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Rhinocéros de Java: le refuge de la dernière chance

Rhinocéros de Java: le refuge de la dernière chance

Ils ne sont plus qu'une cinquantaine et beaucoup les considèrent condamnés à la disparition : pourtant, un nouveau refuge en Indonésie fait le pari de sauver les derniers rhinocéros de Java.

Sur un chemin de brousse surmontant des rizières sur l'île de Java, le rhinocéros le plus rare de la planète a laissé une empreinte dans la boue et des traces de morsures dans l'épais feuillage.

C'est très souvent tout ce qui pourra être aperçu du rhinocéros de Java : l'espèce comptait jadis des milliers de membres, jusqu'en Inde et en Chine, mais le braconnage et la déforestation ont eu raison du pachyderme.

Aujourd'hui considéré comme le plus rare des grands mammifères de la planète, le rhinocéros de Java ne compte plus qu'une cinquantaine d'individus, retranchés dans le parc Ujung Kulon, dans l'extrême ouest de Java.

L'espèce "livre sa dernière bataille", estime l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), première organisation environnementale mondiale créée en 1948.

C'est pour l'aider à gagner que les autorités indonésiennes, après des années d'atermoiements, ouvriront en mars un refuge de 5.100 hectares dans le parc Ujung Kulon, une des rares forêts primaires encore préservées en Indonésie et classée patrimoine mondial par l'Unesco.

"Nous espérons que ce refuge va accélérer la reproduction et mener à un plus grand nombre de naissances", a indiqué à l'AFP le responsable du parc, Moh Haryono.

"Dans un espace plus clos, les mâles et les femelles ont plus d'opportunités pour s'accoupler", explique-t-il.

Les rhinocéros de Java, reconnaissables aux plies de leur peau qui forment comme une cuirasse, occupaient déjà le parc mais ils se cantonnaient jusqu'alors à une petite partie, cernés par l'activité humaine.

Le refuge va constituer une plus grande zone, interdite à l'homme. Les paysans vivant dans cet endroit ont été relocalisés.

Le refuge est géré par l'Etat indonésien mais il est entièrement subventionné par l'International Rhino Foundation, une organisation américaine.

Il aura pourtant fallu des années de tergiversations, comme souvent en Indonésie, pour faire aboutir le projet.

Normalement prévu pour ouvrir en 2011, il a été freiné par la bureaucratie kafkaïenne qui sévit en Indonésie, avant de se retrouver en butte aux revendications des fermiers locaux, qui demandaient des indemnités pour déménager.

Les responsables du parc évaluent exactement à 51 le nombre de rhinocéros présents en 2012, dont huit petits, selon des images de caméras dissimulées. Mais ils espèrent que leur nombre dépasse en fait les 70.

La situation de l'espèce javanaise est emblématique de la grave menace qui pèse sur l'ensemble des rhinocéros dans le monde.

En Indonésie, une autre espèce de rhinocéros, ceux de l'île de Sumatra (nord-ouest), est également menacée: il en reste moins de cent à l'état sauvage.

En 2011, l'UICN a déjà déclaré disparu le rhinocéros noir d'Afrique de l'Ouest, tandis son cousin, le rhinocéros blanc d'Afrique centrale est "probablement disparu".

Leur corne atteint des fortunes au marché noir, surtout en Asie où la poudre de corne de rhinocéros fait partie de la médecine traditionnelle.

Et la déforestation galopante rogne de plus en plus leur habitat. L'Indonésie a ainsi perdu 20.000 km2 de forêts environ par an en 2011 et 2012, soit le double des 10.000 km2 perdus en moyenne annuelle entre 2000 et 2003. C'est le taux le plus élevé au monde dans la période 2000-2012, selon une étude menée par 15 universités dans le monde et publiée récemment dans la revue Science.

Un moratoire interdit tout défrichement de forêts primaires depuis 2011 mais il est largement considéré comme un échec, en particulier du fait d'une corruption endémique.

En octobre, une réunion de pays asiatiques tenue sur l'île de Sumatra a abouti à des engagements des nations présentes, dont l'Indonésie, l'Inde et le Népal, de faire croître leur population de rhinocéros de 3% par an.

Sur l'île de Java en tout cas, on ne veut pas voir mourir le rhinocéros local, considéré comme sacré.

"Nous devons tout faire pour empêcher la disparition d'Abah Gede", estime Subaya, un paysan de 67 ans, utilisant le nom local de l'animal, "L'Illustre Père".

"Les gens ici croient que si Abah Gede disparaît, une catastrophe va nous arriver", explique le fermier.

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