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L'Arménie commémore le génocide, veut plus que des condoléances de la Turquie

L'Arménie commémore le génocide, veut plus que des condoléances de la Turquie

L'Arménie, qui commémore jeudi le génocide perpétré il y a 99 ans sous l'empire ottoman, a rejeté les condoléances présentées par la Turquie dans un geste inédit, et réclamé d'Ankara reconnaissance et "repentir".

Sans interpeller directement son allié turc au sein de l'Otan, et sans utiliser le mot "génocide", le président américain Barack Obama a appelé de son côté à une "reconnaissance pleine, franche et juste des faits", dans un communiqué.

Le département d'Etat a cependant qualifié les condoléances turques d'"historiques", estimant qu'elles pourraient ouvrir la voie à une normalisation entre l'Arménie et la Turquie.

A l'occasion des commémorations du génocide à Paris, le président français François Hollande a vu dans le geste de la Turquie "une évolution". Les condoléances présentées à l'Arménie sont "un mot qu'il faut entendre mais qui ne peut pas encore suffire", a toutefois nuancé le chef de l'Etat français. "Ce qui doit être dit, c'est ce qui s'est produit", a-t-il souligné.

Pour le président arménien, le génocide "continue tant que le successeur de la Turquie ottomane poursuit sa politique de déni total".

"Seule la reconnaissance et la condamnation (du génocide) peuvent empêcher la répétition d'un tel crime à l'avenir", a ajouté Serge Sarkissian dans un communiqué.

La veille, le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a fait un geste inattendu en présentant les condoléances de la Turquie "aux petits-enfants des Arméniens tués en 1915" lors des massacres visant cette communauté sous l'empire ottoman.

C'est la première fois que le chef du gouvernement turc s'est exprimé aussi ouvertement sur ce drame survenu entre 1915 et 1917, aux dernières années de l'empire ottoman et qui est reconnu comme un génocide par de nombreux pays, ce que la Turquie refuse de son côté farouchement.

Le président arménien a appelé la Turquie, sans évoquer explicitement la déclaration de M. Erdogan la veille, à aller beaucoup plus loin.

"Nous approchons du 100e anniversaire du génocide arménien. Cela peut donner à la Turquie une bonne chance de se repentir et de se libérer de cette lourde charge", a-t-il déclaré.

Il a cependant souligné qu'au-delà des mots, l'Arménie attendait "des avancées réelles: l'ouverture des frontières et l'établissement de relations normales".

Le chef de la diplomatie turque, Ahmet Davutoglu, avait déjà fait un pas lors d'une visite à Erevan il y a quelques mois, en qualifiant les faits de "tragédie inhumaine".

Le 24 avril 1915 le gouvernement jeunes-turcs ordonnait la déportation vers la province ottomane de Syrie de centaines de milliers d'Arméniens accusés de collaborer avec l'ennemi russe.

Cette journée est commémorée dans le monde entier par la diaspora arménienne.

Selon les Arméniens, 1,5 million des leurs furent tués lors des persécutions et déportations. La Turquie reconnaît des massacres qui ont coûté la vie à 300.000 personnes, tout en refusant le caractère génocidaire des événements reconnu par de nombreux pays, dont la France.

Les intellectuels turcs, qui ont réservé un accueil mitigé au message de M. Erdogan, y ont vu une volonté d'atténuer les critiques qui risquent de s'abattre sur la Turquie à l'occasion du centenaire en 2015.

Le chanteur français d'origine arménienne Charles Aznavour a relevé que le terme de "condoléances" devait être lu "non comme une reconnaissance et encore moins comme une présentation d'excuses" pour le génocide.

Le texte de M. Erdogan, certes inédit, est vague et décrit la fin de l'Empire ottoman comme une période "difficile" pour "des millions de citoyens ottomans, turcs, kurdes, arabes, arméniens et autres, quelle que soit leur religion ou leur origine ethnique".

La presse turque a salué une démarche "historique" du régime islamo-conservateur à l'heure où son image internationale a été fortement ternie à cause de la répression des manifestations de l'été dernier et des accusations de corruption touchant M. Erdogan.

"Ce sont les mots les plus explicites que peut prononcer à ce stade un Premier ministre turc", s'est félicité un éditorialiste du journal Hürriyet.

Depuis quelques années, le génocide n'est plus un tabou en Turquie qui a ouvert ses archives aux historiens. Le débat s'est invité sur les plateaux des émissions de télévisions et dans les milieux académiques.

Des commémorations sont aussi organisées depuis 2010 à Istanbul, ancienne Constantinople, capitale ottomane.

Des membres de la communauté arménienne se sont également rassemblés à Jérusalem, pour commémorer le génocide et réclamer sa reconnaissance.

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