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La chimère éléphant explique pourquoi il n'y a pas d'os dans le requin

La chimère éléphant explique pourquoi il n'y a pas d'os dans le requin

Une équipe internationale de chercheurs a décodé le génome d'une étrange créature des mers, la chimère éléphant, et découvert pourquoi les requins ont un squelette cartilagineux et non osseux, selon une étude publiée mercredi dans la revue Nature.

Cette découverte pourrait avoir d'importantes implications dans la compréhension de maladies des os chez l'homme, telle que l'ostéoporose.

Car ce n'est pas tant l'aspect inhabituel de ce poisson aussi appelé requin éléphant (Callorhinchus milii) ou masca laboureur, doté entre autres bizarreries d'un appendice nasal faisant penser à une trompe, qui intéresse les scientifiques, que sa place dans l'arbre de l'évolution.

Avec ses cousins, les requins, raies et chimères, cet animal qui semble sortir d'un film de science-fiction, fait partie des plus vieux vertébrés à mâchoires (gnathostomes) vivants aujourd'hui. Mais, tout comme les requins et les raies, il possède un squelette cartilagineux et non osseux.

L'équipe menée par Byrappa Venkatesh, de l'Agence pour la science, la technologie et la recherche (A*STAR) de Singapour, a choisi de séquencer le génome de la chimère éléphant parce que c'est le génome le plus petit parmi le millier d'espèces de poissons cartilagineux connus. Il fait un tiers de la taille du génome humain.

Ce poisson blanc nacré vit dans les eaux froides de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, entre 200 et 500 mètres de profondeur. Il utilise son curieux appendice nasal pour déloger des crustacés au fond de l'océan et peut mesurer 1,2 mètre. Il a été décrit pour la première fois en 1823, par Jean-Baptiste Bory de Saint-Vincent, naturaliste et géographe français.

"Nous avons maintenant l'empreinte génétique d'une espèce considérée comme une aberration essentielle pour comprendre l'évolution et la diversité des vertébrés osseux, y compris les humains", a expliqué un des chercheurs de l'équipe, Wesley Warren (Ecole de médecine de l'Université de Washington).

"Bien que les vertébrés cartilagineux et les vertébrés osseux ont divergé il y a environ 450 millions d'années, avec le génome de la chimère éléphant, nous pouvons commencer à identifier les adaptations génétiques clés dans l'arbre de l'évolution", a-t-il poursuivi.

En comparant le génome de la chimère éléphant avec celui d'autres vertébrés, dont l'homme, les chercheurs ont ainsi identifié une famille de gènes absente chez l'étrange créature, mais présente chez tous les vertébrés osseux, du poulet à l'homme en passant par la vache ou la souris.

Lorsqu'ils ont fait l'expérience de supprimer un gène de cette famille chez le poisson-zèbre, ils ont observé une réduction de la formation osseuse, montrant son importance dans la fabrication des os.

Les chercheurs ont par ailleurs eu la surprise de découvrir que la chimère éléphant semble dépourvue de certains types de cellules immunitaires, en particulier les corécepteurs CD4, pourtant essentielles pour lutter contre les infections virales et bactériennes et pour prévenir des maladies auto-immunes telles que le diabète et l'arthrite rhumatoïde chez l'homme.

Ils ont aussi établi que le génome de la chimère éléphant a l'évolution la plus lente parmi tous les vertébrés, y compris le coelacanthe, ce poisson mythique des grandes profondeurs que l'on a longtemps cru disparu, souvent considéré comme un "fossile vivant".

"L'analyse du génome complet de la chimère éléphant apporte un nouvel éclairage sur le mécanisme de formation des os et l'origine de l'immunité adaptative", qui fournit aux organismes une réponse plus sophistiquée aux agents pathogènes, soulignent les chercheurs.

vm/pjl/nm

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