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La Première ministre thaïlandaise destituée par la justice

La Première ministre thaïlandaise destituée par la justice

La Première ministre thaïlandaise Yingluck Shinawatra, reconnue coupable d'abus de pouvoir, et plusieurs membres de son gouvernement, ont été destitués mercredi par la Cour constitutionnelle, enfonçant encore un peu plus le pays dans la crise et le flou politique.

Yingluck, qui fait face depuis six mois à un mouvement de rue réclamant sa tête, "ne peut plus rester à son poste de Premier ministre expédiant les affaires courantes", a déclaré le président de la Cour Charoon Intachan, lors de la lecture du jugement restransmis en direct à la télévision.

La Cour a également décidé de révoquer tous les ministres impliqués dans ce dossier lié au tranfert d'un haut fonctionnaire. Elle n'a en revanche pas précisé leurs noms, laissant planer le doute sur l'étendue de la vacance du pouvoir et sur la possibilité que l'un des ministres restants remplace Yingluck.

L'affaire concerne l'éviction du patron du Conseil de sécurité nationale après l'arrivée au pouvoir de Yingluck en 2011. Celui-ci a réintégré depuis ses fonctions sur ordre du tribunal administratif.

Se basant sur cette décision, un groupe de sénateurs, assurant que le transfert initial avait été fait au bénéfice du parti Puea Thai au pouvoir, a déposé un recours devant la Cour constitutionnelle.

"Les juges ont décidé à l'unanimité que Yingluck avait abusé de son statut de Premier ministre", pour effectuer un transfert "illégal" et à son propre "bénéfice", a souligné Charoon, au lendemain du témoignage de Yingluck, qui avait clamé son innoncence.

La Cour a en revanche refusé de nommer un nouveau Premier ministre, notant qu'elle n'était "pas autorisée" à le faire.

Les manifestants antigouvernementaux ont salué la décision de la Cour à coups de sifflets devenus leur signe de ralliement.

"Je suis heureux, même si ce n'est pas tout le gouvernement", a commenté l'un d'entre eux devant la Cour, Linjong Thummathorn.

Les protestataire continuent à défiler quasi quotidiennement dans les rues de Bangkok, même si la mobilisation a largement diminué depuis le début de cette crise qui a fait au moins 25 morts.

Ils accusent Yingluck et son frère Thaksin Shinawatra, ancien Premier ministre renversé par un coup d'Etat en 2006 et personnage clé de la politique du royaume, d'avoir mis en place un système de corruption généralisée.

Estimant que Thaksin continue à gouverner à travers sa soeur, malgré son exil, ils veulent également remplacer le gouvernement par un "conseil du peuple" non élu.

Alors que la Cour constitutionnelle a déjà chassé du pouvoir deux Premiers ministres pro-Thaksin en 2008 et que la justice est accusée d'être biaisée, beaucoup doutaient mercredi d'une décision favorable à Yingluck.

Sa décision ouvre une nouvelle page d'incertitude, en l'absence de précision sur la façon dont sera désigné le nouveau Premier ministre -- même si en théorie, un vice-Premier ministre peut remplacer un Premier ministre déchu.

S'ajoute à cela l'absence de Parlement (dissous en décembre 2013), théoriquement chargé de cette tâche.

Les législatives du 2 février ont été invalidées par la justice en raison de leur perturbation par les manifestants. Et si le gouvernement a annoncé de nouvelles élections pour le 20 juillet, le décret n'a pas encore été officiellement approuvé.

Les manifestants ont de toute façon promis de perturber tout nouveau scrutin, et le Parti démocrate, principale formation de l'opposition qui avait boycotté le précédent, a refusé de soutenir ces nouvelles élections.

Le mouvement des Chemises rouges pro-Thaksin a de son côté promis de redescendre dans la rue en cas de nouveau "coup d'Etat judiciaire", faisant craindre de nouvelles violences.

En 2010, les Rouges avaient occupé le centre de Bangkok pendant deux mois pour déclamer la démission du gouvernement de l'époque, avant un assaut de l'armée.

Avec plus de 90 morts et 1.900 blessés, cette crise a été l'épisode le plus sanglant d'un cycle de crises politiques ayant fait descendre tour à tour dans la rue depuis 2006 les ennemis et les partisans de Thaksin.

Le milliardaire, en exil pour échapper à la prison pour malversation financière, reste la figure de division du royaume entre les masses rurales et urbaines défavorisées du nord et du nord-est, qui lui sont fidèles, et les élites de Bangkok gravitant autour du palais royal, qui le haïssent et le voient comme une menace pour la monarchie.

Yingluck fait d'autre part face à une procédure de la commission anticorruption pour négligence en lien avec un programme controversé d'aide aux riziculteurs. Une affaire qui pourrait conduire à son interdiction de vie politique pour cinq ans.

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