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Bangladesh: un "tigre émergent" affaibli par l'instabilité politique

Bangladesh: un "tigre émergent" affaibli par l'instabilité politique

Le Bangladesh, où ont lieu des législatives dimanche, paie au prix fort les effets de la crise politique avec sa litanie de grèves et de violences qui nuisent aux exportateurs et sapent la confiance dans ce pays parmi les plus pauvres du monde.

Huitième Etat le plus peuplé avec 154 millions d'habitants, le Bangladesh affiche depuis cinq ans des taux de croissance proches ou supérieurs à 6% avec un impact immédiat sur l'indice de pauvreté qui a simultanément reculé de deux points de pourcentage (actuellement autour de 31%).

Les législatives de dimanche devaient permettre au Bangladesh de renforcer sa crédibilité démocratique alors que son Histoire est jalonnée de coups d'Etat et d'assassinats politiques depuis sa séparation d'avec le Pakistan en 1971.

Mais l'opposition boycotte le scrutin et ses partisans ont attaqué une centaine de bureaux de vote. Les violences ont fait 150 morts depuis octobre.

Le "tigre émergent", selon l'expression de Goldman Sachs, risque de basculer davantage dans la violence, avec toutes les conséquences économiques que cela implique.

"Nous voyons déjà un effet négatif sur l'économie (...) qui pourrait causer des pertes irréversibles à long terme", prévient Mustafizur Rahman, directeur du centre de réflexion Centre for Policy Dialogue à Dacca.

"Les exportations, l'approvisionnement des agriculteurs en engrais, la distribution de biens et d'articles, le pouvoir d'achat des consommateurs, tout cela est durement touché", détaille-t-il.

Les clients étrangers, eux, deviennent frileux même si, sur l'année, les exportations totales ont crû de plus de 10%.

"Les nouvelles commandes à l'exportation ralentissent", faisant automatiquement augmenter les coûts de production, observe M. Rahman.

Le Bangladesh a enregistré 71 jours de grèves générales et de blocages depuis le début 2013.

Privés de tranport, les fermiers ont dû jeter leur lait et laisser pourrir leur récolte, faisant flamber les prix alimentaires dans les villes "assiégées" par les manifestants.

La croissance de la production agricole s'est ralentie à 2,2% en 2013 après 3,1% en 2012, selon la Banque mondiale.

L'un des secteurs les plus touchés est celui de la confection, dont le Bangladesh est le numéro deux mondial, derrière la Chine. Ses exportations représentent 80% des exportations totales.

La Chambre de commerce et d'industrie de Dacca a estimé le coût de la crise supporté par le secteur privé à plus de 4 milliards de dollars (2,95 milliards d'euros), dont 1 milliard pour les seules entreprises du textile.

Une catastrophe pour un secteur déjà fragilisé par l'effondrement en avril 2013 du Rana Plaza, un immeuble de neuf étages abritant des ateliers de confection près de Dacca. L'accident a fait au moins 1.135 morts et entraîné une série de grèves pour de meilleures conditions de travail.

Les salaires ont été augmentés de 76% mais un employé du textile ne gagne en moyenne que 5.300 taka par mois (67 dollars).

"Les troubles politiques ont affaibli le secteur", assène Shahidullah Azim, vice-président de la fédération patronale du textile bangladais, qui constate le retrait d'acheteurs étrangers lassés par les crises à répétition.

"Le salaire minimum pour les travailleurs a été augmenté alors que les commandes diminuent. Nous craignons que beaucoup d'entreprises ne soient plus capables de payer les salaires", ajoute M. Azim.

Dans son dernier discours de campagne, la Première ministre Sheikh Hasina s'est engagée à faire du Bangladesh un "pays à revenu intermédiaire" d'ici la fin de la décennie et à résoudre ses pénuries d'électricité chroniques.

Un pari audacieux tant les conjonctures nationale et internationale sont incertaines.

Dans un rapport publié en décembre, le Fonds monétaire international (FMI) estimait que la croissance bangladaise allait ralentir à 5,5% en 2014, son rythme le plus lent depuis dix ans, après 6,2% en 2012 et 6,0% en 2013 (Banque mondiale).

"L'économie se heurte à l'instabilité politique, les troubles sociaux et la transition dans la confection", indiquait le Fonds.

Même constat de la Banque mondiale dont les études montrent que si le Bangladesh, l'un des 49 pays les plus pauvres de la planète (PMA), bénéficie d'une croissance soutenue et régulière, celle-ci n'est pas aussi rapide que dans le reste de l'Asie du Sud.

kk/co/gab/pt

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