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Le règlement P-6 ne doit pas prévaloir sur le droit de manifester, selon Québec solidaire

Le règlement P-6 ne doit pas prévaloir sur le droit de manifester, selon Québec solidaire

L'application d'un règlement municipal ne devrait pas avoir préséance sur les chartes canadienne et québécoise des droits et libertés, a plaidé Québec solidaire, samedi. La formation politique dénonce vertement l'opération de masse survenue vendredi soir, alors que plus de 200 protestataires ont été interpellés dès les premières minutes d'une manifestation organisée à Montréal.

La candidate défaite de Québec solidaire dans la circonscription de Sainte-Marie/Saint-Jacques, Manon Massé, joint sa voix à celles d'autres organisations et demande l'intervention du gouvernement Marois, l'exhortant à « réhabiliter le droit de manifester » et à « empêcher les arrestations de masse ».

Rejointe au téléphone, Jacqueline Aubé, attachée de presse du ministre de la Sécurité publique, a déclaré que ce dernier n'accorderait par d'entrevues au cours du week-end. Soutenant qu'il valait mieux s'adresser au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) pour discuter de ce dossier, elle a fait remarquer qu'il était normal que des personnes ont été arrêtées considérant qu'aucun trajet n'ait été divulgué par les organisateurs de la manifestation.

Depuis quelques semaines, le SPVM invoque tôt le règlement municipal P-6 plutôt que d'attendre que des méfaits soient commis et procèdent promptement à des interpellations. Et le montant de l'amende est salé : 637 $.

Comme ce fut le cas lors de la manifestation contre la brutalité policière, le 15 mars dernier, la manifestation de vendredi soir n'a tout simplement pas eu lieu puisque les policiers ont procédé à des interpellations avant même que les manifestants ne quittent le lieu de rassemblement et sans que des méfaits aient été commis.

Dilemme juridique

À l'issue de la manifestation, un porte-parole du SPVM, le sergent Jean-Bruno Latour, avait déclaré en entrevue téléphonique à La Presse Canadienne que la charte « permet la liberté d'expression, mais pas de liberté de manifestation ».

L'article 3 du chapitre 1 de la Charte des droits et libertés du Québec stipule que « toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d'association ». Son pendant canadien prévoit, à l'article 2c, que « chacun a les libertés fondamentales suivantes », dont la « liberté de réunion pacifique ».

En outre, dans un avis rendu le 16 mai dernier, le Barreau du Québec, faisait valoir que « l'obligation de divulguer à l'avance le lieu exact et l'itinéraire d'une manifestation peut constituer, en certaines circonstances, une restriction trop importante à la liberté de réunion pacifique garantie par les articles 2c) de la Charte canadienne et 3 de la Charte québécoise ».

Selon l'avocate Véronique Robert, l'assertion du sergent Latour mène à deux constats : « le premier, les policiers devraient impérativement suivre plus de cours de droit dans le cadre de leur formation. Le second, ça ne va pas du tout au Québec actuellement, et ça fait peur », a-t-elle réagi dans un billet de blogue publié samedi sur le site de l'hebdomadaire Voir.

Invité à revenir sur sa déclaration, samedi, le principal intéressé a soutenu que les chartes complétaient les droits, mais qu'elles n'allaient « pas à l'encontre des obligations non plus ».

Les organisateurs de la manifestation étudiante de vendredi soir ont aussi remarqué le changement de tactique des forces de l'ordre. Ils jugent qu'ils ont été victimes d'intimidation policière. Daniel Crespo, porte-parole de l'Association facultaire des étudiants en science politique et droit de l'UQAM, en lien avec l'ASSE, croit qu'il s'agit d'une manière de décourager tout mouvement de contestation.

L'association reconnaît que donner le trajet de la manifestation pourrait sans doute éviter les arrestations préventives, mais les votes obtenus en assemblée générale empêchent de le faire. Les membres prétextent qu'une telle collaboration pourrait se retourner contre les manifestants et risquerait de se traduire par des arrestations de masse.

La stratégie pourrait être mise à l'épreuve sous peu, car déjà, une autre manifestation du 22 se profile à l'horizon, en avril. Cette fois, les protestataires sont invités à marcher pour l'abolition du règlement municipal P-6, comme l'indique la page Facebook créée pour l'événement.

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