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La plus haute institution judiciaire d'Egypte dénonce les décisions du président «pharaon» Mohamed Morsi

Morsi, un président «pharaon»?
AFP

La plus haute institution judiciaire d'Egypte a dénoncé samedi 24 novembre les décisions du président Mohamed Morsi qui mettent ses décisions à l'abri de recours devant la justice. Les juges d'Alexandrie ont annoncé une grève dans la foulée.

La déclaration constitutionnelle annoncée jeudi 22 novembre par la présidence "est une attaque sans précédent contre l'indépendance du pouvoir judiciaire et ses jugements", a déclaré dans un communiqué le Conseil supérieur de la magistrature à l'issue d'une réunion d'urgence. Le Conseil, qui supervise les affaires administratives et les nominations des juges et magistrats, a appelé le président à retirer de sa déclaration constitutionnelle "tout ce qui touche au judiciaire".

Les juges d'Alexandrie ont annoncé quelques minutes plus tard une grève ouverte dans la deuxième ville d'Egypte pour protester contre les nouvelles prérogatives du président. Le Club des juges d'Alexandrie a décidé "la suspension du travail dans tous les tribunaux et les bureaux du procureur dans les provinces d'Alexandrie et Beheira (...) jusqu'à la fin de la crise causée par la déclaration" constitutionnelle de Mohamed Morsi, a annoncé Mohammed Ezzat al-Agwa, président du Club dans un communiqué. La province de Beheira est proche d'Alexandrie. Les juges d'Alexandrie "n'accepteront rien de moins que l'annulation" de la déclaration de Mohamed Morsi qui viole selon eux le principe de séparation des pouvoirs, a précisé Mohammed Agwa.

Depuis jeudi, la contestation gronde dans la rue et dans les médias. Principale figure de l'opposition et Prix Nobel, Mohamed ElBaradei a déclaré jeudi que Morsi s'est proclamé "nouveau pharaon" en élargissant ses pouvoirs et en se plaçant au-dessus de la justice. "Aujourd'hui Morsi a usurpé tous les pouvoirs et s'est proclamé nouveau pharaon d'Egypte. Un énorme coup porté à la révolution qui pourrait avoir d'épouvantables conséquences", a-t-il écrit sur Twitter.

Vendredi, des manifestants ont incendié des locaux du parti des Frères musulmans dont est issu le président Mohamed Morsi. Les partisans du président égyptien Mohamed Morsi et ses opposants avaient commencé à manifester chacun de leur côté vendredi dans la matinée. Les premiers, rassemblés devant le palais présidentiel dans le nord de la capitale, scandaient "le peuple soutient les décisions du président".

Les opposants, en majorité des libéraux, se sont pour leur part regroupés place Tahrir, dans le centre du Caire, qui fut l'épicentre de la révolte pro-démocratie ayant chassé du pouvoir l'ex-président Hosni Moubarak en février 2011.

Gaz lacrymogènes sur la place Tahrir

Samedi, Les forces de sécurité ont tiré au Caire des gaz lacrymogènes pour disperser les opposants, toujours présents sur la place. De petits groupes de manifestants continuaient d'occuper la place en fin de matinée, après avoir fui un peu plus tôt les gaz lacrymogènes en se réfugiant dans des rues adjacentes. Le trafic était quasiment interrompu sur ce grand carrefour habituellement encombré du centre-ville.

"L'Egypte entre dans une nouvelle révolution car notre intention n'était pas de remplacer un dictateur par un autre", a déclaré un manifestant, Mohammed al-Gamal, en allusion à la révolte populaire qui avait renversé Hosni Moubarak en février 2011.

Le Courant populaire, dirigé par le nationaliste de gauche Hamdeen Sabbahi, troisième de la présidentielle de juin, a appelé à une manifestation de masse mardi pour obtenir que Mohamed Morsi revienne sur ses décisions.

Un pouvoir plus grand que Moubarak

Le président, qui détient déjà les pouvoirs exécutif et législatif, a privé les instances judiciaires, dernier organe de contrôle de ses pouvoirs, de la possibilité d'examiner des appels contre ses décrets. Le pouvoir judiciaire ne peut plus non plus dissoudre la commission constituante, comme le souhaite l'opposition libérale et laïque, qui dénonce sans relâche la domination des islamistes sur cette instance.

Le président Morsi se réserve également le droit de prendre toute décision au nom de la "défense de la révolution" qui a mis fin en février 2011 au régime de Hosni Moubarak. Ces prérogatives exceptionnelles doivent cesser avec l'adoption d'une nouvelle Constitution, un processus actuellement enlisé. Le président élu en juin dernier dispose ainsi de prérogatives que même son très autocratique prédécesseur n'avait pas, soulignent les opposants à Mohamed Morsi.

Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, est de surcroît accusé de vouloir imposer graduellement la charia (loi islamique), comme cela apparaît dans des dispositions d'un avant-projet de Constitution. Une fois que la Constitution aura été ratifiée, une nouvelle Chambre des députés doit être élue pour remplacer celle dominée par les islamistes, dissoute par un tribunal juste avant l'élection de Mohamed Morsi en juin.

L'ancien chef de la Ligue arabe Amr Moussa et l'ancien chef de l'agence nucléaire de l'ONU Mohamed ElBaradei ont dénoncé les mesures prises par Mohamed Morsi, qualifié de "nouveau pharaon". Pour Freedom House, basée à Washington, ces décisions "étendent les pouvoirs présidentiels au delà de ceux qu'avaient ses prédécesseurs, y compris Moubarak".

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