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Les Etats-Unis sur le point d'adopter leur politique agricole pour cinq ans

Les Etats-Unis sur le point d'adopter leur politique agricole pour cinq ans

Le Congrès américain devrait adopter mardi sa politique d'aides agricoles pour la période 2014-2018, mais en tournant le dos aux principes de la politique agricole commune (PAC) de l'Union européenne.

Le Sénat doit voter mardi peu après 19H30 GMT sur une proposition de loi réorganisant les programmes de soutien aux filières agricoles américaines, qui a fait l'objet d'âpres négociations depuis 2012 entre démocrates et républicains. Le texte a déjà été adopté par la Chambre des représentants et a recueilli 72 voix contre 22 lundi au Sénat lors d'un vote de procédure.

Principale nouveauté: la suppression des aides directes aux cultivateurs, ces chèques aux montants "découplés" de la production réelle et qui étaient versés systématiquement chaque année, en fonction de la surface du champ, que celui-ci soit cultivé ou non.

L'Union européenne consacre la quasi-totalité de son budget agricole à ce type d'aides découplées, qui garantissent aux agriculteurs un revenu stable chaque année.

Mais aux Etats-Unis, les 5 milliards de dollars annuels ainsi distribués étaient politiquement difficiles à justifier depuis l'explosion récente des cours mondiaux, notamment des céréales. Les parlementaires américains ont décidé de mettre fin à l'expérience, débutée à la fin des années 1990.

"Cette loi constitue une étape majeure vers un changement de modèle, où nous mettons fin aux subventions et nous donnons aux exploitants les outils pour gérer leurs propres risques. Et nous les aidons", a expliqué lundi la sénatrice démocrate Debbie Stabenow, présidente de la commission Agriculture.

La loi gonfle en échange les systèmes d'assurance pour protéger les agriculteurs contre une baisse des cours, des rendements et même de leurs revenus annuels. Les primes d'assurance payées par les exploitations sont largement subventionnées par l'Etat fédéral: environ 60% de leur coût en moyenne.

"C'est un système où il sera très difficile pour un agriculteur de perdre de l'argent", analyse David Laborde, chercheur à l'Institut International de Recherche sur les Politiques Alimentaires (IFPRI), à Washington.

"On assure le revenu des agriculteurs", dit-il à l'AFP. "C'est l'objet final de la politique: un système où votre revenu ne baissera plus, il ne peut qu'augmenter".

Au total, l'enveloppe consacrée aux aides agricoles reste stable, à hauteur d'environ 20 milliards de dollars par an sur les cinq prochaines années. Au passage, la loi inclut aussi une légère révision à la baisse de l'énorme programme de bons alimentaires pour les Américains les plus pauvres ("food stamps", environ 76 milliards de dollars en 2018 contre 80 milliards en 2013).

Les grandes fédérations de cultivateurs (maïs, soja...) se sont félicitées du texte. Mais les ONG environnementales ont critiqué une demi-réforme.

"Même les exploitations les plus riches peuvent recevoir des subventions généreuses", dit à l'AFP Jason Rano, de l'Environmental Working Group, qui militait pour des plafonds stricts.

Pour certains spécialistes, les nouveaux systèmes d'assurance vont en outre inciter les agriculteurs à produire encore plus, ce qui rompt avec la philosophie des négociations commerciales menées sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et notamment des accords du Cycle d'Uruguay en 1994.

"Le but de l'Uruguay Round, c'est qu'on a le droit d'aider les producteurs mais en évitant de mettre le cirque sur les marchés", explique à l'AFP Jean-Christophe Bureau, auteur d'un rapport sur la politique agricole américaine pour le Parlement européen. "Les Etats-Unis ont assez peu de scrupules, il mettent en place des instruments qui sont des incitations à produire, qui isolent les producteurs des signaux de prix, ce qui en fait vraiment une assistance à la production, donc indirectement à l'exportation".

"Le système européen, c'est: vous touchez ce chèque tout le temps, bonnes ou mauvaises années", poursuit-il. "Ce sont des aides découplées qui n'influent pas sur les décisions de production, et qui sont plus dans l'esprit des accords de l'OMC".

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