en couple et réussir à faire durer sa relation relève du quasi miracle. Tout, tout, tout joue contre nous. Ou presque. « On oublie que le désir fait aussi parti du plaisir. On est dans une société d’enfants gâtés, la génération Égo.com, comme le dit si bien Marie-France Bazzo. On devient de plus en plus égocentrique. Alors que le couple est là pour nous faire sortir de notre égocentrisme, développer davantage notre altruisme. C’est justement pour çà que d’après nos prospectives, on parlera bientôt d’un mariage sur trois qui se termine en divorce », explique Yvon Dallaire, psychologue, conférencier et auteur d’une vingtaine d’ouvrages consacrés au bonheur conjugal.

Certains problèmes fondamentaux ont toujours existés au sein du couple. L’essentiel des conflits selon les psychologues consultés tournent autour des thèmes suivants :

-l’argent

-l’éducation des enfants

-les relations avec la belle famille

-le partage des tâches ménagères

-séparation entre la vie professionnelle et personnelle

-la sexualité

Ce n’est pas tout. Si jamais vous vous séparez et reformez éventuellement un nouveau couple, deux enjeux majeurs viendront se rajouter à la liste :

-les ex-conjoints

-les enfants de votre nouveau conjoint

Ainsi, selon les statistiques, le taux de réussite du couple reformé est encore plus faible que le premier couple initial…

Ces problèmes ont toujours existés et sont toujours aussi actuels. Cependant, depuis quelques années, les problèmes de couples se sont néanmoins quelque peu… diversifiés. Lorsqu’on sonde les hommes et les femmes, la majorité des sources de conflits tournent autour de la technologie. Cependant, en cabinet, les sources d’angoisse et de frustrations concernent plutôt la sexualité.

Disons-le franchement, conflits et désir sexuel sont diamétralement opposés.

La sexologue, coach et éducatrice sexuelle Vancouvéroise Renée Lanctot explique : « La majorité des femmes qui viennent me consulter viennent me voir pour des problèmes concernant une perte de désir. La plupart du temps, l’appétit sexuel au sein de leur couple est aux antipodes. La femme vient me voir par exemple car son appétit sexuel est moindre que celui de monsieur…

Vous comprendrez que le désir sexuel de madame ne sera pas à son apogée si celle-ci est frustrée de voir son conjoint rentrer ivre après avoir passé une soirée à regarder un match de hockey, ou si elle en a marre que ce dernier ne l’aide pas dans les tâches ménagères ou ne lui donne un coup de main avec les enfants. Malheureusement, lorsqu’il y a des conflits dans une relation, les gens ont tendance à trainer les problèmes au lit et par conséquent, le désir en écope. Ce n’est pas vrai qu’une perte de désir est nécessairement le résultat d’une mauvaise communication ni causé par des chicanes, mais dans beaucoup de cas, ce l’est, en effet… ».

Comme si ce n’était pas déjà assez, sachez qu’une génération de plus en plus égoïste et vaniteuse crée de nouveaux problèmes. Parmi les conflits émergents : les hommes sont de plus en plus agacés par les égoportraits récurrents de leur conjointe.

« Lorsque j'étais en couple, ce que je détestais de ma copine était la manie ou plutôt son obsession de toujours vouloir s’identifier sur ses propres photos Facebook, de faire des tonnes de selfies, d’ensuite publier les photos et de me blâmer en me disant que j'étais trop discret », explique ce jeune professionnel œuvrant dans les relations publiques.

Comme quoi dans certains cas, souhaiter collectionner les « j’aime » par souci d’exister à travers les yeux des autres ou par excès de vanité se fait parfois au détriment de la relation elle-même. Ce qui ressort le plus souvent chez les femmes? Lle comportement de monsieur sur les réseaux sociaux. «De temps à autres je le vois « aimer » la nouvelle photo de profile de telle ou telle femme, ou la photo d’une vague connaissance sur la plage, en bikini… Dans les faits, ce n’est rien de « mal », il ne me trompe pas... Mais au bout du compte, je trouve que c’est un manque de respect et de considération. Si j’en parle, c’est moi qui passe pour la névrosée jalouse », explique Annie, cette mère de famille trentenaire nouvellement en couple.

Mais pour être en couple, encore faut-il que les deux partenaires soient dotés d’une certaine intelligence émotionnelle: «Malheureusement ou heureusement, le couple n’est pas vraiment fait pour nous rendre heureux. Le couple est fait pour nous confronter à nous même, le couple est fait pour nous remettre en question par l’intermédiaire de notre partenaire et ça génère des crises qui peuvent être des crises de croissance ou de décroissance », analyse Yvon Dallaire. «Les couples malheureux ont tous la même histoire : critique, défensive, contre-attaque, mépris et finalement suit la dérobade. Dans 85% des cas, ce sont les hommes qui s’enferment dans le silence ce qui place les femmes dans un état d’insécurité ce qui fait qu’elles paniquent davantage, elles sont de plus en plus insécures donc elles critiquent de plus en plus, monsieur se ferme de plus en plus, etc. Ces couples souvent divorcent pour recommencer ailleurs ce même pattern. »

Psychothérapeute spécialisée en thérapie de couple et Docteure en psycho-éducation, Leila Serrar constate elle aussi que beaucoup de ses patientes viennent consulter pour des troubles sexuels. Le top trois des plaintes chez les femmes? Éjaculation prématurée de leur partenaire, une approche sexuelle trop brutale et trop peu de caresses au lit. Depuis quelque temps, d’ailleurs, Mme Serrar remarque que de plus en plus de femmes viennent la consulter pour des troubles d’éjaculation précoce. Les hommes qui la consultent se plaignent surtout de la fréquence de leurs rapports sexuels, ou viennent chercher de l’aide car leur partenaire n’atteint pas aussi facilement – ou plutôt rapidement – l’orgasme qu’eux. Un cas typique et archi fréquent: monsieur souhaite faire l’amour au réveil tandis que madame doit se lever plus tôt ou est pressée de se rendre au boulot.

La sexologue Renée Lanctot abonde dans ce sens : «Ce qui cause beaucoup de frustrations chez mes patients masculins est lorsqu’ils n’arrivent pas à comprendre leur partenaire. Ils essaient en général de régler le problème… mais lorsqu’ils n’arrivent pas à comprendre ce que l’autre veut, ses besoins, il n’est pas rare de voir l’un des deux partenaires essayer de saboter la relation. Éventuellement les deux partis saboteront la relation car ils en auront ras le bol d’essayer de plaire à leur partenaire et qu’au bout du compte, rien ne change».

La relation commence à être trop compliquée? Soit on se résigne, soit on jette l’éponge et on recommence à zéro – lire : reproduire ailleurs le même type de comportement.

«Il faut qu’il y aille une prise de conscience que le couple n’est pas fait pour rendre heureux et que le couple est un creuset à générer des crises, et que c’est la façon dont on gère les crises qui est le critère pronostic de l’évolution d’un couple. Pas qu’on solutionne les crises mais qu’on les gère. Il ne sert absolument à rien d’essayer de convaincre… Le «j’ai raison, tu as tord » ne mène nulle part, avec çà on frappe un mur! », affirme M. Dallaire.

À l’heure où moi-même j’évolue dans une société dans laquelle j’ai perdu tous mes repères, et où on dispose parfois de l’autre personne dès le premier conflit, comme bon nombre de mes confrères, je me demande non pas si le couple peut durer mais si le véritable amour est envisageable de nos jours, avec nos habitudes de consommation, et valeurs si radicalement différentes de nos grands-parents. Une question me brûle les lèvres, je vais droit au but : « L’amour, en 2015. Comment le définir? ». M. Dallaire prend une pause, réfléchit.

Fort de ses trente années de pratique privée en thérapie conjugale auprès de milliers de couples, il soutient que « l’amour, c’est une décision. Les gens associent malheureusement l’amour à la passion, alors que la passion est une impulsion sur laquelle on exerce très peu de contrôle. C’est une impulsion que la nature a mise en place pour assurer la survie de l’espèce. L’amour, c’est ce qui prendra naissance -ou non!- au fur et à mesure que la passion diminue, c’est-à-dire au fur et à mesure que la lutte pour le pouvoir entre les conjoints se développe et qu’on découvre qui est réellement la personne qu’on désire et qui est l’objet de nos émotions et de nos fantasmes ».

Gérer, pour durer.

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