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L'Irak doit choisir entre réconciliation et guerre civile (experts)

L'Irak doit choisir entre réconciliation et guerre civile (experts)

L'intensification de la révolte dans une province sunnite d'Irak place le gouvernement, dominé par les chiites, face à un choix critique entre la réconciliation et la guerre civile, selon des experts.

Le Premier ministre Nouri al-Maliki doit décider dans les prochains jours entre proposer un partage réel du pouvoir à la minorité sunnite ou poursuivre la politique de marginalisation et de répression.

"Les prochains jours vont déterminer le sort de l'Irak", estime Ihsan al-Shammari, professeur de science politique à l'Université de Bagdad.

"Le pays se trouve à la croisée des chemins: une réconciliation sous la forme d'un Etat démocratique ou un éclatement dans le chaos total et la guerre civile", explique-t-il.

Selon lui, soit il y aura "un Irak démocratique où chacun sera égal", soit "nous nous dirigeons vers l'abysse".

Le mécontentement augmente depuis des années parmi les sunnites, qui se sentent exclu des sphères du pouvoir et stigmatisés par les forces de sécurité, aux méthodes souvent brutales.

Depuis décembre 2012, ce mécontentement s'exprimait en particulier dans des camps de protestations établis dans plusieurs régions où les sunnites sont majoritaires. Mais la décision de M. Maliki de démanteler le 30 décembre le principal de ces camps, près de Ramadi, a mis le feu aux poudres.

Des combattants sunnites de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL, lié à Al-Qaïda) ont pris le contrôle de Fallouja et d'une partie de Ramadi, à 60 et 100 km à l'ouest de la capitale.

Et l'assaut que les autorités annoncent désormais pour reprendre Fallouja ravive le souvenir des deux batailles que les forces américaines ont menées en 2004 contre les insurgés dans ces mêmes rues, au prix de très lourdes pertes.

"Les cellules d'Al-Qaïda les plus actives et les plus importantes sont maintenant tout près de Bagdad, à cause d'une erreur de jugement du gouvernement, qui est en train d'entraîner l'Irak vers l'inconnu", estime Issam al-Faili, professeur de science politique à l'Université Mustansiriyah à Bagdad.

Le pays risque désormais de connaître "une augmentation des crises, et des divisions sociales plus profondes et plus dangereuses", prévient-il.

Englué dans des "crises politiques continuelles", le gouvernement n'a pas vu "le tsunami qui arrivait, le tsunami de l'EIIL", regrette l'expert.

Les autorités irakiennes attribuent à l'EIIL l'essentiel des violences récentes à Anbar, même si des hommes de tribus opposés au gouvernement ont également été impliqués dans les combats.

Au faîte de leur influence après l'invasion américaine de 2003, les fidèles d'Al-Qaïda en Irak ont subi de sérieux revers à partir de la fin 2006.

Mais avec l'EIIL, le réseau a réussi un retour fracassant dans le pays, en s'appuyant sur ses liens avec la Syrie, où le groupe est devenu un acteur majeur du conflit.

"L'EIIL a réussi à tirer profit de ses réseaux et de ses capacités en Irak pour avoir une présence forte en Syrie, et il a utilisé sa présence en Syrie pour renforcer ses positions en Irak", expliquait dimanche Daniel Byman, un expert au Brookings Institution's Saban Center for Middle East Policy.

L'Irak a déjà connu un sanglant conflit inter-confessionnel, dont le pays a émergé en 2008, quand les forces américaines, encore présentes en nombre, ont réussi à rallier les tribus sunnites contre Al-Qaïda.

Pour les experts, le gouvernement Maliki doit employer la même tactique pour empêcher l'Irak de sombrer.

La minorité sunnite ayant dominé le pays jusqu'à l'invasion américaine en 2003, le sentiment de dépossession qu'elle a ensuite ressenti a été l'un des principaux facteurs de l'insurrection dans les années suivantes.

Il a aussi alimenté le mécontentement qui a fait remonter en 2013 les violences au niveau de 2008, et à Bagdad même, la décision de M. Maliki de démanteler le camp de Ramadi a provoqué la démission de 44 députés.

Pour M. Shammari, il faut maintenant que "les autorités se concentrent sur les sunnites modérés pour les attirer au gouvernement" et leur donner un rôle majeur au niveau fédéral.

"Les sunnites sont ceux qui vont déterminer le sort de l'Irak", insiste-t-il.

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