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En Russie, une nouvelle loi anti-fumeurs inquiète les industriels du tabac

En Russie, une nouvelle loi anti-fumeurs inquiète les industriels du tabac

Une nouvelle loi antitabac drastique entre en vigueur dimanche en Russie, portant un nouveau coup aux fabricants de cigarettes, dont les ventes ne cessent de baisser et qui voient leurs perspectives entravées par une réglementation toujours plus stricte.

La Russie, perçue autrefois comme un marché porteur pour les industriels du tabac, interdit depuis 2013 de fumer aux alentours et dans les lieux publics, et à compter du 1er juin, dans les restaurants, les cafés et les hôtels.

Surtout, la nouvelle loi interdit toute forme de publicité et de montrer les paquets proposés à la vente: les fumeurs doivent choisir leur marque via un catalogue sans images et sans logo.

"C'est l'une des plus sévères réglementations antitabac au monde", affirme Alexandre Liouti, directeur de la communication en Russie de British American Tobacco (BAT).

Selon l'institut des statistiques Rosstat, le nombre de fumeurs en Russie -40 millions- reste inchangé en Russie depuis 2010.

Mais les Russes ne cessent de réduire leur consommation. Seuls 19% d'entre eux fument plus d'un paquet par jour, contre le double il y a sept ans, selon l'institut de sondage Vtsiom.

En 2013, le marché du tabac russe a reculé de 7,5% en volume, indique M. Liouti.

En cause, la hausse du prix des paquets, sur lesquels les taxes de l'Etat russe pèsent de plus en plus lourd.

"Au cours des cinq dernières années, les taxes sur les cigarettes ont été multipliées par quatre", souligne-t-il. Le paquet, qui coûtait en moyenne 25 roubles en 2010, vaut désormais 59 roubles (1,25 euro).

Un prix qui peut sembler dérisoire pour les Européens, mais qui pousse les consommateurs russes, au pouvoir d'achat moindre, à chercher des alternatives moins chères.

"En conséquence, la demande pour la contrefaçon augmente, les produits de Biélorussie et du Kazakhstan, qui sont de 30 à 50% moins chers, commencent à infiltrer la Russie", avertit M. Liouti.

Au troisième trimestre 2013, la production de cigarettes issue de la contrefaçon a été multipliée par 2,5. Les cigarettes contrefaites représentent même presque jusqu'à 20% des ventes dans certaines régions comme le Daguestan, une république du Caucase russe.

Mais malgré la forte augmentation de la contrefaçon, son impact ne doit pas être surestimé.

"Il s'agit surtout d'une excuse bien commode pour cacher la baisse de nos ventes", avoue à l'AFP un responsable au sein d'une grande marque de cigarettes présente en Russie, sous couvert d'anonymat.

"Le principal souci des industriels du tabac en Russie, c'est la réglementation de plus en plus dure en matière de publicité qui nous empêche de récupérer de nouveaux consommateurs et donc de renouveler notre cible", explique-t-il.

"On nous contraint à être invisible", regrette pour sa part un responsable pour le géant américain Philip Morris en Russie, qui refuse de donner son nom.

Les enfants russes sont parmi les plus jeunes au monde à commencer la cigarette, et fument dès 10-12 ans selon l'Union des pédiatres de Russie, où 400.000 personnes meurent chaque année des suites d'une maladie liée au tabagisme.

Or ce sont les jeunes qui sont les plus sensibles à la hausse des prix et à la publicité, note Roman Grintchenko, analyste pour Investcafé. La loi les vise donc en premier lieu et devrait avoir moins d'effet sur les générations plus âgées.

"Je préfère économiser sur la nourriture qu'arrêter de fumer, même si le prix du paquet est multiplié par cinq", assure pour sa part Irina Stoniakina, 42 ans, fumeuse invétérée depuis ses vingt ans.

"Cette nouvelle loi ne mènera à rien, même sous l'URSS nous n'avons pas arrêté de fumer", lance-t-elle.

Plus que la hausse des prix, c'est peut-être le rigoureux hiver russe qui pourrait convaincre les fumeurs de renoncer à la cigarette, quand il fera trop froid pour en griller une sur le trottoir du restaurant, relève Maxime Koroliev, analyste au sein du Russian Tobacco Media Group.

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