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Lavillenie, petit par la taille, si haut par l'ambition

Lavillenie, petit par la taille, si haut par l'ambition

Il ressemble à un chic type, un homme ordinaire au physique pas forcément impressionnant. Mais Renaud Lavillenie est bien devenu samedi soir, à Donetsk, l'homme le plus haut du monde à force de passion et de refus de la défaite.

Champion olympique, champion du monde en salle, champion d'Europe (plein air et salle), il ne lui manque aujourd'hui, après sa défaite à Moscou l'an passé, que le titre de champion du monde en plein air.

Car il est désormais entré dans le gotha. Adoubé par le tsar lui-même, Sergueï Bubka, qui l'a pris dans ses bras énormes. Et par l'ancien numéro un français Jean Galfione, qui le couvre d'éloges. "Il est épatant. Il fait partie des gens dont on est incapable de donner les limites", a expliqué ce dernier à l'AFP samedi soir.

"Ca m'énervait quand on parlait de record du monde. On est vingt à avoir fait 6 m. Et pour tous, on disait que l'étape suivante était de devenir le dauphin de Bubka. Lui, il le fait", a-t-il souligné.

"Faire mieux que Bubka c'est comme aller plus vite qu'Usain Bolt, avoir de meilleures stats que Michael Jordan. Il détrône une légende".

Sûr de lui au point d'en paraître parfois hautain, Lavillenie s'est imposé à force de travail dans une discipline qui n'autorise aucun à-peu-près, notamment en cultivant sa vitesse de course et son explosivité, pour compenser un gabarit quelconque (1,77 m, 70 kg).

"Il n'est pas le plus fort, pas le plus grand, pas le plus rapide. Il fait 11 sec sur 100 m, rien d'exceptionnel. Mais avec une perche à la main, il devient fort", résume Galfione.

"Je suis animé par la perche purement par passion, pas par la destinée d'être champion et de vouloir gagner", assurait pour sa part l'athlète l'an passé.

Une passion qui court dans ses veines, et ce n'est même pas une image éculée. Car c'est bien là, la marque de fabrique de la famille Lavillenie, où l'on pratique la discipline de génération en génération. Il y avait le grand-père qui entraînait le père. Il y a de nos jours Renaud bien sûr, mais aussi Valentin, le petit frère, dernier de la finale à Moscou l'an passé avec trois échecs à 5,50 m.

Et quand d'autres font un simple barbecue en famille le dimanche après-midi, les Lavillenie, eux, l'agrémentent d'un dessert relevé, avec un concours de perche sur le sautoir installé dans le jardin de Renaud.

"Mon seul regret, c'est de ne pas avoir été là-bas pour vivre ce grand moment. Si on voulait entrer dans la légende c'est (à Donetsk) qu'il fallait faire, et il l'a fait", a réagi son père, Gilles Lavillenie, au micro de France 3 Poitou-Charente.

Hors de sa passion, Renaud a souvent du mal à se dévoiler plus intimement. "L'homme dans la vraie vie, c'est compliqué à décrire, je ne vais pas dire que je suis bordélique quand même", souriait-il en mai dernier à un journaliste de l'AFP, en pensant à ce que dirait sur le sujet sa compagne Anaïs Poumarat, perchiste également. "Alors on va dire que je suis plutôt joyeux, plutôt optimiste dans tous les domaines".

Il n'y a qu'à voir son visage se fermer les soirs de défaite pour comprendre que l'homme souffre terriblement dans ces - rares - moments. Un athlète qui ne manque jamais de rappeler sa fierté de représenter son pays, et qui est à l'opposé de ce qui a longtemps constitué le mal français : la peur de gagner.

Il n'est pas pour autant imperméable à la pression. Car sa victoire aux JO en 2012, dit-il, l'a libéré.

"Je suis plus détendu depuis. Avant les Jeux, il y avait la pression parce que je n'avais pas le droit de perdre. J'ai toujours eu confiance en moi, mais ça m'a permis de prendre plus d'assurance dans ce que je fais, de libérer les choses", reconnaît-il.

Prêt à sauter "au moins jusqu'en 2020", voire jusqu'aux JO-2024 s'ils ont lieu en France, Lavillenie a encore quelques années devant lui.

Pour enfin arracher ce titre mondial en plein air qui se refuse à lui. Et repousser encore les lois de la pesanteur.

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