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Le Portugal fête la fin de la dictature, en attendant le départ de la troïka

Le Portugal fête la fin de la dictature, en attendant le départ de la troïka

Le Portugal célébrait vendredi le 40e anniversaire de sa libération du joug de la dictature salazariste, trois semaines avant de s'affranchir de la tutelle de ses créanciers, jugée tout aussi oppressante par la population.

Comme en 2012 et 2013, les capitaines de la Révolution d'avril ont boycotté les célébrations officielles. Pour eux, la politique d'austérité menée par le gouvernement en échange de l'aide octroyée par la troïka (UE-FMI-BCE) trahit les idéaux de la Révolution.

Le matin du 25 avril 1974, les chars du Mouvement des forces armées (MFA) entrent dans Lisbonne. C'est la fin de 48 ans de dictature dirigée d'une main de fer par Antonio Oliveira Salazar jusqu'en 1968, puis par Marcelo Caetano jusqu'à la chute du régime.

Liberté d'expression, suffrage universel, égalité des chances entre hommes et femmes, droit de grève, Sécurité sociale pour tous... les Portugais découvrent la démocratie, tournant la page d'une dictature qui a fait 30.000 prisonniers politiques et une cinquantaine de morts parmi les dissidents.

40 ans plus tard, des milliers de Portugais ont participé dans la capitale au traditionnel défilé dans l'avenida da Liberdade, qui a tourné à la manifestation anti-austérité prenant comme cible le gouvernement de centre droit et la troïka, à Lisbonne pour son ultime visite de contrôle.

"Le 25 avril est dans la rue, la lutte continue!", ont scandé les manifestants, réunis à l'appel des capitaines d'avril, des principaux syndicats et des partis d'extrême gauche.

"Nous avons désormais la liberté au Portugal, mais la politique est ultralibérale, dictée par la troïka", a regretté Antonio Nabais, 76 ans, militant antifasciste qui a passé plus de cinq ans de sa vie dans les geôles de la dictature, torturé par la PIDE, la police politique.

Si la prochaine sortie du pays de son plan de rigueur, synonyme de lourds sacrifices pour les Portugais, provoque un soulagement général, les célébrations de la Révolution des Oeillets ont fait ressortir de profondes divergences.

Soucieux de calmer le jeu, le président Anibal Cavaco Silva a appelé les partis politiques à un consensus sur la période post-troïka: "A chaque fois que nous étions réunis, nous étions proches des idéaux d'avril", a-t-il déclaré dans la matinée pendant la cérémonie solennelle à l'Assemblée de la République.

"Si ce gouvernement ne change pas rapidement sa politique de soumission, austérité et appauvrissement du pays, il doit être destitué", a lancé à la même heure le colonel Vasco Lourenço, porte-parole des capitaines d'avril, devant des milliers de Lisboètes rassemblés au Largo do Carmo, l'un des symboles de la Révolution.

L'emblématique place est située en face de la caserne de gendarmerie où le dictateur Marcelo Caetano a fini par se rendre aux putschistes.

Invités au Parlement, les capitaines d'avril avaient exigé d'y prendre la parole, mais se sont heurtés au refus des partis de la majorité de centre droit.

"Les valeurs du 25 avril sont de moins en moins respectées, il y a plus d'inégalités et plus de pauvreté au Portugal depuis l'arrivée de la troïka", a témoigné Pedro Betamio, 40 ans, tenant un oeillet rouge à la main. "En trois ans, mon salaire a diminué d'un tiers", a ajouté ce juriste.

"On paie toujours plus d'impôts et gagne toujours moins. La troïka s'en va, mais il faut que le gouvernement s'en aille aussi!", a renchéri Amelia Castela, 50 ans, venue écouter les capitaines d'avril avec ses filles.

"Grândola Vila Morena", l'hymne de la Révolution, a retenti vendredi à nouveau dans les rues du Portugal, comme souvent dans des manifestations anti-austérité. "Un nouveau 25 avril", réclamé par de nombreuses banderoles, serait-il envisageable?

"La Révolution du 25 avril est dans les gènes des Portugais", a déclaré à l'AFP l'historienne Irene Pimentel. Pour elle, "un nouveau coup militaire est exclu, mais une révolte populaire est possible".

bh/gg

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