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Irak: les déplacés yazidis craignent pour leurs proches enlevés par les jihadistes

Irak: les déplacés yazidis craignent pour leurs proches enlevés par les jihadistes

"Seul Dieu peut les sauver maintenant", invoque Dakhil, un Yazidi réfugié dans un camp du nord de l'Irak qui raconte avec d'autres déplacés comment des hommes, des femmes et des enfants ont été enlevés par les jihadistes lors de l'attaque de leurs villages.

Ces enlèvements de masse perpétrés par les combattants de l'Etat islamique (EI) semblent avoir ciblé tous les membres de cette communauté kurdophone et non musulmane qui ont refusé de partir ou n'ont pu fuir devant la menace des extrémistes.

"Mes deux cousins et mes deux oncles ont été enlevés", raconte Jacqueline Ali, une lycéenne de 17 ans qui a trouvé refuge à Bajid Kandala, un camp érigé dans la région autonome du Kurdistan irakien.

Berçant calmement sa petite nièce, elle explique les yeux remplis de larmes: "leurs mères et leurs soeurs ont si peur pour eux qu'elles refusent de manger depuis que nous sommes arrivés dans le camp".

Khodaida Jarda, la soixantaine et un turban blanc sur la tête, énumère la liste des neuf proches dont il n'a plus de nouvelles.

"S'il vous plaît, écrivez leurs noms", demande-t-il la voix tremblante à la journaliste de l'AFP. "Mon fils Haïdar, 26 ans, est parmi les disparus".

Beaucoup de Yazidis livrent des témoignages similaires affirmant que de nombreux hommes ont été exécutés et que les femmes et les enfants sont détenus dans des prisons contrôlées par l'EI dans la province de Ninive, où l'offensive fulgurante des jihadistes a démarré le 9 juin avant de s'étendre.

Vendredi encore, des jihadistes ont tué des dizaines de personnes, en majorité des Yazidis, dans le village de Kocho, dans la province de Ninive, selon un témoin et des responsables qui ont évoqué un "massacre".

Harim Kamal Agha, un haut responsable de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK) dans la province voisine de Dohuk, a précisé que les assaillants avaient conduit les femmes dans des centres de détention.

L'organisation de défense des droits de l'Homme Amnesty international estime à plusieurs milliers le nombre de Yazidis enlevés depuis le 3 août, lorsque l'EI a commencé a attaqué leurs villages situés près de la frontière syrienne.

Les survivants de l'assaut ont alors fui dans les monts Sinjar, assiégés par les jihadistes, avec très peu d'eau et de nourriture.

Quelque 200.000 Irakiens fuyant les jihadistes auraient rejoint le Kurdistan, tandis que les autres demeurent dans les montagnes et que le sort de "milliers" de personnes kidnappées reste inconnu, explique Donatella Rovera, conseillère d'Amnesty International pour les situations de crise.

"Ces victimes sont de tous âges, des bébés jusqu'aux vieillards, et des femmes", explique Mme Rovera précisant que les enlèvements semblent tous avoir eu lieu dans des localités où les habitants ont pris les armes contre les jihadistes.

Si l'EI était déjà connu pour ses atrocités commises en Irak et en Syrie, le groupe n'avait jamais enlevé autant de femmes et d'enfants.

"Il semble qu'ils aient enlevé des familles entières, tous ceux qui ne sont pas parvenus à fuir", assure Mme Rovera.

Selon elle, 3.000 femmes et jeunes filles seraient notamment détenues séparément des hommes dans la ville de Tal Afar, tenue par les insurgés, à l'est des monts Sinjar.

"Nous craignons que les hommes aient été exécutés", ajoute-t-elle, décrivant ces enlèvements comme des "crimes" au regard du droit international.

Un déplacé, Dakhil Atto Solo, témoigne de l'enlèvement de deux de ses proches --Leïla et Wahdan Khalaf-- dans le village de Moujamma Jazira, où les habitants avaient tenté de résister aux jihadistes.

"Bien sûr que nous avons essayé de défendre nos villages, mais ils avaient des armes bien plus puissantes. Nous, tous ce que nous avions, c'était nos kalachnikovs", raconte-t-il.

"Ils ont exécuté 300 hommes, et emmenés les femmes dans leurs prisons".

Des enfants ont pu être sauvés mais pas leur mère, explique encore M. Solo.

"Les femmes étaient dans une maison entourée par l'EI et nous devions fuir. Maintenant, les enfants réclament leur mère à longueur de journée. Ils gémissent: +Maman, maman+. Nous leur disons qu'il n'y a plus de maman".

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