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L'avenir du Nigeria sur la table à la Conférence nationale

L'avenir du Nigeria sur la table à la Conférence nationale

A la Conférence nationale débutant lundi à Abuja, il devrait être question de tous les grands maux du Nigeria, du groupe islamiste Boko Haram à la corruption endémique dans le secteur pétrolier en passant par la lutte contre la pauvreté.

Des représentants des centaines de groupes ethniques, religieux et linguistiques composant le pays le plus peuplé d'Afrique sont attendus pour débattre de l'avenir de leur nation.

Contrairement à la Conférence nationale qui avait lancé la transition démocratique au Bénin, en 1990, à laquelle de nombreux pays africains avaient emboîté le pas, la conférence d'Abuja n'est pas souveraine: les décisions prises devront ensuite être votées par le parlement pour être entérinées.

Une conférence constitutionnelle, avec un rôle consultatif du même type, s'était tenue au Nigeria sous le régime du général Sani Abacha, entre 1994 et 1995. Mais elle avait donné peu de résultats dans le contexte de dictature militaire de l'époque.

Une seule question, particulièrement sensible, devrait être soigneusement évitée cette année: celle de savoir si le Nord et le Sud, rassemblés en un seul pays il y a 100 ans par le colonisateur britannique, devraient à nouveau être séparés.

Les débats peuvent toucher "tous les sujets sauf celui de l'indivisibilité et de l'indissolubilité du Nigeria en tant que nation", a déclaré Anyim Pius Anyim, le chef de la fonction publique.

L'administration du président Goodluck Jonathan a également prévenu: "l'unité du Nigeria n'est pas négociable".

Pareil tabou montre à quel point la question est une bombe politique.

"Il y a des problèmes dans toutes les régions, et sans cette conférence nationale le pays tout entier risque de s'effondrer", prévient Ganiyu Adams, à la tête d'un lobby en faveur d'un Etat yoruba indépendant.

Le Nigeria, deuxième puissance économique et premier producteur de pétrole d'Afrique, divisé entre un Nord majoritairement musulman et un Sud à dominante chrétienne, est une véritable mosaïque ethnique et linguistique.

Les disparités économiques et sociales entre les différentes régions du pays nourrissent les tensions intercommunautaires, les politiciens étant régulièrement accusés de favoritisme et de discrimination.

Le premier gouvernement élu avait été renversé en 1966 par un coup d'Etat militaire qui avait dégénéré, l'année suivante, en guerre civile, sur fond de divisions ethniques, faisant plus d'un million de morts.

Le pays a ensuite connu une succession de dictatures militaires, jusqu'en 1999.

Mais aucun régime, civil ou militaire, n'a jamais pris la responsabilité d'aborder les dissensions historiques entre les différents groupes ethniques.

Aujourd'hui, le Nigeria, gangrené par une corruption endémique, mal gouverné, en manque d'infrastructures, pourrait avoir atteint un point critique, alors que les écarts de richesse ne cessent de se creuser entre ses 170 millions d'habitants.

Dans ce contexte, la Conférence nationale représente un élément essentiel du processus démocratique, en donnant la parole à tous et non seulement à l'élite, disent ses défenseurs.

Mais pour les plus critiques, ces débats, qui doivent s'étendre sur trois mois, sont coûteux et sans intérêt.

Pour le Congrès des progressistes (APC), principale formation d'opposition, l'argent de cette conférence serait plus utile s'il allait à l'éducation, la santé ou la lutte contre la pauvreté.

"On n'a pas besoin d'une Conférence nationale pour créer des infrastructures, on n'a pas besoin d'une conférence pour dispenser une éducation de qualité", a déclaré le gouverneur de Lagos, Babatunde Fashola, membre de l'APC.

Le président Jonathan, opposé dans un premier temps à l'idée d'une telle conférence, a finalement changé d'avis, au moment où il est confronté à une crise majeure au sein même de son camp politique, à un an de la prochaine présidentielle.

"Quand des problèmes créent des tensions et des frictions, cela a un sens que les intéressés se rassemblent pour en discuter", avait-il déclaré en octobre, lors de la fête de l'indépendance.

Mais si elles ont parfois entraîné des changements constitutionnels, les précédentes conférences de ce type ont été " plus réactionnaires que pro-actives", écrit Zainab Usman sur le site internet African Arguments.

Selon la doctorante à l'Université d'Oxford, dans le passé, ces conférences ont toujours été des "instruments de gestion de crise pour poursuivre un agenda politique à la veille d'une transition politique".

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