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Thaïlande: la justice interdit l'utilisation de la force contre les manifestants pacifiques

Thaïlande: la justice interdit l'utilisation de la force contre les manifestants pacifiques

La justice thaïlandaise a ordonné mercredi au gouvernement de ne pas utiliser la force contre les manifestants "pacifiques", au lendemain d'affrontements meurtriers entre la police et des protestataires qui réclament le départ de la Première ministre.

La décision du tribunal civil de Bangkok risque de compliquer la tâche du gouvernement de Yingluck Shinawatra qui se débat depuis plus de trois mois avec une crise qui a fait 16 morts, bien qu'il ait déjà promis d'éviter toute violence contre les militants.

La cour, saisie par l'opposition qui contestait la légalité de l'état d'urgence en vigueur à Bangkok depuis le 22 janvier, a décidé de ne pas révoquer cette décision.

Mais elle a en revanche ordonné au gouvernement de ne pas utiliser certaines provisions de cet état d'urgence, notamment l'interdiction de l'utilisation de certaines routes, et lui a interdit d'utiliser la force "pour détruire les sites de manifestation".

Un nouveau coup dur pour Yingluck après l'annonce mardi par la commission anticorruption de sa prochaine inculpation pour négligence en lien avec un programme controversé d'aides aux riziculteurs, procédure qui pourrait conduire à sa destitution.

"C'est une décision de la justice, nous devons la respecter", a commenté mercredi le chef du Conseil de sécurité nationale Paradorn Pattanatabut, notant que le gouvernement allait analyser l'étendue des limitations imposées par le tribunal civil.

Ce jugement complexe intervient au lendemain de violents heurts survenus lors d'une opération de la police anti-émeute pour reprendre certains sites occupés par les manifestants qui y campent depuis des semaines.

Des scènes de chaos avaient suivi des explosions et des tirs dans un quartier du centre historique de Bangkok, avant un retrait des forces de l'ordre.

Cinq personnes ont été tuées, dont un policier touché par balle, et plus de 60 blessées, selon le centre de secours Erawan.

Les manifestants ont accusé les forces de l'ordre d'être responsables des morts, mais les autorités ont assuré n'avoir utilisé que des balles en caoutchouc.

Le gouvernement avait jusqu'alors largement privilégié l'évitement entre police et manifestants pour empêcher des débordements, alors que la Thaïlande est hantée par la crise du printemps 2010 qui avait fait des dizaines de morts.

Les violences de mardi n'ont pas entamé la détermination des manifestants. Des milliers d'entre eux ont assiégé mercredi pendant quelques heures un complexe du ministère de la Défense utilisé ces dernières semaines par Yingluck en remplacement du siège du gouvernement bloqué par les protestataires qui réclament sa tête.

Mais la Première ministre ne semblait pas être à l'intérieur et les militants ont ensuite quitté le complexe.

"Si Yingluck vient encore travailler ici, nous reviendrons tous les jours", a toutefois promis leur meneur Suthep Thaugsuban, visé par un mandat d'arrêt pour insurrection.

La figure de proue du mouvement a même suggéré de chasser Yingluck du pays. "Nous la pourchasserons toute la journée jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus vivre ici", a-t-il lancé à ses partisans. "La contre-attaque contre Yingluck doit s'intensifier".

Les manifestants, dont le nombre s'est nettement réduit ces dernières semaines, réclament, outre le départ de Yingluck, la fin de l'influence de son frère Thaksin, ancien Premier ministre renversé par un coup d'État en 2006 et accusé de tirer les ficelles depuis son exil.

Depuis ce putsch, la Thaïlande est engluée dans des crises politiques à répétition faisant descendre dans la rue tour à tour ennemis et partisans de Thaksin.

La précédente crise en 2010 avait vu les "chemises rouges", fidèles au milliardaire, occuper le centre de Bangkok pendant deux mois pour réclamer la démission du gouvernement de l'époque, avant un assaut de l'armée. Bilan: plus de 90 morts et 1.900 blessés.

Les législatives anticipées du 2 février n'ont pas réussi à résoudre la crise actuelle. Les manifestants, qui veulent remplacer le gouvernement par un "conseil du peuple" non élu, ont en effet fortement perturbé le scrutin.

Aucun résultat n'a été annoncé en attendant de nouveaux votes, prolongeant le mandat d'un gouvernement aux pouvoirs limités et donc plus vulnérable, selon les analystes, à un nouveau "coup d'État judiciaire", dans un pays où la justice a déjà chassé deux gouvernements pro-Thaksin, en 2008.

tp-dr/abd/phv

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