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Le conseiller à l'éthique a prévenu le sénateur Boisvenu au printemps 2012

Le conseiller à l'éthique avait prévenu le sénateur Boisvenu
PC

OTTAWA - Le sénateur conservateur Pierre-Hugues Boisvenu dit que le conseiller sénatorial en éthique, mis au courant de sa relation amoureuse avec son adjointe, lui a dit, dès le printemps 2012, que cela devait cesser.

La relation entre M. Boisvenu et Isabelle Lapointe a pourtant continué pendant plusieurs mois après l'intervention du conseiller en éthique.

«J'ai demandé un avis au commissaire à l'éthique au printemps 2012 et effectivement il m'a demandé, si j'étais encore en relation avec (Mme Lapointe), (...) de clairer (sic) la chose», a raconté le sénateur, mardi matin.

Depuis qu'il avait fait les manchettes au début du mois, M. Boisvenu s'était montré très discret, évitant même de se présenter aux comités où il siège, question d'éviter les journalistes. Mais mardi matin, il était de retour au travail et c'est à la porte d'un comité sénatorial qu'il a été intercepté et qu'il s'est confié, sans aucune résistance.

«Pendant les mois qui ont suivi, c'était un sujet de discussion qui était entre elle et moi. Et on est arrivé à l'automne, à la fin de l'automne 2012, pour dire: ben écoute, il faut cesser la relation ou si la relation se maintient d'aller travailler ailleurs», a-t-il relaté.

Pendant trois de tous ces mois de discussion autour de l'avis du conseiller en éthique, M. Boisvenu habitait chez Mme Lapointe, à Gatineau. Ce sont ces trois mois, à 29 $ par jour d'allocation, qu'il a remboursés au Sénat, ce qui représente une somme d'environ 900 $.

«(C')était de l'argent tout à fait clean (sic), qui correspondait aux critères. Et j'ai pris la décision, pour ne pas être en conflit d'intérêts avec mon adjointe, parce que c'est chez elle que j'hébergeais, de rembourser le 900 $», a-t-il expliqué. Cette décision, elle a été prise début mars lorsque toute l'affaire a éclaté au grand jour.

C'est aussi seulement le 11 mars que Mme Lapointe a cessé de travailler au bureau de M. Boisvenu. Pour ce qui est de la fin de leur relation amoureuse, la rupture finale aurait eu lieu «des semaines avant» que La Presse ne publie les premiers détails sur la situation du sénateur, à en croire le principal intéressé qui admet du même souffle qu'«à partir du moment où l'événement était connu publiquement, ça a accéléré les choses».

M. Boisvenu admet que la recommandation du conseiller en éthique était «relativement claire». Mais il explique que la relation amoureuse avec Mme Lapointe «c'était une relation qui allait, qui venait, comme avec ma conjointe parce que j'étais complètement déchiré entre les deux». Et c'était aussi difficile de se séparer professionnellement de Mme Lapointe, qu'il regrette encore.

«Je le constate depuis que Mme Lapointe a quitté... C'est comme si la motivation au travail, c'est comme si le dynamisme du bureau a complètement disparu. Mon adjointe, c'était le coeur du bureau (...) et c'était vraiment le ciment, je veux dire, entre mon adjoint politique, entre le cabinet. Et quand ça disparaît, (...) tout s'écrase, s'écroule. Puis là, on se demande si on peut rebâtir cette chimie-là si importante», s'est désolé le sénateur.

M. Boisvenu maintient qu'il n'a rien fait de mal même si les règles du Sénat interdisent d'employer un proche. Ce n'est pas ainsi qu'il interprète ces règles. D'après lui, c'est l'embauche d'un conjoint qui est interdite, or Mme Lapointe n'était pas sa conjointe lorsqu'il l'a embauchée.

La règle du Sénat se lit exactement ainsi dans un guide sénatorial: «Les sénateurs ne peuvent pas embaucher parmi leur personnel un membre de la famille ou un membre du ménage». Le guide définit comme membre du ménage «quiconque habite effectivement ou habituellement dans la résidence du sénateur».

Au bureau du conseiller en éthique, on ne commente pas les contacts avec le sénateur Boisvenu. Mais on laisse entendre qu'une fois un conseil donné, on en reste là. «La fonction du bureau n'en est pas une policière», a fini par dire Louise Dalphy, du Bureau du conseiller sénatorial en éthique, après avoir refusé de commenter l'affaire, même en termes généraux.

«Quand un conseil, un avis est demandé, c'est de façon confidentielle et on ne peut pas commenter sur le processus entre le sénateur et le conseiller en éthique», s'est-elle justifiée.

L'opposition, elle, ne veut pas en rester là. Le Bloc québécois réclame le remboursement total du salaire que Mme Lapointe a reçu à partir du moment où le sénateur a été avisé par le conseiller en éthique de l'irrégularité de sa situation, au printemps 2012, et jusqu'au départ de Mme Lapointe, le 11 mars dernier.

«Je pense que le sénateur doit faire en sorte qu'il y ait un remboursement intégral de l'ensemble des sommes à sa conjointe de fait ou d'ailleurs. (...) C'était inapproprié, c'est non éthique», a lancé Daniel Paillé, le chef bloquiste.

De son côté, le Nouveau Parti démocratique estime que le sénateur a violé la règle. «S'il a été prévenu, (...) effectivement, six mois pour réagir, c'est un petit peu lent», a commenté le député Alexandre Boulerice.

M. Boisvenu, lui, dit ne rien regretter.

«Pas des regrets mais beaucoup d'amertume par rapport à certains médias qui ont traité cette affaire-là (...) quasiment comme un crime», a-t-il accusé.

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