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Les "barras bravas", acteurs ultras violents des stades latino-américains

Les "barras bravas", acteurs ultras violents des stades latino-américains

Les violences des supporteurs latino-américains ont encore fait des ravages cette année, polarisant l'attention des autorités sur les "barras bravas", groupes d'ultras très organisés, générateurs de revenus et parfois au centre d'enjeux politiques.

Pour le seul Brésil, l'année 2013 a déploré la mort de 30 personnes dans des violences liées au football, soit seulement une de moins que le record de 2011. Un constat préoccupant à quelques mois de la Coupe du monde, en juin et juillet prochains.

Début décembre, une bagarre lors d'un match du Championnat du Brésil, survenue deux jours après le tirage au sort des poules du Mondial, avait fortement marqué les esprits. Des images montraient des personnes ensanglantées gisant au sol et sur lesquelles s'acharnaient leurs agresseurs.

En Argentine, également réputée pour être le théâtre de fréquentes violences dans les stades, neuf personnes ont été tuées après les 12 de 2012, conduisant les autorités à annuler jusqu'à nouvel ordre les déplacements des "hinchas" ("supporteurs", ndlr) à l'extérieur.

Il y a à peine dix jours, deux supporteurs du club argentin des Newell's Old Boys, l'équipe du franco-argentin David Trezeguet, ont été tués par balles par un partisan du club rival de Rosario Central.

D'autres décès ont été enregistrés en Colombie, au Paraguay et au Pérou, ainsi que des blessés en Uruguay, en Equateur et au Chili.

Pour le sociologue uruguayen Leonardo Mendiondo, le football latino-américain est "une vitrine" de la violence sociale du continent, qui frappe les exclus de la croissance de ces vingt dernières années.

Mais nombre d'observateurs relèvent que ces violences sont souvent planifiées et coordonnées par les "barras bravas", ou "torcidas organizadas" au Brésil. Ces groupes de supporteurs ultras, connus pour l'ambiance indescriptible qu'ils impriment à certaines rencontres, recrutent en marge de la société et offrent un mode d'expression à des jeunes en situation d'exclusion.

"Ils se défoulent et se déconnectent du système social à travers le football", explique Andres Parra, sociologue à l'Université centrale du Chili, soulignant le fonctionnement "tribal" de groupes auxquels les membres se dévouent corps et âme.

Aldo Panfichi, sociologue de l'Université catholique du Pérou, évoque quant à lui "l'expression de problèmes profonds" via la "soupape sans restriction" que représentent ces quelques heures passées autour et dans le stade chaque week-end, avec drogue et alcool en toile de fond.

Les autorités sont à la peine et les interdictions d'accès aux stades, le renforcement de la présence policière, et l'identification des supporteurs n'ont pour l'heure pas donné les résultats escomptés.

Au Brésil, le sociologue Mauricio Murad en vient même à évoquer "un risque" pour les supporteurs étrangers pendant le Mondial.

Facteur aggravant dans certains pays comme l'Argentine, ces blocs de supporteurs peuvent parfois jouir d'une véritable impunité. Voire de la bienveillance de certains politiciens soucieux de gagner en influence, ou de présidents de clubs conscients de leur capacité de nuisance.

"Les dirigeants ont joué avec le feu en offrant des entrées et davantage de pouvoir aux barras bravas", souligne Andres Parra, affirmant que "des délinquants des +barras+ se sont appropriés le spectacle jusqu'à mettre en place des réseaux de chantage et d'extorsion de dirigeants et de joueurs".

Les très redoutées "barras bravas" des grands clubs rivaux de Buenos Aires - Boca Juniors et River Plate - sont ainsi devenues de véritables organisations autonomes, générant des revenus avec la vente de billets, de maillots ou de boissons autour des stades.

Selon une enquête de la chaîne de TV argentine C5N, la "barra brava" de River Plate récolte chaque année plus d'un million de dollars avec la vente de billets du célèbre stade Monumental.

En Argentine comme ailleurs, des leaders de ces blocs ont connu la prison pour violences dans les stades, mais aussi pour extorsion, trafic de drogue ou agressions plus ciblées, alimentant encore les soupçons d'instrumentalisation par certains politiques.

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