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Aux portes de Donetsk, Makiïvka, sous bonne garde, tourne le dos à Kiev

Aux portes de Donetsk, Makiïvka, sous bonne garde, tourne le dos à Kiev

Sous bonne garde de vigiles en cagoule, bonnet ou béret, l'entrée de la mairie arbore le drapeau de la "République de Donetsk" aux couleurs russes. C'est désormais officiel, le conseil municipal l'a voté : Makiïvka exige un référendum pour prendre ses distances avec Kiev.

"Les citoyens qui se trouvent ici ne sont pas armés. Ils sont pacifiques. Ce ne sont ni des terroristes ni des séparatistes", assure Serguiï Naponski, qui se présente comme le porte-parole du mouvement contrôlant le massif bâtiment de béton.

"Ils ne veulent qu'une chose c'est que le pouvoir les écoute", poursuit l'homme aux cheveux poivres et sel, à l'épaisse moustache.

Que veulent-ils? Union avec la Russie, une Ukraine fédérale comme le suggère Moscou qui assure vouloir ainsi protéger les droits des russophones présents dans cette région face au nouveau pro-européen à Kiev?

"Pour l'instant on ne sait pas", indique M. Naponski, qui penche pour l'option fédérale: "Nous avons des potentiels économiques différents par rapport aux régions de l'ouest, des cultures différentes. Il y a des pays dans l'UE qui sont des fédérations. Pourquoi l'Ukraine ne pourrait pas si les gens le veulent?"

Troisième ville du bassin houiller du Donbass, dans l'Est russophone de l'Ukraine, Makiïvka, 400.000 habitants, est un peu la "petite soeur" de Donetsk, dont elle est adjacente sur la route qui mène vers la frontière russe, à quelques dizaines de kilomètres de là.

La cité, qui compte dix mines en activité et le même nombre en restructuration, fait partie des foyers de tensions qui ont vu pendant le week-end une série d'attaques, apparemment coordonnées, viser des bâtiments publics.

L'attention s'est surtout portée sur Slaviansk, où des forces pro-russes armées, certaines très équipées et entraînées, ont pris possession de la mairie et de la police, créant une situation explosive.

A Makiïvka, comme dans la ville voisine de Khartsyzk, aucun homme armé n'est en vue et l'occupation de la mairie depuis dimanche, symbole de la perte d'autorité de Kiev sur cette région, se déroule dans un calme presque surréaliste.

Les usagers des services publics vont et viennent comme d'habitude dans les couloirs de l'administration locale, située sur la place Soviétique, à quelques centaines de mètres de la statue de Lénine présente ici comme dans la plupart des villes de la région.

Ils évoluent sous bonne garde de vigiles, certains cagoulés et équipés de gilets par balles et de massives matraques. Dans le hall, des biscuits et des bouteilles en verre remplies de jus de fruit servent de ravitaillement pour des sympathisants, dont quelques dizaines vaquent sur la place, entre des tas de pneus.

"On a peur des provocations: le pouvoir a besoin de cela pour nous déloger", assure Serguiï Naponski. "Les gens travaillent, nous ne voulons pas empêcher le fonctionnement de la ville".

De fait, l'administration a décidé de couper les ponts avec Kiev. Lundi, les occupants ont obtenu la tenue d'un conseil municipal d'urgence, dans la salle de réunion où sont dressés côte à côte le drapeau ukrainien et celui de la ville, bleu avec en son coin un coucher de soleil.

Les élus locaux y ont voté à l'unanimité en faveur d'un référendum dans la région pour se prononcer sur "le sort du Donbass", selon le texte disponible sur le site officiel de la ville.

Avec quelle question? Une commission a été formée pour se pencher sur le sujet, avec des élus et des représentants des manifestants pro-russes.

"Il n'est pas question de rejoindre la Russie: ce que le peuple exige c'est une certaine indépendance, quelle qu'en soit la forme : fédéralisation ou décentralisation", assure le conseiller municipal Olexandre Golovanov.

L'élu raconte que le conseil municipal s'est déjà réuni trois fois depuis le début de la crise politique ukrainienne en novembre pour adresser ses doléances à Kiev. "Nous n'avons reçu aucune réponse", déplore-t-il.

"En quoi une fédéralisation est une menace ? Qu'est-ce qu'il s'est passé avec la Belgique, avec la Suisse ? Est-ce qu'elles ont disparu ? (...) Puisqu'on ne peut pas faire autrement donc il faut aller vers une fédéralisation dans le cadre d'un pays uni", tranche-t-il.

gmo/neo/bir

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