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Ukraine : les Occidentaux pris de court par la Russie

Ukraine : les Occidentaux pris de court par la Russie

L'Europe et les Etats-Unis ont été pris de court par l'annonce samedi de l'intervention militaire russe en Ukraine décidée par Vladimir Poutine en dépit de l'avertissement de Barack Obama quant au "coût" sur la scène mondiale d'une telle opération.

"Tout le monde est pris de court, tout le monde est en train d'improviser", résume François Heisbourg, expert à la Fondation française de recherche stratégique (FRS), interrogé par l'AFP.

"Pour l'Europe, c'est potentiellement la pire crise depuis la fin de la guerre froide", estime Joerg Forbrig, directeur du programme sur l'Europe orientale pour le German Marshall Fund.

"Le problème est que M. Poutine peut agir beaucoup plus rapidement pour atteindre ses objectifs que Washington ou l'Europe. Et le problème pour nous est que nous ne savons pas jusqu'où il veut aller (...) L'objectif auquel nous devrions penser très rapidement est d'empêcher un scénario similaire dans d'autres régions", relève Andy Kuchins, directeur du Programme Russie/Eurasie au CSIS (Centre des études stratégiques internationales).

Les événements de Crimée, région de l'Ukraine majoritairement peuplée de russophones et où l'armée russe possède une importante base militaire à Sébastopol, rappellent le scénario de 2008 en Géorgie : une guerre éclair de cinq jours s'était alors soldée par la reconnaissance par Moscou de l'indépendance de deux régions géorgiennes pro-russes, l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, et par le déploiement dans ces territoires de milliers de soldats russes.

Des sources diplomatiques européennes s'étaient pourtant encore voulu rassurantes vendredi, en estimant que Vladimir Poutine n'avait pas intérêt à trop faire monter la tension à trois mois du prochain sommet du G8 qu'il doit accueillir à Sotchi.

"La tentation naturelle (des Occidentaux) est de donner le bénéfice du doute à Poutine. Personne n'a intérêt à voir la situation se dégrader dans la région", relevait encore samedi François Heisbourg.

Devant la précipitation des événements, une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne a été convoquée lundi à 12H00 GMT, tandis que les ambassadeurs des 15 pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont entamé samedi des consultations à huis clos à New York consacrées à la situation en Ukraine et en Crimée.

La Russie étant membre permanent de ce Conseil de sécurité, il est toutefois hautement improbable qu'il parvienne à une position commune.

Avant la réunion de samedi, la deuxième convoquée en urgence en deux jours sur le dossier de l'Ukraine, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a appelé "au rétablissement immédiat du calme et au dialogue direct entre toutes les parties pour régler la crise actuelle".

Le président russe semblait samedi vouloir jouer avec les nerfs des Occidentaux : alors que le Conseil de la Fédération venait d'accéder à sa demande d'autoriser un recours de l'armée russe en Ukraine "jusqu'à la normalisation de la situation politique dans ce pays", le Kremlin a fait savoir dans un communiqué que Vladimir Poutine n'avait pas encore pris sa décision.

Une intervention militaire occidentale étant exclue, les options pour faire pression sur la Russie ne peuvent être que diplomatiques et économiques, soulignent des experts.

"Il y a eu une série d'avertissements et de condamnations, mais sans résultats jusqu'à présent", note Joerg Forbrig. "Aujourd'hui (...) des mesures plus fortes sont nécessaires immédiatement (...) il doit y avoir des signaux politiques et des pressions beaucoup plus fortes en direction de Moscou", estime-t-il.

Directrice du programme européen au Centre for Strategic and international studies, Heather Conley, prédit "des mesures économiques et diplomatiques contre la Russie". "La participation d'Obama à la réunion du G8 (de Sotchi) est très improbable", ajoute-t-elle.

Dans leurs réactions à la crise, les Occidentaux semblent avancer en ordre dispersé, accréditant l'idée d'improvisation. Vendredi, trois pays européens (France, Allemagne, Pologne) avaient publié une déclaration commune faisant part de leur inquiétude face à l'évolution de la situation en Crimée. Samedi, chacun a fait part de sa préoccupation mais de manière séparée.

Dans le bras de fer diplomatique comme sur le terrain, la Russie apparaît de son côté souvent avec un coup d'avance. Le Sénat russe a ainsi estimé que M. Obama avait franchi une "ligne rouge" avec sa mise en garde à Moscou et indiqué qu'il allait demander à M. Poutine le rappel de l'ambassadeur de Russie aux Etats-Unis.

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