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Dans l'Est de l'Ukraine, les médias locaux contraints au silence

Dans l'Est de l'Ukraine, les médias locaux contraints au silence

Olexandre s'énerve sur le bouton de l'autoradio de sa voiture. "C'est incroyable! Avant sur cette fréquence, il y avait une radio ukrainienne et là c'est une radio russe". Dans l'Est de l'Ukraine, les rebelles ont désormais pris le contrôle des médias.

Cela a pris des semaines, ils s'y sont parfois repris à plusieurs fois, mais depuis peu les insurgés pro-russes, qui contrôlent les grandes villes de la région, sont aussi maîtres des radios et télévisions locales.

A chaque fois, le scénario a été le même: "Des hommes armés se sont rendus au siège des médias - y compris le nôtre -, pour exiger de coordonner les programmes avec le leur, sinon ils allaient les fermer", explique Serguiï Garmach, responsable du site internet Ostrov.

La plupart du temps, les journalistes ont été renvoyés et les partisans de la "République de Donetsk" ont interrompu la diffusion numérique des chaînes et coupé le signal analogique de la plupart d'entre elles, remplacées par des chaînes russes.

Aujourd'hui, mis à part l'immense antenne-relais, difficile de deviner que l'imposant bâtiment ocre dans le sud de la ville abritait la télévision locale.

Devant l'immeuble, des barricades de pneus et un panneau "Stop" fabriqué à la hâte sur un bout de carton. Sur les marches de l'entrée, des sacs de sables empilés protègent les portes et derrière la grille, un blindé.

Impossible d'approcher. "C'est un bâtiment militaire, dégagez!", hurle une poignée d'hommes, particulièrement agressifs et portant une tenue de camouflage et un brassard rouge sur lequel est écrit "Oplot" ("Rempart"), du nom d'un groupe para-militaire pro-russe.

Derrière les murs, les journalistes ont disparu et les programmes de la chaîne de télévision publique régionale ukrainienne ont été remplacés par ceux de Rossia 24.

"En ce moment, tous les journalistes ukrainiens sont logés à la même enseigne. Il est presque impossible de travailler. C'est dangereux parce que la +République de Donetsk+, qui a placé trop d'armes entre les mains des mauvaises personnes, ne contrôle plus la situation", estime M. Garmach.

La semaine dernière, des "personnes non identifiées" ont tiré sur la maison de ce journaliste, identifié comme pro-ukrainien.

"Nous avons rapatrié à Kiev tous nos journalistes car ils risquaient clairement leur vie sur le terrain", raconte une responsable d'une chaine ukrainienne, qui ne souhaite pas être identifiée.

"Seuls des pigistes de la région travaillent encore pour nous mais sous des pseudonymes et ils n'utilisent plus de caméra, pour ne pas être identifiés", ajoute-t-elle.

Mais selon elle "ils sont constamment menacés et il est impossible de réellement travailler".

Un autre journaliste présent dans l'Est, mais qui ne veut donner ni son nom, ni le média pour lequel il travaille, explique continuer son travail mais "avec beaucoup de difficultés". "Nous sommes sans cesse sous la menace d'une saisie de nos locaux et de notre matériel", ajoute-t-il.

"La fermeture des chaînes de télés ukrainiennes était une nécessité vu la propagande et les mensonges qu'ils diffusaient. C'est le moins que nous puissions faire. Nous avons tenté de négocier mais sans succès", explique Olexandre Ryjkov,l'un des responsables de la nouvelle télévision et radio des rebelles.

Les pro-russes tentent en effet d'organiser leurs propres médias. Mais comme pour le reste, cela paraît très chaotique.

Leur radio diffuse quelques heures d'informations par jour "pour rétablir la vérité" et "cesser de mentir au peuple de Donetsk".

Leur projet de télévision est encore dans les cartons. Quant à leur journal, intitulé "La voix du peuple", il n'est pour l'instant paru qu'une seule fois.

tib/nm/neo/bir

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