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Mexique: femmes miliciennes contre la criminalité

Mexique: femmes miliciennes contre la criminalité

Maria Ibarra cache dans son sac à main un petit pistolet calibre 25mm. Elle sait tout juste s'en servir, mais cette maîtresse de maison ne s'en sépare plus depuis qu'elle a rejoint les milices d'autodéfense pour combattre le groupe criminel qui a tué son fils.

"Je ne l'ai pas encore utilisé, mais je suis prête à tirer", assure cette robuste brune de 37 ans tandis qu'elle surveille l'entrée de Buenavista Tomatlan, l'une des premières communautés du Michoacan, à l'ouest du Mexique, à s'être armée contre le cartel des Chevaliers Templiers et à avoir constitué une milice d'autodéfense.

Fière d'être une des premières femmes à avoir participé à ce mouvement, Maria se souvient avec colère des actions criminelles des Templiers: racket, enlèvements, viols de femmes et de jeunes filles du village.

Mais elle ne trouve pas la force de parler de l'assassinat de son fils de 18 ans. "Ces gens-là ont fait beaucoup de mal à nos garçons", parvient-elle à prononcer.

Tandis qu'elle contrôle les voitures qui passent, Maria explique que sa tâche au sein des milices est aussi de s'assurer que la nourriture ne va jamais manquer pour le groupe. Il lui est arrivé aussi d'amener d'urgence des compagnons blessés à l'hôpital.

Son histoire est celle de centaines de femmes qui, sous la direction de leaders aguerris et médiatiques d'un mouvement éminemment masculin, appuient les milices en se chargeant de la nourriture, des vêtements et font aussi fonction d'infirmières.

Quelques-unes d'entre elles ont pris les armes, comme la "Comandante Bonita" (Commandante Belle), directrice d'une boutique de mode. Elle a accompagné les hommes dans les opérations d'expulsion des Chevaliers Templiers de plusieurs localités du Michoacan.

Parmi les miliciennes, certaines se sentent héritière des "soldates" ou "Adelitas" de la Révolution mexicaine déclenchée en 1910.

Des photos en noir et blanc immortalisent la légende des femmes qui montaient dans les trains pour accompagner les dirigeants révolutionnaires comme Emiliano Zapata ou "Pancho" Villa.

"Nous sommes une nouvelle génération d'Adelitas, c'est la même chose, c'est l'héritage que nous portons", dit avec fierté une milicienne de 47 ans de Tepalcatepec. Son groupe d'autodéfense a signé un pacte avec le gouvernement pour être incorporé dans un corps légal de sécurité, sous la responsabilité de l'armée.

Pour cette ancienne employée municipale, les hommes ont tendance à agir instinctivement, tandis que les femmes "sont motivées par la situation sentimentale, un besoin de protection, un sixième sens qui permet d'obtenir plus de résultats".

Bien qu'elle ne soient souvent entourées que par des hommes, les femmes assurent qu'elle se laissent pas impressionner et qu'elles se sentent partie du groupe. Même si, dans certains cas, la frontière avec la familiarité est mince.

"Parfois je me sens un peu harcelée, mais ça va, ils ne manquent pas de respect. Tant d'hommes, imaginez-vous, ils voient une femme et commencent les grosses plaisanteries", reconte Belinda Naranjo, une belle jeune femme de 27 ans, surnommée "Reine" et qui a participé à la prise de plusieurs municipalités.

Elle en avait assez des mauvais traitements de son ex-mari, membre des Templiers, des rackets et des menaces du cartel à l'encontre de sa famille. Reine est entrée dans une milice il y a cinq mois, en même temps que son frère, un mécanicien qui était obligé de réparer à titre grâcieux les voitures luxueuses des narcotrafiquants.

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