Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Pour les soldats ukrainiens en Russie, une seule hâte: retourner en Ukraine

Pour les soldats ukrainiens en Russie, une seule hâte: retourner en Ukraine

Pavel, un soldat ukrainien au visage balafré et les yeux rouges de fatigue, observe une dizaine de journalistes entrer dans sa tente, où se reposent quelques-uns de ses camarades d'armes. Avec plus de 400 d'entre eux selon Moscou, il a traversé lundi matin la frontière russo-ukrainienne pour se rendre, une décision qu'il dit regretter.

"On nous a donné l'ordre de nous rendre. Les ordres, c'est les ordres, mais cette fois, j'aurais voulu ne pas obéir", confie-t-il à une journaliste de l'AFP.

"Nous n'avions plus de munitions, nous ne pouvions plus combattre depuis vingt-quatre heures. Nous avons reçu l'ordre de passer la frontière. Nous ne voulions pas nous rendre, mais c'était la seule solution", explique un autre soldat ukrainien.

Lui non plus ne souhaite pas donner son nom complet, pour ne pas "participer à cette opération de com" de l'armée russe, lance-t-il en montrant d'un geste accusateur la foule de journalistes, qui a fait le trajet de Moscou sur invitation du ministère russe de la Défense.

La grande majorité des soldats ukrainiens refusent eux aussi de parler avec la presse, et préfèrent se réfugier à la lisière d'un bois tout proche pour éviter les caméras.

"Je ne veux pas que ma famille pense que je suis un traître. Je ne sais pas ce que les Russes vous racontent, mais il n'y a pas un seul d'entre nous qui compte rester ici", assure Pavel.

"L'Ukraine, c'est notre pays et je reste convaincu que notre lutte contre les rebelles est juste", renchérit son camarade.

Après l'echec de ses premières opérations contre les séparatistes prorusses dans le sud-est du pays, l'armée ukrainienne a multiplié les avancées depuis plus d'un mois. Elle se rapproche des deux bastions insurgés de Lougansk et Donetsk, et tente de couper ces villes de la frontière russe, d'où les rebelles sont fournis en armes selon Kiev.

Sur les 438 soldats ukrainiens qui ont passé la frontière russe lundi matin, dans le sud de la Russie, environ 180 l'ont traversée à nouveau en sens inverse quelques heures plus tard, selon les Services de renseignements fédéraux (FSB).

Un porte-parole ukrainien a lui aussi souligné à Kiev que les soldats n'avaient pas déserté, mais qu'ils avaient "été contraints de se replier vers un poste-frontière russe à la suite d'une tentative de percée".

Mais ces soldats "ne se sont pas rendus", a affirmé Oleksiï Dmitrachkivski, porte-parole de l'"Opération antiterroriste", le nom de l'organe ukrainien chargé des opérations militaires contre les séparatistes prorusses dans l'Est

Ceux qui restent sont désormais logés dans de grandes tentes de l'armée russe, plantées au milieu des champs de blé qui entourent le poste de contrôle de Goukovo, à quelques dizaines de kilomètres des combats qui font rage dans l'est de l'Ukraine entre forces gouvernementales et séparatistes prorusses, que les Occidentaux accusent Moscou de soutenir.

"Ils sont venus spontanément, ils n'avaient pas d'ordres, sinon on nous aurait prévenu", assure à l'AFP Vassili Malaev, porte-parole régional du FSB. "Nous avons tout de suite su qu'ils n'attaquaient pas la frontière: ils n'étaient pas armés. Et puis, il faudrait être fou pour attaquer la Russie!"

Le responsable se défend par ailleurs de toute opération de communication: "Il s'agit plutôt d'une opération humanitaire", rectifie-t-il. "Si les soldats décident de rester en Russie, ils sont les bienvenus. Ils peuvent rester autant qu'ils le souhaitent et obtenir l'asile en Russie", à l'instar des réfugiés de l'est de l'Ukraine, dont les tentes blanches se dressent à une centaine de mètres. "Nous leur avons construit un campement où ils recevront de la nourriture, où ils pourront se laver dans un bania (sauna russe) et d'autres choses essentielles, comme une bonne nuit de repos".

Anton Chingara, l'un des rares soldats ukrainiens qui accepte de donner son nom, salue devant une forêt de micros et de caméras "le bon accueil" qu'a réservé l'armée russe à "ses frères slaves". Mais lui aussi espère retourner très vite en Ukraine.

all/bb/jh

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.