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Afrique du Sud: l'extrême-droite blanche attend toujours l'apocalypse post-Mandela

Afrique du Sud: l'extrême-droite blanche attend toujours l'apocalypse post-Mandela

Les "prophéties" de l'extrême-droite blanche sud-africaine annonçant un déchaînement apocalyptique de violence des Noirs contre les Blancs après la mort de Nelson Mandela restent tenaces, trois semaines après la mort du premier président noir du pays.

Depuis la transition politique pacifique en 1994 d'un régime d'apartheid à un régime démocratique et multiracial, les Sud-Africains blancs d'extrême-droite affirment que la mort de Mandela marquera le début d'une apocalypse raciale, qualifiée de "Nuit des longs couteaux" (en référence à la purge perpétrée en Allemagne au sein du parti nazi en 1934) ou "Uhuru" (liberté en swahili).

Ce courant extrémiste représente toutefois une minorité au sein de la communauté afrikaner, qui forme environ la moitié des 9% de Sud-Africains blancs.

La crainte de cette minorité s'est toutefois propagée dans le débat public. Certains ont préparé des plans d'évacuation, des émissions de radio ont débattu sur sa probabilité et un journaliste a même visité la ville où les Blancs se réfugieraient dans l'éventualité d'une menace de massacre.

Lorsque Mandela est mort, le 5 décembre dernier, ces prévisions catastrophiques sont restées sans effet, même après son enterrement 10 jours plus tard.

Mais, pour certains, l'apocalypse a simplement été repoussée.

"Ils sont sûrement en train de comploter quelque chose. Ça ne se passera pas en une nuit, mais ça se fera graduellement", a affirmé Neil, 40 ans, à Pretoria au cours d'une visite récente du monument aux Voortrekker, symbole du nationalisme afrikaner.

L'importance de cette peur d'un massacre inéluctable des Blancs, dans l'imaginaire de certains, remonte à l'installation des premiers colons hollandais et français huguenots au 17e siècle sur les terres sud-africaines.

Plus tard, dans la foulée de la Seconde Guerre des Boers au début des années 1900, cette crainte a été propagée par Nicolaas van Rensburg, dont les "prophéties" font l'objet d'un culte au sein de groupes afrikaner radicaux.

Nicolaas van Rensburg était un fermier dont la seule lecture était la Bible, et qui ne savait écrire que son propre nom.

Il aurait, selon ses adeptes, prédit la Seconde Guerre Mondiale et l'émergence d'un dirigeant noir, que certains ont reconnu en Mandela.

Baptisé le "siener", ou le "voyant" dans la langue afrikaans, Nicolaas van Rensburg a eu plusieurs visions que sa fille et ses amis ont recopié dans des carnets, qui se trouvent aujourd'hui dans un musée culturel historique dans la ville de Lichtenburg (nord-ouest).

Sa vision, en 1915, d'un "cercueil déposé dans une tombe, dont sortent plusieurs feux dans un grand brasier", a été depuis interprétée comme signifiant une insurrection après la mort de Mandela.

Ces prophéties ont été adoptées par le groupe terroriste blanc, le "Boeremag" ou "Force Boer" (Boers: descendants des colons hollandais), qui était déterminé à tuer Mandela et a planifié un coup d'état à la fin des années 1990 et au début des années 2000.

Un membre du groupe, qui a témoigné contre ses 20 camarades pendant leur procès en octobre 2013, a expliqué comment les prophéties de M. van Rensburg étaient utilisées pour recruter des membres.

Après avoir assassiné Mandela, le Boermag avait prévu d'utiliser la révolte qui s'ensuivrait comme prétexte pour mener des représailles contre les Noirs.

A la mort de Mandela, l'organisation d'extrême-droite "Suidlanders" a suggéré que ses membres partent "en vacances" pour être en sécurité.

Sur son site Internet, le groupe liste les biens essentiels à amener dans une situation d'urgence, dont des conserves, la Bible, un sac à dos et des tampons afin d'"endiguer le saignement de blessures ouvertes".

Un texto envoyé en chaîne le lendemain de la mort de Mandela annonçait la date du massacre final au 16 décembre, lorsque les Afrikaners seraient "détendus et en vacances".

Ils célèbrent ce jour-là la victoire de leurs ancêtres contre les Zulus à la bataille de Blood River en 1838.

"La perte de pouvoir en 1994 était difficile pour ces personnes", analyse Fransjohan Pretorius, professeur d'histoire à l'Université de Pretoria.

"A l'époque, ils vivaient comme dans un rêve, ils préfèrent continuer à vivre dans ce rêve".

jcm/arb/sr/jpc/aub

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