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Des enfants autochtones auraient servi de cobayes pour des régimes expérimentaux

Des enfants autochtones auraient servi de cobayes pour des régimes expérimentaux

Une recherche basée sur des documents historiques fédéraux révèle que des Autochtones affamés ont servi de cobayes pour des régimes expérimentaux dans les années 1940 et 1950. Le gouvernement fédéral qualifie les faits rapportés de « totalement inacceptables ».

Selon l'article publié dans la revue savante Histoire sociale/Social History, les tests auraient été commandés par des bureaucrates du gouvernement fédéral.

Découverte accidentelle

Ian Mosby, qui étudie l'histoire de l'alimentation au Canada à l'Université Guelph, menait des recherches sur le développement des politiques canadiennes sur la santé lorsqu'il a remarqué quelque chose de bizarre.

« J'ai trouvé des références vagues à des études menées sur des "Indiens" qui ont piqué ma curiosité », raconte-t-il. « Elles me semblaient potentiellement problématiques. J'ai donc décidé de trouver ce qui s'était passé. »

Il a découvert des documents gouvernementaux révélant l'existence d'un programme national dans lequel au moins 1300 Autochtones auraient participé à leur insu. La plupart des cobayes étaient des enfants.

Autochtones affamés

Le tout a commencé en 1942, après une tournée effectuée par des fonctionnaires dans le nord du Manitoba. Ils ont visité de nombreuses réserves, dont Opaskwayak et Norway House.

Les chercheurs y ont trouvé des gens affamés. Les communautés étaient très pauvres à cause du déclin de l'industrie de la traite des fourrures et la diminution du financement gouvernemental.

Les chercheurs ont décrit les Autochtones qu'ils ont rencontrés comme des gens « paresseux, indolents, imprévoyants et inertes ». Selon eux, ces caractéristiques étaient causées par la malnutrition.

Selon les chercheurs, les Autochtones dans ces communautés consommaient moins de 1500 calories par jour, alors qu'un adulte en santé en consomme au moins 2000.

Cobayes idéaux

Au lieu de recommander l'augmentation du financement des communautés autochtones, les chercheurs ont décidé que des gens isolés, dépendants et affamés seraient des cobayes idéaux pour évaluer les effets de différents régimes.

« Les vitamines et les minéraux venaient juste d'être découverts », explique Ian Mosby. « Dans les années 1940, on se demandait quels étaient les besoins du corps humain en termes de vitamines. »

Tests menés partout au Canada

La première expérience a été menée en 1942 sur 300 résidents de Norway House, dans le nord du Manitoba. Les chercheurs ont donné des suppléments vitaminés à 125 personnes. Les autres n'ont rien reçu.

Des expériences ont aussi été menées sur des enfants dans les pensionnats autochtones de Port Alberni, en Colombie-Britannique, de Lethbridge, en Alberta, de Schubenacadie, en Nouvelle-Écosse et de Kenora, en Ontario.

Dans un cas, l'école a réduit de moitié la ration de lait des élèves pendant deux ans. Ailleurs, les écoles ont privé certains enfants de vitamine B1, de fer et d'iode pour créer des groupes de contrôle.

Dans une école, les enfants ont mangé des mets préparés avec une farine enrichie qui était prohibée au Canada en vertu des lois sur l'altération alimentaire.

Certains traitements dentaires des enfants ont été suspendus dans ces écoles, car la santé bucco-dentaire était un outil de mesure important et les chercheurs ne voulaient pas que les résultats de leurs études soient affectés.

Recherches infructueuses

Selon Ian Mosby, les chercheurs n'ont pas beaucoup appris de leurs cobayes affamés. Parmi les quelques documents publiés, il n'a pas été capable de trouver les conclusions des études.

« Ils savaient déjà que la vraie cause de la malnutrition était le sous-financement », conclut-il. « Cela avait été établi avant d'entamer les études et, une fois les études faites, le problème [du sous-financement] était toujours là. »

Dans une déclaration transmise mardi soir à Radio-Canada, l'attachée de presse du ministre fédéral des Affaires autochtones affirme que « si cette histoire est vraie, ce qui est rapporté est aberrant et totalement inacceptable ».

« Quand le premier ministre [Stephen] Harper a fait des excuses historiques aux anciens étudiants des pensionnats autochtones en 2008, au nom de tous les Canadiens, il a reconnu que cette période de l'histoire avait causé un grand tort et n'avait pas sa place au pays », poursuit Andrea Richer, attachée de presse du ministre Bernard Valcourt.

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