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«Rambo» a transformé La Romaine en calvaire pour l'entreprise FGL

«Rambo» a transformé La Romaine en calvaire pour l'entreprise FGL

EN DIRECT - Le chantier de La Romaine sur la Côte-Nord s'est révélé un véritable calvaire pour l'entreprise FGL du Saguenay. Bris d'équipements à répétition, embauche à la merci de Bernard « Rambo » Gauthier, travailleurs intoxiqués... Bref, pour reprendre les mots du directeur des opérations de l'entreprise, du jamais vu en 25 ans.

Un texte de Bernard Leduc

Pierre Laprise attribue beaucoup de ses problèmes à l'influence sur le chantier du représentant du local 791 des opérateurs de machinerie lourde de la FTQ-Construction.

M. Laprise estime que le déclencheur a été sa décision, fin novembre 2009, de mettre à pied un opérateur de pelle, après que ce dernier ait causé d'importants dégâts d'équipement. Il voulait ainsi donner l'exemple, afin de mettre fin à une longue succession d'incidents du même genre sur le chantier.

Si dans un premier temps M. Gauthier, avisé de sa décision, donne son accord, il changera cependant son fusil d'épaule le lendemain lors d'une confrontation avec M. Laprise : « C'est le ton Rambo : il parle fort, veut prendre le contrôle et te gérer, gérer la main d'ouvre ». L'opérateur, incidemment, ne sera pas mis à pied...

Avant de partir, le syndicaliste lui lance, en colère : « on va régler ça autrement »

Le lendemain 25 novembre, c'est l'escalade : quelque 150 travailleurs encerclent, menaçants, M. Laprise. La manifestation entraîne un arrêt de travail, et selon ce dernier, M. Gauthier est derrière tout cela.

FGL s'en plaindra par lettre à Hydro-Québec, ce qui se traduira par une rencontre avec la société d'État le 9 décembre 2009 et le directeur général du 791, Bernard Girard.

M. Girard, qui admettra alors que 98 % du problème était « dans sa cour », aurait aussi dit dans un autre contexte à M. Laprise qu'il n'avait pas de contrôle sur Bernard « Rambo » Gauthier.

La décision d'Hydro-Québec d'établir sur le chantier un politique de tolérance zéro permettra d'assainir la situation.

Son intervention n'a pas été cependant sans répercussion. M. Laprise soutient que dès le début de 2010, Bernard Gauthier lui enlevait toutes les semaines entre quatre et cinq employés, ce qui lui causait de véritables maux de tête.

« M. Gauthier nous retirait de la bonne main d'uvre, nous on était obligé de la remplacer et Hydro-Québec, de l'autre côté, nous forçait à reprendre la main d'uvre de la Côte-Nord », a-t-il fait valoir.

FGL devait donc composer avec un bassin de main-d'uvre limité tout en devant constamment former des travailleurs. Le tout a un effet sur les échéanciers, et entraîne des coûts.

Des bris coûteux

M. Laprise estime que les bris d'équipement que FGL, présent sur la Côte-Nord depuis 25 ans, a connu sur le chantier de La Romaine étaient sans précédent pour l'entreprise.

Le témoin, qui parle de « bris anormaux sur nos équipements », mentionne notamment des cylindres hydrauliques brisés sur des pelles mécaniques, des transmissions de camion arrachées, des camions à 600 000 $ pièce usée prématurément...

Le procès verbal de la rencontre avec Hydro-Québec fait état de 270 000 $ en bris d'équipement pour la seule période du 14 au 23 novembre.

Il refuse de dire que les bris étaient volontaires, jugeant plutôt qu'ils résultent de l'inattention des travailleurs, dont certains étaient, dans certains cas, intoxiqués.

Il déplore aussi une tendance générale sur les chantiers de la Côte-Nord des travailleurs à ralentir les travaux afin que leur contrat s'étire, ce qui se traduit notamment par une multiplication des heures supplémentaires afin de rattraper les retards dans l'exécution des travaux.

Dans une lettre à Hydro-Québec du 9 avril 2010, M. Laprise évaluait les surcoûts encaissés par la compagnie sur le chantier en centaines de milliers de dollars.

L'intransigeance de « Rambo » déplorée par FGL

M. Laprise a raconté lundi comment l'entreprise Fernand Gilbert (FGL) a goûté à la médecine de Bernard Gauthier lors d'un contrat pour la construction de la route principale entre l'autoroute 138 et le chantier de La Romaine 2.

Il a expliqué que son entreprise avait pourtant embauché pour l'essentiel des travailleurs de la région affiliés à la FTQ-Construction. Mais cela n'a pas empêché le représentant syndical des opérateurs de machinerie lourde de lui faire des misères.

C'est que selon la philosophie de « Rambo », telle que décrite par M. Laprise, sur la Côte-Nord, les contremaîtres et les surintendants ne touchent à rien. Or, par deux fois, FGL suscitera la colère du syndicaliste pour avoir laissé un surintendant donner un simple coup de main à des travailleurs.

Le local 791 a ainsi reproché à un surintendant de FGL d'avoir aidé un camionneur à décrocher sa remorque puis donné un coup de main, quatre jours plus tard, à un second travailleur pour attacher des chaînes durant les premières semaines du chantier au printemps 2009.

Dans le premier cas, M. Laprise a eu la surprise de voir débarquer sur son chantier 30 personnes de la FTQ-Construction venues demander le renvoi du surintendant. Dans le second cas, « Rambo » l'a appelé et déversé sa colère dans le téléphone.

Chaque fois, c'est grâce à une photo prise par un travailleur que ces incidents avaient pu remonter aux oreilles de la FTQ.

M. Laprise soutient qu'il n'avait jamais eu affaire à lui avant 2009 et n'avoir sinon jamais connu une telle intransigeance en 40 ans sur un chantier de la Côte-Nord ou ailleurs au Québec, sinon lors d'un contrat sur le chantier Alouette.

Il soutient que le directeur général du 791 lui-même, Bernard Girard, aurait reconnu que « les gars ne voient pas la différence entre rendre service à quelqu'un et puis travailler »...

Le directeur des opérations de FGL a aussi donné l'exemple d'un travailleur FTQ d'expérience du Saguenay, pourtant présent sur le chantier avec l'aval de MM. Girard et Gauthier, qui a démissionné après trois semaines, épuisé par l'intimidation de travailleurs locaux à son endroit.

M. Laprise a aussi reproché à « Rambo » Gauthier de ne pas respecter la règle qui permet à un employeur de mettre à pied un travailleur qu'il juge incompétent, dans les 150 heures suivant son embauche. « Il t'oblige à le garder », déplore-t-il.

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