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Hollande l'Africain

Hollande l'Africain

Initiateur de deux interventions militaires au Mali et en Centrafrique, promoteur d'un nouveau partenariat avec l'Afrique, le président français François Hollande, hôte samedi d'un sommet sur le Nigeria, est devenu en deux ans un acteur incontournable sur la scène africaine.

Le chef de l'Etat français réunit à Paris son homologue du Nigeria Goodluck Jonathan et ses voisins du Cameroun, du Niger, du Tchad et du Bénin pour un mini-sommet destiné à adopter une stratégie régionale contre Boko Haram, un mois après l'enlèvement par le groupe islamiste armé de plus de 200 lycéennes.

"Si aujourd'hui François Hollande a pu prendre une initiative pour le Nigeria, pays anglophone, dans une région qui ne fait pas partie de la sphère d'intérêts de la France, c'est parce que celle-ci est forte de son expérience dans le contre-terrorisme" au Mali et plus généralement au Sahel, analyse Bruno Tertrais, de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).

Dès son accession au pouvoir, M. Hollande avait proclamé sa volonté de tirer un trait sur la Françafrique, cette diplomatie de réseaux d'influence et d'accords secrets qui a longtemps caractérisé les relations entre Paris et ses ex-colonies africaines.

"Le temps de la Françafrique est révolu: il y a la France, il y a l'Afrique, il y a le partenariat entre la France et l'Afrique, avec des relations fondées sur le respect, la clarté et la solidarité", lance-t-il le 12 octobre 2012 à Dakar, lors de son premier déplacement présidentiel sur le continent.

Mais concrètement, c'est sa décision, le 11 janvier 2013, d'intervenir militairement au Mali pour combattre les groupes jihadistes menaçant de s'emparer de ce pays qui le projette sur le devant de la scène africaine.

Trois semaines après, accueilli en libérateur à Bamako, M. Hollande signifie lui-même l'intensité de ce moment, affirmant vivre "la journée la plus importante de (sa) vie politique".

Moins d'un an plus tard, le 5 décembre 2013, il repart en guerre, cette fois en Centrafrique, pour tenter de mettre fin aux massacres dans ce pays ravagé par les conflits interreligieux.

Concomitamment, il organise le lendemain à Paris un sommet réunissant le gotha des chefs d'Etat africains où il fixe la ligne officielle française: Paris aide désormais les pays africains à assurer eux-mêmes leur sécurité et, dans le même temps, prône un nouveau partenariat économique avec un continent en pleine croissance.

Pour autant, la France ne quitte pas le continent et a redéfini récemment son dispositif militaire en Afrique, en particulier au Sahel. "Nous sommes en train de nous réorganiser pour avoir une conception régionale du contre-terrorisme", a expliqué le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, précisant que 3.000 soldats français allaient être mobilisés dans la "bande sahélo-saharienne".

"Notre rôle à nous; c'est de poursuivre le contre-terrorisme, non seulement au Nord Mali, mais aussi au Nord Niger (et) au Tchad", a-t-il précisé.

Si François Hollande a reçu le prix de l'Unesco pour la paix pour son action au Mali, il n'en reste pas moins qu'"il a mis un masque africain le plus guerrier sans état d'âme", faisant de nouveau de la France le "gendarme de l'Afrique", analyse Antoine Glaser, fondateur de la Lettre du continent et spécialiste de la politique africaine de la France.

Quant au sommet de samedi, organisé à la demande du président nigérian Goodluck Jonathan, M. Glaser y voit "un symbole de plus" du retour de la France sur le continent africain, mais "plus seulement dans son pré carré". "C'est à l'ancienne", juge-t-il, "on va chercher le grand chef blanc pour discuter avec ses voisins".

"Le risque", ajoute-t-il, "est qu'au nom de la stabilité, François Hollande s'asseye sur la petite rose socialiste, sur la démocratie et sur les droits de l'Homme".

En octobre 2012, lors du dernier sommet de la Francophonie, le président français s'était fait l'avocat des droits de l'Homme et de la démocratie à Kinshasa. Ses rapports avec le président congolais Joseph Kabila était alors apparus glaciaux.

Mercredi prochain, M. Kabila sera reçu en visite officielle à l'Elysée. "Il y a le discours et la realpolitik", commente Antoine Glaser. "La realpolitik, c'est la sécurité et le business".

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