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Mondial-2014: la corruption, pire adversaire du football asiatique

Mondial-2014: la corruption, pire adversaire du football asiatique

Le football asiatique progresse peu à peu sur la très exigeante échelle mondiale, mais ne gagnera pas une Coupe du monde tant qu'il ne s'attaquera pas aux ravages de la corruption et des matches achetés, estiment les analystes.

Si un palmarès sportif se rapportait systématiquement à la population d'un territoire ou à l'engouement populaire pour une discipline, l'Asie où vit les deux tiers de l'humanité serait au pinacle du football. Mais les milliards de dollars qui y sont investis dans l'achat de droits de retransmission ou de produits dérivés ne provoquent pas l'essor des championnats nationaux.

Car la corruption y reste monnaie courante. Les clubs sont négligés, le public boude les stades et les entraîneurs sont mal payés. Joueurs, encadrement et officiels sont condamnés à échanger des enveloppes dans les vestiaires.

"Les championnats sont tellement truqués, qu'il y a eu des ligues entières qui se sont effondrées. Les Chinois ne s'intéressent plus au sport local, c'est pour cela qu'ils parient sur le sport européen. Les gens ne viennent plus parce qu'ils savent qu'il n'y a plus d'incertitude", estime Laurent Vidal, qui dirige la chaire de l'éthique et sécurité à l'Université Paris-Panthéon-Sorbonne.

"Pour être clair, le trucage des paris et des matches est à la base même du blanchissement d'argent sale. Avant quand on était trafiquant d'armes ou esclavagiste, on passait par des lessiveuses financières" avec un ratio de récupération des sommes de 60%. "Avec les paris, vous investissez 100, vous récupérez 95. Ce sont des machines à lessiver l'argent", poursuit Laurent Vidal. Résultat, le foot continental végète.

Le Japon est le principal espoir du continent au Mondial brésilien. Pourtant, rares sont ceux qui croient aux chances du Onze nippon et bien peu parient sur les performances de l'Asie en Russie en 2018, guère plus au Qatar en 2022.

"Je pense que le football asiatique a progressé, mais la question est +a-t-il progressé assez vite par rapport à d'autres régions du monde pour permettre à un pays asiatique de gagner la Coupe du monde dans huit ans ?+ Je n'en suis pas convaincu", affirme le journaliste Andy Jackson du magazine spécialisé FourFourTwo.

Quand, à la surprise générale, la Corée du Sud, co-organisatrice avec le Japon du Mondial-2002, avaient atteint les demi-finales, certains ont vu un tournant. Depuis, rien. En 2006, seule l'Australie a passé la phase des poules (éliminée en huitième de finale par l'Italie). En 2010, le Japon et la Corée du Sud se sont qualifiés pour le deuxième tour. Aujourd'hui, l'Iran est la nation asiatique la mieux classée par la Fifa (37e) et est, avec le Japon (47e), le seul pays de la région dans le top 50 mondial.

Pourtant, l'Asie ne manque pas de talents, à l'image du Sud-Coréen Park Ji-Sung ou des Japonais Shinji Kagawa, Keisuke Honda et Yuto Nagatomo, qui évoluent dans des clubs européens. Mais seul le Japon a réussi à développer un championnat solide "sans empêcher les joueurs les plus talentueux de tenter l'aventure dans les meilleurs championnats étrangers", résume Andy Jackson.

A l'inverse en Chine, la corruption freine le développement des clubs et de la formation. Le pays le plus peuplé du monde n'a atteint qu'une seule fois la phase finale d'une Coupe du Monde, en 2002, mais sans marquer de but ni engranger le moindre point.

Et ce n'est pas un cas isolé: le football vietnamien, pour ne citer que lui, est englué depuis des années dans des affaires de matches achetés.

A quelques semaines du Mondial brésilien, le Singapourien Wilson Raj Perumal, déjà condamné pour achat de matches et de nouveau arrêté en Finlande, a publié un ouvrage sur internet détaillant la naissance de mafias dans la ville-état qui ont tissé leur toile dans le monde entier.

Les affaires de corruption ont même pris de la hauteur lorsque l'ancien président de la Confédération asiatique de football (AFC), Mohamed bin Hammam, a été accusé de corruption en 2011 et radié par la Fifa. Une atmosphère qui plombe, et plombera encore, l'avenir du ballon rond en Asie.

"Pour qu'une équipe asiatique gagne au Qatar en 2022, un changement d'état d'esprit du sommet vers la base -- des gouvernements vers les parents -- est indispensable", avance Neil Humphreys, chroniqueur à "FourFourTwo". Pour ce faire, "il faut une éradication systématique, profonde, de la corruption".

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