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Malgré le geste d'Erdogan, la polémique sur la réforme judiciaire continue en Turquie

Malgré le geste d'Erdogan, la polémique sur la réforme judiciaire continue en Turquie

La volonté du gouvernement turc de renforcer son contrôle sur la justice, en plein scandale de corruption, a continué à susciter la polémique mercredi, sur fond de rivalités croissantes entre le président Abdullah Gül et le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.

Malgré le geste d'ouverture accompli mardi par M. Erdogan, ses principaux rivaux ont encore tiré à boulets rouges contre son projet de réforme du Haut-conseil des juges et procureurs (HSKY), qu'ils jugent contraire à la Constitution.

"Un juge ne peut pas porter l'étiquette d'un parti politique. La justice doit être impartiale et indépendante (...) c'est une règle universelle de l'État de droit", a estimé le chef du principal parti d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP), Kemal Kiliçdaroglu.

Encore plus catégorique, l'ultranationaliste Parti pour un mouvement populaire (MHP) a balayé d'un revers de main l'idée-même d'un amendement constitutionnel sur l'organisation judiciaire du pays.

"Un tel projet aurait pour effet de gêner les institutions judiciaires pour tenter d'étouffer l'enquête en cours", a tranché le vice-président du MHP Oktay Vural.

Mardi, le Premier ministre avait offert de "geler" son texte de loi, qui veut donner le dernier mot au ministre de la Justice dans les nominations de magistrats, en échange du feu vert de l'opposition à une réforme constitutionnelle de l'institution judiciaire.

Toujours fidèle à sa ligne modérée, le président Abdullah Gül, qui s'efforce depuis lundi de jouer les médiateurs, a plaidé pour la négociation.

"Un compromis entre le parti au pouvoir et l'opposition favoriserait l'éclosion d'un climat favorable dans le pays et démontrerait à tous, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, que nos problèmes sont réglés ans un cadre démocratique", a-t-il déclaré mercredi.

Malgré le refus de l'opposition, le vice-Premier ministre Bülent Arinç a répété que son gouvernement était prêt à retirer son texte, toujours en discussion devant une commission parlementaire. En cas "d'accord d'ici la fin de cette semaine, alors la réforme du HSYK sera retirée de notre calendrier", a-t-il promis mercredi.

Ce projet de réforme a suscité de nombreuses mises en garde à l'étranger, notamment de la part de l'Union européenne et des États-Unis.

Le commissaire européen à l'Élargissement Stefan Füle a ainsi redit au ministre turc des Affaires européennes Mevlut Cavusoglu que l'UE attendait "de tout changement dans le système judiciaire qu'il ne remette pas en cause les engagements de la Turquie" en tant que candidat à l'intégration, a indiqué à l'AFP son porte-parole Peter Stano.

Malgré son ouverture, M. Erdogan refuse de baisser la garde face à ses adversaires de la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen, qu'il accuse de manipuler l'enquête anti corruption qui vise ses proches pour le déstabiliser, à la veille des élections municipales du 30 mars et présidentielle d'août 2014.

Depuis le 17 décembre, plusieurs dizaines de patrons, hommes d'affaires et élus proches du régime ont été inculpés ou incarcérés pour corruption, blanchiment et fraude.

Lors d'un discours devant les ambassadeurs turcs à Ankara, le Premier ministre a remis de l'huile sur le feu en dénonçant les "dangers" de "l'empire de la peur" imposé par l'organisation de M. Gülen, très influente dans la police et la justice.

Mercredi, la presse a rapporté que six nouveaux hauts responsables de la police d'Ankara avaient été démis de leurs fonctions et que plusieurs centaines d'autres avaient été mutés. Depuis un mois, les purges imposées par le pouvoir ont coûté leur place à plus d'un millier d'officiers de la sûreté nationale, ainsi qu'à de nombreux magistrats.

Dans ce climat délétère au sein de la majorité islamo-conservatrice au pouvoir depuis 2002, le président turc, réputé proche de la confrérie Gülen, apparaît de plus en plus comme un recours, voire un rival potentiel du Premier ministre.

Depuis un mois, il profite de toutes ses sorties publiques pour prendre ses distances avec les positions intransigeantes de M. Erdogan, défendant l'État de droit ou réclamant un changement de la politique turque en Syrie.

Interrogé sur son intention de briguer un nouveau mandat à la tête de l'État, M. Gül a répondu mercredi qu'il était "encore trop tôt".

bur-pa/ai

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