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Liban: obsèques d'un ex-ministre critique de Damas, le Hezbollah conspué

Liban: obsèques d'un ex-ministre critique de Damas, le Hezbollah conspué

Mohammad Chatah, ex-ministre hostile au régime syrien et au Hezbollah, assassiné dans un attentat, a été enterré dimanche à Beyrouth lors d'obsèques sous haute sécurité marquées par de violentes diatribes contre le parti chiite.

"Hezbollah, ennemi de Dieu!", "Hezbollah terroriste!", ont scandé les centaines de personnes participant aux funérailles de M. Chatah, un des cerveaux de la coalition dite du 14 mars, hostile à Damas et qui a accusé le parti chiite d'être derrière son meurtre.

L'assassinat de cette personnalité considérée comme modérée a exacerbé la division déjà profonde au Liban entre partisans et détracteurs du régime syrien, mais aussi les tensions entre chiites menés par le Hezbollah et sunnites représentés par l'ex-Premier ministre Saad Hariri.

Le meurtre a également ravivé la crainte d'une reprise des assassinats ciblés: Mohammad Chatah est la 9e personnalité libanaise hostile au pouvoir syrien et au parti chiite à être assassinée depuis 2005, en plus de trois responsables de sécurité et de l'armée.

Pendant les funérailles, la coalition a eu des mots très durs à l'égard du Hezbollah, s'engageant à "libérer" le pays de son arsenal "illégitime", principal pomme de discorde entre les deux camps. Le Hezbollah affirme vouloir garder ses armes pour lutter contre Israël, son ennemi juré.

"Nous avons décidé de libérer le pays de l'occupation des armes illégitimes", a lancé Fouad Siniora, un des ténors de la coalition dite du 14 mars.

Au milieu des pleurs, le cortège funèbre de l'ex-ministre des Finances et de son garde du corps est arrivé en matinée à la mosquée Mohammad al-Amine dans le centre-ville, à quelques centaines de mètre du lieu de l'attentat qui a fait huit morts, selon un nouveau bilan.

"Anwar Badaoui", la 8e victime, "est mort de ses blessures dimanche", a indiqué l'Agence nationale d'information.

"Le martyr est le bien-aimé de Dieu", ont crié les centaines de personnes rassemblées en face de la mosquée, dont le périmètre a été bouclé par des barbelés, sous la surveillance de nombreux véhicules de l'armée et des services de sécurité.

"Le martyr de la modération", proclamaient des panneaux arborant un portrait de Mohammad Chatah, mort à 62 ans.

Cet ancien ambassadeur à Washington et employé du FMI a été inhumé dans un mausolée adjacent à la mosquée et où est enterré Rafic Hariri, ex-Premier ministre assassiné en 2005 dans un attentat qui avait plongé le Liban dans l'instabilité.

A l'intérieur de la mosquée, les deux fils du défunt se tenaient près du cercueil de leur père, en état de choc.

Plusieurs véhicules de l'armée étaient déployés à Beyrouth, et les voitures ont été interdites de stationnement dans les environs du centre.

Dans la foule venue dire un dernier adieu à M. Chatah, la colère était vive à l'égard du Hezbollah et de la Syrie, ancienne puissance de tutelle pendant 30 ans au Liban.

"La Syrie et ses alliés au Liban, notamment le Hezbollah, sont ceux qui ont assassiné Chatah, ils ne veulent pas que ce pays soit tranquille", a lancé Youssef, instituteur.

Pointé du doigt, le mouvement chiite avait dénoncé le meurtre, tandis que Damas a démenti toute implication.

De confession sunnite, Mohammad Chatah était considéré comme une personnalité laïque et modérée.

Son meurtre a toutefois ravivé la tension notamment au sein de la communauté sunnite, qui se sent visée par le parti chiite.

"Je suis venu avec mes enfants pour leur montrer comment les sunnites font l'objet d'une injustice", expliquait Salaheddine Ahmad, père de sept enfants.

Aux obsèques d'une autre victime, Mohammad al-Chaar, le mufti sunnite de la République, considéré par la rue comme conciliant à l'égard du Hezbollah, a été bloqué à l'intérieur de la mosquée pendant trois heures par une foule en colère avant qu'une force spéciale de la police ne parvienne à l'évacuer.

L'assassinat de Mohammad Chatah intervient également alors que le Liban n'a plus de gouvernement depuis huit mois, en raison des profondes rivalités. Samedi, la coalition du 14 mars a réclamé un gouvernement sans le Hezbollah, qu'elle accuse d'être une "machine à tuer".

Le président de la République, Michel Sleimane, qui devait tenir un point de presse pour parler de la formation du gouvernement, l'a finalement annulé et annoncé dans une allocution une aide saoudienne à l'armée libanaise.

bur-ram/cbo

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