Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

"Nous voulons voter": le défi catalan à Madrid

"Nous voulons voter": le défi catalan à Madrid

"Nous voulons voter. Qu'ils nous envoient les chars, cela ne nous arrêtera pas", lance Marc Cots, un étudiant de 20 ans. Sur la place de Catalogne, au coeur de Barcelone, il vient de signer une pétition réclamant un referendum sur l'indépendance régionale.

Jeunes, familles avec enfants, retraités et même quelques touristes défilent dans un goutte à goutte incessant devant le stand signalé par une "estelada", le drapeau indépendantiste catalan rayé jaune et rouge, frappé d'une étoile blanche.

Tous ont en tête la date du 9 novembre: celle du referendum annoncé par le président nationaliste Artur Mas, réclamé avec force par une large partie de la société catalane et déclaré illégal par Madrid.

"Pour moi, la décision du Tribunal constitutionnel ne change rien. La Catalogne est une nation par son histoire, sa langue, sa culture spécifique", ajoute le jeune homme. "Nous avons le droit de voter, que cela leur plaise ou non".

Sur la place de Catalogne grouillante de monde, des volontaires de l'Assemblée nationale catalane (ANC), un puissant groupe de pression qui milite pour l'indépendance, recueillent des signatures pour réclamer un referendum.

Dans des centaines de communes catalanes, l'ANC mène la même campagne. Si la consultation n'avait pas lieu, le groupe plaide pour une proclamation d'indépendance unilatérale.

Le nombre de signatures recueillies reste confidentiel mais l'ANC affirme qu'en janvier, sur un seul weekend, elle a obtenu plus de 200.000 soutiens.

"Les gens ont de grands espoirs. Jamais nous n'avons été aussi près du but", remarque Lluisa Forcadell, une volontaire de 55 ans qui dépose une nouvelle signature dans une urne de carton.

Puissante région du nord-est de l'Espagne, peuplée de 7,5 millions d'habitants, la Catalogne revendique fièrement son identité culturelle et linguistique.

Mais sous l'effet de la crise économique qui l'a contrainte à de lourds sacrifices, la revendication d'indépendance y a gagné du terrain, au-delà d'un sentiment nationaliste déjà très fort.

Sous pression de la rue, Artur Mas et sa coalition conservatrice CiU ont fait alliance avec les indépendantistes de gauche de l'ERC pour annoncer un referendum.

Alors que le gouvernement espagnol de droite ne cesse d'affirmer que la consultation n'aura pas lieu, le Tribunal constitutionnel a rejeté mardi la déclaration de souveraineté adoptée par la Catalogne en 2013, qui a servi de base à la convocation du referendum.

Faisant fi de cette décision, Artur Mas a promis de poursuivre sur cette voie.

"Les sondages disent que le peuple catalan veut être consulté, qu'ils sont entre 70% et 80% à vouloir voter", remarque Jordi Matas, professeur de Sciences politiques à l'université de Barcelone.

"Il ne s'agit pas de la dérive indépendantiste d'un gouvernement. Il y a une majorité parlementaire derrière et surtout, une majorité sociale qui réclame ce referendum", souligne-t-il.

Sergi Codina, un gérant de restaurant de 32 ans, vient de signer la pétition. "Avec Madrid on ne peut tomber d'accord sur rien. C'est pour cela que nous devons continuer, quitte à nous mettre hors-la-loi".

L'ANC a déjà démontré sa capacité à mobiliser lors de gigantesques manifestations en 2012 et 2013, le 11 septembre, à l'occasion de la Diada, le Jour de la Catalogne, date symbolique de la prise de Barcelone, en 1714, par les troupes franco-espagnoles.

Cette fois, elle s'apprête à publier une feuille de route fixant au 23 avril 2015 la proclamation d'indépendance.

"Nous ferons pression sur le gouvernement catalan et les partis politiques, parce que nous pensons que l'indépendance est la seule voie possible", explique à l'AFP sa présidente, Carme Forcadell.

Une association d'extrême-droite, Manos Limpias, a demandé l'interdiction de l'ANC, l'accusant d'appel à la sédition. Avec pour effet de faire bondir le nombre d'adhérents, de 22.000 à plus de 30.000 en une semaine.

"Les politiques ne peuvent plus revenir en arrière. Ce serait un échec total", lance Manuel Gonzalez, un pré-retraité de 63 ans.

"Il faut continuer, même si c'est contraire à la Constitution. S'ils le veulent, qu'ils nous mettent en prison. Mais ils devront en trouver une assez grande pour que nous tenions tous", ironise sa femme, Lourdes Company, en épinglant sur sa poitrine un badge aux couleurs de l'indépendance.

dbh/sg/ia

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.