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«Tribus» à La Licorne: Dans la peau de Billy

«Tribus» à La Licorne: Dans la peau de Billy
PL2 Studio

Bienvenue chez Billy. Enfin, plutôt chez sa mère, son père, sa soeur et son frère. Dans cette famille mise en scène par Frédéric Blanchette dans Tribus à La Licorne jusqu'au 29 novembre, on ne parle pas, on crie. On ne rit pas, on s'esclaffe. On ne pleure pas, on sanglote. Et Billy lui, n'entend pas.

C'est le noeud du problème, vous le comprendrez bien. Comment un être sourd de naissance peut-il grandir de manière saine entouré d'une famille (extrêmement) verbomotrice? C'est ce qu'on tentera de comprendre à partir de ce texte de Nina Raine, traduit par Jean-Simon Traversy. Surtout, comment communiquer quand on lui a refusé l'apprentissage du langage des signes, «puisque ce serait une forme de conformisme»? Pourquoi? Puisque le père (excellent Jacques L'Heureux), un homme bourré de préjugés, confond certainement sentiment d'appartenance et conformisme. Handicap et choix.

La rencontre de Billy (touchant David Laurin) avec Sylvia ( très juste Klervi Thienpont) marquera un tournant dans son existence. Cette jeune fille drôle, vive, sympathique... et en train de devenir sourde saura lui montrer un autre chemin: celui du langage des signes, d'une communauté accueillante même si elle commence à lui peser... Et ça changera tout, au grand dam de la famille. Si ce n'est de la mère (très drôle Monique Spaziani), qui veut le bien de son fils avant tout.

Le frère de Billy (Benoît Drouin-Germain, très efficace), en pleine écriture de thèse sur la signification du langage (voyez l'ironie), s'accroche à son frère comme à une béquille. Idem pour sa soeur (Catherine Chabot, convaincante), chanteuse d'opéra en quête de succès et d'amour. Si Billy est handicapé, petit, facile à gérer, il ne représente pas une menace. Mais s'il se met à pouvoir communiquer, à pouvoir être quelqu'un, qu'arrivera-t-il?

Ce que la famille craint sans trop s'en rendre compte, sûrement. L'émancipation, la liberté, le succès, le bonheur.

Dans la peau de Billy

Sur une scène très bien pensée, placée au milieu de la salle, se déroulent les actions de la maisonnée. Le public, dispersé des deux côtés de la scène centrale, se retrouve donc dans la même position que Billy: jamais vraiment du bon côté pour saisir les expressions des personnages qui tournent parfois le dos (ou font face, c'est selon) aux spectateurs.

Dans un crescendo contrôlé d'une main de maître, on entre de plus en plus dans la peau du malentendant, de l'exclus: que ce soit lors des conversations de Billy avec Sylvia, de plus en plus en langage des signes; des cris du coeur du frère qui bégaie depuis que son frère est parti, etc.

En tout et pour tout, une excellente pièce qui nous met en face, carrément, la réalité des personnes souffrant de surdité. Loin de tenter de décrire, d'expliquer, on plonge plutôt le public dans le bain. On se sent déstabilisé devant les quelques bribes perdues? Imaginez Billy. On ressent de la frustration face aux conversations manquées? Imaginez Billy. On fronce les sourcils devant les demandes d'explications balayées de la main? Imaginez Billy. Imaginez toutes personnes souffrant d'un handicap, à un degré ou à un autre.

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