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Jean-Martin Aussant et ses amis au Lion d'Or : comme un soir de Saint-Jean

Jean-Martin Aussant et ses amis au Lion d'Or : comme un soir de Saint-Jean
CP

On aurait pu se croire sur les plaines d'Abraham, à Québec, un soir de Saint-Jean-Baptiste. Mais on était plutôt dans l'intimité d'un Cabaret Lion d'Or, à Montréal, rempli à pleine capacité en cette superbe soirée du mois d'août. Jeudi, Jean-Martin Aussant et ses amis Catherine Dorion, Kim Lizotte et François Parenteau ont crié haut et fort leur amour du Québec et leur volonté de le voir grandir, s'affirmer, s'émanciper. Avec de la poésie, des chansons, des tirades senties et quelques bonnes blagues, ils ont lancé un appel à l'union, à la mobilisation, à la conviction. Ils se sont aussi désolés de l'inertie de leurs concitoyens, de leur crainte d'aller de l'avant, de leur difficulté à se révolter. En somme, ils ont lancé une invitation à leur peuple, qui se résumait à peu près à un message du genre : « Et si on se levait ? Si on essayait ? Peut-être obtiendrions-nous des résultats... »

À l'entracte, un murmure approbateur comparait la réunion d'Aussant et sa bande à l'Osstidcho de 1968. Un parallèle judicieux à plusieurs niveaux, tant en ce qui a trait à l'enrobage un brin collégial, préparé mais pas trop rigoureux, du spectacle (le groupe avait d'ailleurs répété seulement deux jours avant l'événement) qu'à son ton engagé, revendicateur et contestataire. On ne parlera peut-être plus de cette prestation dans 40 ans, mais il faut quand même admettre que celle-ci avait vraiment de la gueule.

L'émotion de Catherine Dorion

Derrière un ordinateur portable, Catherine Dorion a souhaité la bienvenue au public en tapant des consignes rigolotes qui défilaient simultanément sur un écran. « La peur est l'envers du désir », a-t-elle notamment écrit en guise de prélude. Puis, assis à son clavier, Jean-Martin Aussant a prononcé de rares paroles, souhaitant visiblement laisser toute la place, le temps de quelques heures, au musicien, et non au politicien, en lui. « On va passer une très belle soirée, en musique et en mots! », a-t-il promis.

Ses rythmes électroniques ont accompagné les très inspirés discours de Catherine Dorion; la candidate d'Option nationale a livré avec émotion des textes pleins d'esprit, très imagés, lumineux, mais parfois aussi déprimants. Elle a jasé mondialisation, en arguant que « le bout du monde se vend pour pas cher », en utilisant une métaphore impliquant des couvercles de plats Tupperware. Elle a questionné notre déresponsabilisation collective : « Pourquoi ne sommes-nous pas en colère? » En abordant les suicides dans les pays communistes, elle a ensuite souligné notre immobilisme. « Les gens bien ne souffrent pas de l'absence de sens [...] Nous sommes un peuple triste, nous n'avons pas voix au chapitre. Nous ne faisons pas de sens. Nous n'existons déjà pas. Pendant que vous regardez votre histoire passer à RDI, moi, je m'en vais faire mon pays. »

Son dernier passage sur scène a certainement été le plus percutant, alors qu'elle a déclamé une prière destinée aux siens. « Vive mon peuple. Vive ma gang. T'es hot. Même avec tes faiblesses, t'es belle, t'es originale, t'es rare. Je ne veux pas te faire chier, mais je te le dis parce que je t'aime : tu mérites mieux que ça. Alors, dégêne-toi et sors de chez vous. Tu vas voir, tu vas y prendre goût. Parce que c'est là que l'aventure commence. »

De Yasser Arafat aux Témoins de Jéhovah

« Capotez pas! », a lancé Kim Lizotte avant d'entonner une « lettre aux Canadiens anglais » dans la langue de Shakespeare. « Moi, j'aime tout le monde. Que vous soyez séparatistes ou complètement déconnectés de la réalité, je vous aime tous également! » Personne n'a contredit son aplomb. Un peu plus tôt, d'une voix juste, la jeune trentenaire avait chanté sa tristesse devant un chaos qu'elle dépeignait comme un incendie.

À quelques reprises pendant la présentation, le « personnage » de Yasser Arafat, des Bleu Poudre, s'est imposé sous forme de vidéo, pour envoyer quelques gags sur les fédéralistes, les Québécois, les Canadiens et l'électeur moyen. Ces segments, une gracieuseté de Ghislain Taschereau, ont fait mouche auprès de l'assistance.

François Parenteau a lui aussi misé sur l'humour pour défendre son opinion. Selon lui, si le règne de Duplessis est aujourd'hui connu sous l'appellation de « Grande Noirceur », dans plusieurs années, on parlera de la période au pouvoir de Jean Charest et Stephen Harper comme de la « Trace de break » de notre histoire. Il a peut-être mis un doigt sur l'un des bobos des souverainistes en alléguant que leur ardeur à vouloir convaincre la population leur nuisait peut-être et contribuait à faire d'eux des « témoins de Jéhovah ». Puis, en observant son peuple, qui « sait se raconter des histoires parce qu'il refuse sa propre histoire, qui sait se plier comme le roseau au vent dominant de l'économie », il s'est prêté à des imitations successives de René Lévesque, Jacques Parizeau, Pierre Elliott Trudeau, Jean Chrétien, Bernard Landry, Stephen Harper, Jean Charest, et plusieurs autres, avant de conclure avec un « Mes chers amis, à la prochaine fois! » Il a reçu comme réponse un tonnerre d'applaudissements chaleureux.

Hommage à Parizeau

Le 8 août marquant le 25e anniversaire du décès de Félix Leclerc, on avait concocté un montage de phrases du défunt poète. Présent dans la salle, Jacques Parizeau, qui célèbre son anniversaire en ce 9 août, a aussi eu droit à son petit hommage, un « C'est à votre tour... » fredonné par Kim Lizotte. Quelques-uns des ses mots avaient également été assemblés au goût du jour, sur fond de musique techno, alors que défilaient, derrière, des images d'un riche passé, le nôtre. « N'ayez pas peur de vos rêves. N'ayez pas peur des obstacles qu'on va mettre sur votre chemin », a résonné la voix de l'ancien leader du Parti Québécois dans le Lion d'Or. Le moment a été couronné d'une ovation debout.

Jean-Martin Aussant, Catherine Dorion, Kim Lizotte et François Parenteau ont finalement salué le parterre avec une mise en scène populaire sur YouTube, en levant des cartons blancs sur lesquels étaient inscrits divers énoncés relatifs au Québec et à la souveraineté. « Le projet de souveraineté se réalisera », a brandi l'une. « C'est dans nos têtes que ça se passe », a montré l'autre. Un proverbe africain a conclu cette courte manifestation, toute en sourires et en légèreté : « Le meilleur moment pour planter un arbre, c'était il y a 20 ans. Le deuxième meilleur moment, c'est maintenant. »

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