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L'armée donne mandat à son chef Sissi pour briguer la présidence de l'Egypte

L'armée donne mandat à son chef Sissi pour briguer la présidence de l'Egypte

L'armée a donné mandat lundi à Abdel Fattah al-Sissi, son chef à peine promu maréchal, pour se présenter à l'élection présidentielle, une annonce sans surprise pour le nouvel homme fort de l'Egypte qui a destitué le président islamiste Mohamed Morsi.

Le gouvernement mis en place par M. Sissi, ministre de la Défense et vice-Premier ministre, depuis qu'il a déposé et fait arrêter le 3 juillet le seul président démocratiquement élu du pays, réprime implacablement et dans le sang toute manifestation de l'opposition, islamiste ou non, depuis sept mois.

Samedi, lors des célébrations du troisième anniversaire de la révolte qui chassa Hosni Moubarak du pouvoir, une cinquantaine de personnes ont été tuées lors de heurts entre manifestants et forces de l'ordre, l'ONU rappelant les forces de l'ordre à "leur devoir de respecter le droit de manifester pacifiquement".

Un haut-gradé a indiqué à l'AFP que le maréchal Sissi allait sous quelques jours quitter ses fonctions au sein de l'armée, la Constitution interdisant à un militaire de postuler pour la magistrature suprême. "Ensuite, il va préparer un programme" à appliquer s'il est élu, pour "unir le peuple, restaurer la sécurité et la position internationale de l'Egypte".

Dimanche, Adly Mansour, nommé président par intérim par le général Sissi le jour même de la destitution de M. Morsi, avait déjà marqué une première étape en annonçant que la présidentielle se tiendrait avant les législatives et ce dans les trois mois à venir. Ce calendrier semble taillé sur mesure pour que le maréchal, de loin l'homme le plus populaire du pays, non seulement l'emporte aisément mais s'assure aussi une majorité au Parlement qui sera élu après lui, selon les experts.

Lundi, le président Mansour n'avait plus qu'à promouvoir Sissi maréchal, le plus haut grade de l'armée, un titre présenté par les experts et son entourage comme un hommage appuyé et un "au revoir" de l'armée à son héros.

Quelques heures après, sous la présidence de Sissi, le haut-commandement de l'armée se réunissait pour étudier "la demande du peuple" réclamant le maréchal comme président et lui donnait mandat pour le faire, selon l'agence officielle Mena.

Au-delà des impératifs constitutionnels, pour Karim Bitar, spécialiste du Moyen-Orient, la promotion au grade le plus élevé de l'armée est "une étape supplémentaire dans la construction politique et médiatique du mythe du sauveur, du héros et de l'homme providentiel".

Par ailleurs, note ce directeur de recherche à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), cette distinction, extrêmement rare, intervient alors que les autorités dirigées de facto par l'armée répriment dans un bain de sang les partisans islamistes de M. Morsi.

"D'ordinaire, cette distinction n'est octroyée qu'après une grande victoire militaire. Ce qui signifie que l'on a considéré que la répression actuellement en cours et la +guerre contre le terrorisme+ valaient un triomphe sur le champ de bataille", affirme-t-il.

Depuis sept mois, plus de 1.000 manifestants pro-Morsi ont péri dans l'implacable répression menée par policiers et soldats, tandis que des milliers d'islamistes ont été arrêtés, dont la quasi-totalité de la direction des Frères musulmans, l'influente confrérie de M. Morsi qui avait remporté toutes les élections depuis la révolte de 2011.

Depuis, les leaders du mouvement islamiste sont, comme M. Morsi, jugés et encourent la peine de mort. Fin décembre, la confrérie islamiste a en outre été déclarée "organisation terroriste", après un attentat meurtrier contre la police pourtant revendiqué par un groupe jihadiste basé dans le Sinaï.

Cette péninsule désertique est depuis l'éviction de Morsi le théâtre quotidien d'attaques contre les forces de l'ordre qui ont perdu des dizaines d'hommes en sept mois. Samedi, le même groupe jihadiste, Ansar Beit al-Maqdess, qui dit s'inspirer d'Al-Qaïda, a affirmé y avoir abattu un hélicoptère de l'armée.

Et les attaques, notamment à la voiture piégée, ont gagné jusqu'au coeur du Caire, secouée par cinq explosions ce weekend.

"Je comprends que les gens veulent Sissi comme candidat. Ils ont peur pour leur sécurité et réclament un homme fort", explique Alfred Raouf, cadre du parti libéral Al-Dostour qui a soutenu l'éviction de M. Morsi.

Mais, dit-il, "j'aurais préféré une élection présidentielle opposant des candidats civils pour mettre en place une démocratie civile".

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